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Des enfants privés de soins à cause du statut d’immigration de leurs parents

Un enfant en visite chez le médecin Photo: Getty Images/iStockphoto

Les enfants nés au Québec de parents ayant un statut d’immigration précaire sont privés de soins de santé gratuits, et ce, contre la loi, dénonce le Protecteur du citoyen et des organismes non gouvernementaux (ONG).

La Régie d’assurance maladie du Québec (RAMQ) «adopte une interprétation tellement restrictive de la loi et de son règlement qu’elle vide de son sens l’exception qui y est prévue pour les enfants dont les parents ne sont pas domiciliés aux Québec», peut-on lire dans le rapport du Protecteur du citoyen publié mercredi.

Actuellement, un enfant né au Québec, qui possède donc la nationalité canadienne, n’a pas accès aux soins de santé gratuitement si ses parents sont en situation d’immigration «précaire». Cette situation concerne les personnes dont la demande d’asile a été refusée, les travailleurs temporaires, les demandeurs de parrainage ou les étudiants internationaux.

Le Protecteur du citoyen souhaiterait que la situation des parents ne soit pas prise ne compte puisque les enfants nés au Québec sont admissibles au régime d’assurance maladie dès leur naissance, selon la loi. Toutefois, en raison de l’interprétation de la Loi sur l’assurance-maladie par la régie, ces enfants ne peuvent pas obtenir de «carte soleil», ni être soignés gratuitement dans les hôpitaux.

Le Protecteur du citoyen soulève un problème longtemps dénoncé par plusieurs organismes et ONG, comme Amnistie internationale et Médecins du monde.

C’est d’ailleurs Médecins du monde qui a alerté le Protecteur du citoyen en novembre 2016 sur la situation de ces enfants, ce qui a mené à cette enquête.

«C’est pour nous un premier pas vers la reconnaissance de ces enfants citoyens canadiens. Ce problème de non-accès aux soins de santé pour ces enfants était inconcevable», se réjouit la directrice aux opérations nationales de Médecins du monde, Véronique Houle.

Pour Médecins du monde, la RAMQ fait de l’excès de zèle en continuant d’interpréter la loi de cette manière, alors qu’elle a été clarifiée en 2001 par Pauline Marois, ministre de la Santé et des Services sociaux à l’époque. En débat parlementaire, Mme Marois avait modifié l’article 5 de la loi sur l’inscription au régime d’assurance en l’ouvrant à tous les enfants nés au Canada, nonobstant le statut d’immigration des parents.

«[Avec ce rapport,] on s’attend à ce que la RAMQ cesse d’avoir un comportement très strict et erroné de la loi pour l’appliquer correctement», défend Véronique Houle.

Médecins du monde a ouvert une clinique en 2011 pour ces enfants exclus du système de santé ainsi que pour les sans-papiers. Des médecins et soignants bénévoles viennent en aide à près de 3000 personnes chaque année. Selon Véronique Houle, depuis 2015, 105 enfants canadiens de parents en situation d’immigration précaire ont été soignés à la clinique. Tous ces enfants, malgré leur citoyenneté canadienne, n’ont pas accès à la RAMQ.

«C’est quoi le problème de ne pas leur donner d’accès? C’est vraiment marginal. Il y a des études qui disent qu’il y a entre 300 et 1200 enfants dans cette situation-là au Québec. Pourquoi empêcher que ces enfants aient accès aux soins ?», s’interroge Véronique Houle.

Interrogée sur ce point, la RAMQ n’a pas souhaité répondre.

Elle a seulement répliqué par voie de communiqué, quelques minutes après la publication du rapport, affirmant agir dans le sens de la loi «et gérer l’admissibilité des personnes au régime d’assurance maladie de manière équitable envers tous, tout en s’assurant de la pérennité du régime».

Selon Médecins du monde, la RAMQ s’appuie sur une jurisprudence antérieure aux modifications effectuées en 2001 pour justifier son refus d’inscrire les enfants dans cette situation.

Une plainte, déposés à la Cour supérieure devrait permettre de trancher ce conflit. C’est du moins ce qu’invoque la RAMQ, qui ne souhaite pas prendre position d’ici là.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, a indiqué ne pas vouloir prendre position dans ce dossier. Il souhaite attendre la décision de la Cour supérieure, dont le verdict est attendu en octobre 2018.

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