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«Fredy» à La Licorne: une histoire encore douloureuse

Photo: Collaboration spéciale

Plusieurs personnes liées de près ou de loin à la famille de Fredy Villanueva, ce jeune homme abattu par un policier lors d’une intervention musclée en 2008, ont assisté à la première représentation de Fredy, un docu-théâtre qui revient sur ce tragique événement qui a secoué Montréal-Nord.

Tous ceux contactés par TC Media évoquent une vive émotion et applaudissent le regard objectif de cette pièce qui s’appuie entre autres sur les transcriptions de l’enquête publique qui s’est amorcée dans la foulée du drame.

Un directeur de l’arrondissement, avouant que la pièce jette un éclairage sur certaines tensions raciales à Montréal-Nord, se dit même prêt à ce que l’œuvre écrite par Annabel Soutar et mise en scène par Marc Beaubré puisse un jour être jouée sur une scène de Montréal-Nord.

Me Stéphane Handfiel, avocat de Dany, frère de la victime: «C’est lourd, on sent de la tension»

«C’est une très belle pièce à voir. Cela nous éclaire, nous renvoie vers cette affaire avec un regard différent. Durant la représentation, j’ai eu souvent des frissons. C’est lourd, on sent de la tension, mais c’est très émouvant. Les acteurs sont excellents. Cette pièce ne présente pas la vérité, chacun peut retrouver la sienne selon sa position. Même si elle ne change pas mon opinion, elle apporte un bel éclairage.»

Iannicko N’Doua joue notamment le rôle de Dany Villanueva, le frère de la victime.
Solo Fugère joue notamment le rôle de Dany Villanueva, le frère de la victime.

Claudel Toussaint, directeur de la culture, des sports, des loisirs et du développement social à Montréal-Nord: «Il y a du profilage racial»

«Annabel (Soutar) a fait un travail remarquable, tout en nuance, qui a permis l’expression de divers points de vue, que ce soit celui des avocats, de la police, de la famille ou des citoyens. On ne peut pas dire qu’elle n’est pas objective, c’est une réussite. C’est très documenté, très informatif. Moi-même, j’ai appris des éléments sur les détails de l’intervention. On sort de la pièce avec deux constats désolants: il y a du profilage racial à Montréal-Nord, on ne peut pas nier que ce n’est pas dans ce contexte que cette intervention a débuté. Et une discrimination à l’égard des minorités. Cette pièce m’a un peu brassé. Pourrait-on jouer cette pièce à Montréal-Nord ? Je suis ouvert à la discussion et à cette possibilité, mais cela devrait amener à un dialogue qui ne devienne pas un tribunal pour rejuger l’affaire.»

Will Prosper, proche de la famille Villanueva, fondateur de Montréal-Nord Republik, cité dans la pièce: «Revivre ces événements, c’est très difficile»

«Revivre, sept ans, huit ans plus tard, des événements durant lesquels je me suis beaucoup impliqué, c’est très difficile. Mais je suis heureux de voir que cette pièce ouvre un dialogue. Depuis des années, l’arrondissement ne veut pas parler de ce sujet, essaye de l’étouffer. Cette œuvre ne prend pas position, elle relate les faits et cela fait un grand bien, même si ce n’est pas évident pour les gens concernés.»

Nargess Mustapha, porte-parole de Montréal-Nord Republik: «Très éprouvant»

«Il manque évidemment beaucoup de détails sur l’enquête, mais c’est compréhensible en seulement 1h30. J’ai été très touchée, mais satisfaite du contenu. Revivre les témoignages, notamment ceux des agents de police Lapointe et Pilotte, c’est très éprouvant. Le seul point qui me dérange, c’est que l’on rentre, encore, dans l’intimité d’une famille souffre encore, qui vit toujours avec les séquelles de ce drame.»

Aucun membre de la famille Villanueva n’a souhaité assister à la première représentation de cette pièce le 1er mars, qui se terminera le 26 mars, au théâtre de La Licorne.

Sept acteurs jouent dans Fredy et alternent de nombreux rôles.
Sept acteurs jouent dans Fredy et alternent de nombreux rôles.

Un public également conquis

Au sein des spectateurs de La Licorne, les avis se veulent également positifs. «C’est un très bon résumé d’une histoire que je ne connaissais pas trop, reconnaît Alexandre, 30 ans. Il n’y a aucun jugement, c’est une présentation objective des faits. Au final on se pose une question: il y a une victime, mais à quel prix ?»

«Malgré les journaux et la télévision, on se rend compte que l’on savait peu de choses sur cette affaire, renchérit Louis, 50 ans, habitant du Plateau. On reste habité par la pièce. On a besoin d’un peu de temps pour décanter les faits et absorber les informations. C’est touchant, complexe et assez neutre.»

Un dernier point que ne partage pas Jacques, comédien dans la vie: «Je pense que l’auteure et le metteur en scène sont contre la police, ils défendent la famille. Clairement, en réalisant cette pièce, on sent qu’il y a un abus quelque part. Il faut en tirer des conclusions, pas pour désigner le méchant, mais pour savoir ce que l’on fait pour que ces conneries ne se reproduisent plus.»

Une spectatrice, qui n’a pas hésité à interpeler et féliciter l’auteure lors d’un dialogue final avec l’équipe de la pièce, avoue même s’être sentie «impliquée». «Ce type de pièce contribue à briser les frontières du théâtre. J’ai été provoquée intellectuellement, physiquement et émotivement. Je n’ai pas occupé la même place qu’habituellement au théâtre où l’on assiste simplement à un divertissement. J’ai eu une grosse prise de conscience.»

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