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L'ancien boxeur Rubin Carter meurt à l'âge de 76 ans

TORONTO – Rubin «Hurricane» Carter, un ancien boxeur américain qui est devenu un infatigable militant des droits des victimes d’erreurs judiciaires après avoir passé près de 20 ans en prison pour un triple meurtre qu’il niait avoir commis, est décédé à sa résidence de Toronto. Il était âgé de 76 ans.

John Artis, son ami de longue date et coaccusé dans cette cause, a précisé que M. Carter est mort dans son sommeil, tôt dimanche matin, après une longue bataille contre un cancer de la prostate.

«Il s’agit d’une lourde perte pour ceux qui se trouvent dans des pénitenciers et qui ont été erronément reconnus coupables, a déclaré M. Artis.

«À partir du moment où nous avons été libérés de prison, il a consacré le reste de sa vie à la cause des condamnés à tort.»

M. Artis a abandonné son travail aux États-Unis et a déménagé à Toronto pour prendre soin de son ami, après que celui-ci eut reçu son diagnostic de cancer il y a près de trois ans.

Pendant les derniers mois de sa vie, au moment où la santé de M. Carter s’était beaucoup détériorée, l’ancien boxeur, immortalisé par une chanson de Bob Dylan en 1975, a dû commencer à se faire à l’idée qu’il était sur le point de rendre l’âme, selon M. Artis.

«Il a tenté d’en faire le plus possible avant sa mort, a raconté M. Artis, relatant les efforts de M. Carter, plus tôt en 2014, pour obtenir la libération d’un homme de New York incarcéré depuis 1985, l’année où l’ancien boxeur a lui-même recouvré la liberté.

«Il ne s’est pas beaucoup attardé sur l’héritage qu’il laisse derrière lui, a-t-il aussi confié. C’est quelque chose qui se réalisera de soi-même grâce au résultat de son travail. C’est ce qui le préoccupait le plus — son travail. Il était une personne très altruiste.»

Né le 6 mai 1937, au sein d’une famille de sept enfants, Rubin Carter a été aux prises avec des difficultés d’élocution et a été envoyé dans un institut de redressement, alors qu’il était âgé de 12 ans, après avoir commis une agression. Il s’est enfui et s’est joint à l’armée en 1954, où il a été confronté à de la ségrégation raciale et où il a appris la boxe en Allemagne de l’Ouest. Après son retour aux États-Unis, il a commis une série d’agressions qui l’ont mené dans des prisons de différents États pendant une durée de quatre ans.

Il a amorcé sa carrière de boxeur professionnel en 1961. Il était plutôt petit de taille pour un pugiliste évoluant chez les poids moyens, mais son style combatif et le nombre élevé de coups de poing qu’il portait pendant un combat en ont fait un boxeur efficace.

La vie de Rubin Carter a changé pour toujours un soir d’été, en 1966, lorsque deux hommes et une femme, tous trois de race blanche, ont été abattus dans un bar du New Jersey.

Les policiers étaient à la recherche de ce que des témoins ont décrit comme étant deux hommes de race noire dans une voiture blanche, et ont intercepté MM. Carter et Artis une demi-heure après les meurtres.

Même s’il n’existait aucune preuve physique tangible liant les deux hommes au crime, et même si les témoins au moment des meurtres ne pouvaient les identifier formellement comme étant les assassins, MM. Carter et Artis ont été jugés coupables. Ces verdicts ont été renversés en 1975, mais les deux hommes ont de nouveau été reconnus coupables un an plus tard.

Après avoir été emprisonné pendant 19 ans, M. Carter a été libéré en 1985 lorsqu’un juge fédéral américain a cassé le second verdict de culpabilité, citant du racisme. M. Artis a aussi été exonéré après avoir été remis en liberté en 1981.

M. Carter a plus tard déménagé à Toronto et a été le fondateur et directeur général de l’Association de défense des condamnés à tort, qui a permis la libération de 18 détenus depuis 1993.

Win Wahrer, une directrice au sein de l’Association, décrit M. Carter comme étant «la voix et le visage» de l’organisation.

«Je crois que c’est grâce à lui si nous avons obtenu de la crédibilité, c’est beaucoup grâce à lui. Il était déjà une célébrité, les gens savaient qui il était. Il a souffert au même niveau que ceux qui ont souffert.»

Même si M. Carter a quitté l’organisation en 2005, les demandes pour entrer en contact ont continué d’affluer.

«Il était un orateur hors-pair et passionné. La toute première fois que je l’ai entendu parler, je savais que je me trouvais devant un homme qui pouvait déplacer des montagnes simplement par sa présence, ses mots et sa passion pour ce en quoi il croyait», ajoute-t-elle.

M. Artis, qui connaissait Rubin Carter depuis 48 ans, a précisé que les membres de la famille de l’ancien boxeur — incluant deux filles — vivent tous aux États-Unis. Quant à ses effets personnels, notamment ses écrits et ses photos, seront légués à une université de Boston.

En 1999, la vie de Rubin Carter a été transposée au grand écran grâce au long métrage Hurricane Carter, mettant en vedette Denzel Washington. La prestation de Washington lui avait valu un Golden Globe ainsi qu’une nomination pour l’Oscar du meilleur rôle masculin.

«Que Dieu bénisse Rubin Carter et son inlassable combat pour assurer la justice pour tous», a déclaré Denzel Washington, dimanche, après avoir été informé du décès de l’ancien pugiliste.

Dans le ring, Rubin Carter a participé à 40 combats entre 1961 et 1966, récoltant 27 victoires dont 19 avant la limite. Il a aussi livré un verdict nul. Le 14 décembre 1964, à Philadelphie, il a subi un revers par décision unanime des juges face à l’Américain Joey Giardello dans un combat de 15 rounds pour le titre mondial des poids moyens de l’Association mondiale de la boxe (WBA) et du Conseil mondial de la boxe (WBC).

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