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La vie comme un plan d’affaires

Photo: Josie Desmarais/Métro

Enthousiaste inassouvi, Ilyes El Ouarzadi énumère ses réalisations et projets sans reprendre son souffle. Depuis qu’il a quitté le Maroc en 2006, il mène sa vie comme un plan d’affaires, un succès après l’autre.

Ilyes est encore à l’orée de l’adolescence quand un de ses oncles déménage à Montréal en 2001. «Ça a inspiré mes parents; on est venus en 2003, pour voir. Puis, ils ont demandé une résidence permanente… pour voir. En juillet 2006, on s’installait!»

Son frère jumeau et lui s’inscrivent in extremis au cégep, en sciences pures et appliquées, à deux mois de la rentrée. L’été suivant, Ilyes participe à Shad Valley, un programme universitaire pancanadien. Il y découvre les technologies de la finance et comprend qu’il ne sera pas ingénieur, comme il l’avait toujours pensé, mais entrepreneur. Son équipe gagne le concours grâce à un plan d’affaires pour un projet de recharge des objets grâce à l’énergie cinétique.

Ilyes s’est fait un devoir d’exceller. «Nos parents ont tout quitté pour nous offrir un meilleur accès aux études supérieures. Ils avaient tous deux une très bonne situation.» Ingénieure de formation, sa mère occupait un poste à responsabilités au département de statistiques du gouvernement marocain. Son père, lui, enseignait au secondaire. Le Maroc offrait alors un programme de départ volontaire à la retraite, et ils ont saisi l’occasion. Ici, sa mère a néanmoins repris des études pour enseigner les mathématiques au secondaire.

Après le cégep, Ilyes opte pour un baccalauréat en administration des affaires, bouclé en 2012 à HEC. Cette même année, il fait partie de la délégation québécoise au Global Entrepreneurship Congress de Liverpool. Particulièrement inspiré par une conférence de Richard Branson (PDG de Virgin), il confirme son choix de devenir entrepreneur.

«L’identité est toujours une question profonde. Je me définis comme un citoyen du monde, d’abord par mes valeurs d’ouverture à l’autre et à la différence. Et je suis très fier d’être citoyen de ce Canada multiculturel.» –Ilyes El Ouarzadi

Avec deux étudiants de sa cohorte, il lance une compagnie de développement d’applications mobiles qui leur vaudra plusieurs distinctions, dont les prix Jeune promoteur de la CEDEC de Notre-Dame-de-Grâce et Coup de cœur du concours québécois en entrepreneuriat. Quatre ans plus tard, le palmarès s’est étoffé au fil des réalisations. Dernière-née : Fika, une application mobile qui permet aux cafés indépendants montréalais de bénéficier de la même technologie que les grandes chaînes en termes de fidélisation de la clientèle. Lancée en 2015, Fika compte aujourd’hui 30 cafés participants et 5 000 utilisateurs réguliers. «Un début prometteur», estime Ilyes, qui vise loin et compte bien voir grandir son bébé.

Nous discutons depuis près de trois quarts d’heure et l’entrevue arrive à son terme quand Ilyes s’exclame : «Mais je n’ai pas encore parlé de ma carrière!» Ou plutôt, de son emploi. Parce qu’à côté de tout ça, Ilyes travaille à temps plein pour CIBC depuis trois ans. Il y est entré comme conseiller en finances personnelles et est aujourd’hui directeur de comptes, notamment pour des petites entreprises. Il n’en perd pas une miette, s’inspire de leurs expériences, repère leurs bons et moins bons coups pour mieux envisager son propre avenir d’entrepreneur.

Parce qu’il voulait aussi redonner à la communauté qui l’a accueilli, Ilyes s’implique auprès des Carrefours jeunesse-emploi, convaincu que c’est aux jeunes qu’il faut donner des occasions d’entreprendre, des moyens de rêver et de réaliser ces rêves. Au sein du Forum des compétences canado-marocain, il tisse tranquillement une toile par-delà les mers, établissant un réseau de contacts avec de jeunes entreprises marocaines. «L’entrepreneuriat marocain se développe depuis une dizaine d’années seulement. Tout est à faire.» À la question «Vous arrive-t-il de dormir ?», il répond : «Je fais beaucoup de sport.»

Comment se définit-il, lui qui a quitté son pays en pleine adolescence, à l’âge des amitiés fondatrices ? «L’identité est toujours une question profonde. Je me définis comme un citoyen du monde, d’abord par mes valeurs d’ouverture à l’autre et à la différence. Et je suis très fier d’être citoyen de ce Canada multiculturel. J’ai quitté des amis, mais j’ai une bonne capacité d’adaptation, j’aime le changement et j’aime prendre des risques.» Un entrepreneur dans l’âme, très XXIe siècle.

Une fois par mois, Métro propose, en collaboration avec le projet Alliés Montréal de la Conférence régionale des élus de Montréal (CRÉ), des portraits inspirants de Montréalais issus de l’immigration qui témoignent de leur parcours et de leurs succès.

L’émission de Radio-Canada International Tam-Tam Canada a produit une version radio de ce reportage. Réalisée par la journaliste Anne-Marie Yvon, cette émission est disponible sur le site de RCI.

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