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Gabriel de jour, Gabry-Elle de nuit

Photo: Yves Laroche
Audrey Leblanc - L'Hebdo Journal / TC Media

Gabriel est un homme posé, décontracté et terre-à-terre. Quant à Gabry-Elle, elle est tout le contraire. Elle est extravagante, un peu vulgaire et elle aime attirer l’attention. Bien qu’à l’opposé, ces deux personnalités ont un point en commun : elles partagent le même corps.

Originaire de Shawinigan, Gabriel Meagher-Gaudet a fait ses débuts en tant que drag queen à Trois-Rivières au Cabaret Tapis Rouge. Depuis deux ans, le jeune homme de 24 ans est une étoile montante dans son domaine. Il est d’ailleurs l’une des vedettes de la série télévisée «Ils de jour, elles de nuit» diffusée sur les ondes de Radio-Canada.

Après ses études en comédie musicale à Toronto, Gabriel a découvert le métier de drag queen par pur hasard. «J’ai décroché un rôle dans la comédie musicale Hairspray. J’ai interprété la mère, qui est toujours joué par un homme. À partir de là, de fil en aiguille, on m’a demandé d’animer des cabarets, raconte-t-il. J’ai animé, en drag, une levée de fonds pour la troupe de théâtre. C’est là que j’ai découvert ça. J’ai eu des opportunités par la suite.»

«Il y a environ 2 ans, j’ai fait une levée de fonds pour Gai Écoute au Cabaret Tapis Rouge à Trois-Rivières, poursuit ce dernier. Avec quelques amis, on a fait des spectacles de drag queens par la suite au Cabaret et c’est là que ma carrière en drag a commencé. Au même moment que la levée de fonds à Trois-Rivières, il y avait des auditions à Québec. J’y suis allé et j’ai reçu une offre d’animation la semaine suivante au Drague Cabaret Club.»

Depuis, Gabriel se transforme en Gabry-Elle plusieurs fois par semaine pour fouler les planches de ce cabaret de capitale nationale, en plus de se produire à Montréal au populaire Cabaret Mado de Mado Lamothe ainsi qu’à Trois-Rivières à l’occasion.

Un métier marginal
Le métier de drag queen, c’est bien plus qu’une passion pour Gabriel. C’est aussi son gagne-pain. «C’est un deuxième coming out pour moi, confie l’artiste. Le premier en tant qu’homosexuel et le deuxième pour mon métier qui n’est pas conventionnel. Je suis très choyé du soutien de ma famille dans ce que je fais. Je ne pourrais pas demander un meilleur soutien.»

«Un très beau moment dans la série Ils de jour, elles de nuit, c’est quand ma mère explique qu’elle est fière de moi, ajoute-t-il. Ça me fait chaud au cœur. Ma mère a vu à quel point j’étais bien et que j’avais du succès dans mon domaine.»

Conscient que son métier marginal soulève plusieurs questions, Gabriel prend plaisir à répondre aux interrogations des gens qui l’abordent. «Je ne me sens pas toujours jugé, confie-t-il. Je sens beaucoup plus de curiosité que de jugement par rapport à ça. Ce n’est pas un métier commun. Je les comprends d’être curieux et de me poser des questions parce que j’aurais aussi des questions pour les gens qui font des métiers que je ne connais pas.»

Voir au-delà du personnage
Gabriel constate également que certaines personnes sont réticentes et peinent à comprendre qu’un drag queen est un artiste au même titre qu’un chanteur et qu’un comédien. «Il y a aussi des gens qui ont des barrières, remarque Gabriel. La première image que ces gens vont voir de nous, c’est la drag queen. Ils ne se demandent pas nécessairement qui est derrière.»

Pourtant, pour Gabriel, il s’agit simplement d’un personnage conçu de toutes pièces. La personnalité de Gabry-Elle est un amalgame de plusieurs traits de caractère présents chez une multitude de personnes différentes.

Une préparation de 2 heures
Pour que Gabriel devienne Gabry-Elle, il faut environ deux heures de travail. La première étape, c’est le rasage. Ensuite, il faut compter au moins une heure pour le maquillage. Fonds de teint, sourcils, faux cils, rouge à lèvres, rien n’est laissé au hasard.

«Rapidement, on se développe une science pour se maquiller, indique Gabriel. Ça vient avec le temps. On sait ce qui fonctionne sur nous. C’est vraiment du maquillage professionnel de scène. Quand le maquillage est fait, je mets tout ce dont j’ai besoin pour que mon corps devienne le corps d’une femme. J’ai une bourrure pour avoir fausses hanches, un soutien-gorge avec des seins intégrés, de faux ongles et j’utilise une technique pour cacher mes parties génitales.»

Tout le matériel qu’utilise Gabriel pour sa métamorphose est à lui. En maquillage, en vêtements et en chaussures, il y en a pour des milliers de dollars. «C’est un gros investissement, admet-il. Au début, ça coûte très cher parce que tu dois te bâtir une garde-robe. Je ne pourrais même pas compter combien d’argent j’ai investi là-dedans jusqu’à présent. C’est clairement des milliers de dollars.»

Gabriel possède quatre tringles de garde-robe pleines à craquer de vêtements, une soixantaine de perruques et une vingtaine de paires de souliers. Côté maquillage, il a vraiment de tout. «En entrant dans ma loge, on dirait un magasin de maquillage, lance-t-il en riant. Ça vaut assez cher pour que ma loge soit barrée en tout temps. Chaque soir, j’ai environ pour 300 $ de maquillage dans la face.»

Un artiste multidisciplinaire
Parmi les célébrités que Gabriel personnifie, on retrouve Adèle, Magan Trainor et Anne-France Goldwater. «Chaque drag queen monte ses propres numéros. Parfois, on a l’aide d’un directeur artistique ou d’un drag queen sénior. Une drag queen, c’est pas juste une drag queen. C’est un couturier, un coiffeur, un maquilleur, un danseur, un chanteur, un metteur en scène, un chorégraphe. C’est un artiste complet», explique-t-il.

La création d’un seul numéro nécessite plusieurs heures de travail. Il faut d’abord et avant tout bien maîtriser les paroles de la chanson pour que le lip-sync soit impeccable. Gabriel peut travailler pendant une semaine, à temps perdu, sur un seul numéro qui durera en moyenne trois minutes.

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