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Des bâtiments qui créent bien des soucis

Ahuntsic-Cartierville a ses fantômes urbains. Des bâtisses placardées, royaume des squatters et source de gros désagréments pour les riverains.

Des graffitis enlaidissent les murs de la maison et les grands panneaux de bois posés sur les portes et fenêtres pour en interdire l’accès ne semblent pas décourager grand monde. La bâtisse est située à l’angle du boulevard Gouin Est et la rue André-Jobin.

« On se fait réveiller en pleine nuit par des squatters qui font éclater les vitres », signale un résident du quartier qui veut garder l’anonymat. Il raconte que plusieurs évènements de ce genre ont eu lieu depuis 2012.

« Ce n’est pas l’environnement rêvé pour élever une famille. Pourtant c’est un beau secteur résidentiel et historique où plusieurs Montréalais fréquentent le splendide parc de la Visitation tout juste derrière la propriété », constate-t-il exaspéré.

La construction, qui remonte à 1903, a connu diverses occupations résidentielles et a abrité notamment un restaurant et un salon de coiffure. Elle n’est plus habitée, depuis 2011.

Il est vrai que l’état d’abandon évident détonne avec les abords cossus de ce secteur du boulevard Gouin.

Un point de vue historique

En 2013, l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville a déposé un énoncé d’intérêt patrimonial pour cette bâtisse.

Sa situation sur le site historique de l’ancien village du Sault-au-Récollet témoigne de l’évolution qu’a connue ce secteur et présente un intérêt urbanistique.

Pour élaborer le texte à déposer à la Ville, on a réuni des spécialistes, des fonctionnaires de l’arrondissement ainsi que le propriétaire, Riccardo Di Paolo, patron de l’entreprise Donaco ainsi qu’une consultante qu’il a désigné.

« Ce genre de demande permet de savoir si la maison présente un intérêt patrimonial et si on peut la démolir ou non », explique Cécile Baird, architecte de l’Atelier Baird Racine interventions contextuelles (Atelier B.R.I.C). C’est elle qui était choisie par le propriétaire pour mener toute la recherche documentaire pour élaborer l’énoncé d’intérêt patrimonial.

« Le consultant rédige un document de recherche le plus objectif possible qui sert de base de discussion, il n’est pas partie prenante dans la décision », observe Mme Baird.

Quelles suites?

Cela étant, difficile de connaître l’intention du propriétaire. Riccardo Di Paolo. Il a été injoignable malgré plusieurs tentatives de le contacter.

Quant à l’arrondissement, il est en attente de la décision de classer ou non la demeure au patrimoine historique de la Ville.

Rappelons que Donaco avait acquis en 2009 une demeure ancienne située au 10333, rue de Sackeville. Faute d’entretien, la maison s’est délabrée et l’entrepreneur a obtenu, en 2011, le droit de la démolir, d’abattre tous les arbres du terrain et d’y construire deux nouveaux immeubles.

L’histoire du consulat d’Irak

Parmi les maisons vides d’Ahuntsic-Cartierville, notons celle du consul d’Irak située au 100, rue Somerville.

La bâtisse se trouvait au centre d’un litige lié à la première guerre du Golfe, lorsque l’Irak a envahi le Koweït en 1990.

Après la libération du Koweït, la compagnie aérienne de ce pays a demandé un dédommagement de 80 M$ pour 10 de ses avions volés et fait valoir ses droits de saisie sur différentes possessions irakiennes à l’étranger, dont l’immeuble situé au 100, rue Somerville et son terrain.

Le gouvernement irakien a contesté le fait que cette décision prise par un tribunal britannique soit exécutée au Canada.

La maison est demeurée au sujet du procès jusqu’en 2013, sans que les Irakiens puissent l’occuper.

Aujourd’hui, le propriétaire demeure la république d’Irak. Pour sa part, l’arrondissement doit s’assurer que la maison demeure inaccessible.

« Le compte de taxes foncières de l’ancien consulat est payé à chaque année dans les délais requis », précise Karine Tougas, porte-parole de l’arrondissement.

Selon elle, il y a cinq maisons placardées dans l’arrondissement.

« Il y a une différence entre une maison vacante et une inoccupée, souligne Mme Tougas. Dans le deuxième cas l’édifice est vide, mais habitable comme, par exemple, entre deux ventes. »

Elle observe qu’il n’y a pas de problématique particulière liée au squat des maisons vacantes.

L’arrondissement doit s’assurer que la maison vide est inaccessible. Cela ne nécessite pas forcément que la bâtisse soit placardée.

« Si elle est barrée et que les accès sont bien fermés, ce n’est pas nécessaire », note Mme Tougas.

Des inspections sont effectuées trois fois par année dans les maisons vacantes ou sur requête des citoyens du secteur.

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