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«Le métro, un peu comme un grand centre de jour»

Photo: Josie Desmarais/Métro

Chaque jour, de nombreuses personnes en situation d’itinérance trouvent refuge dans le métro. Si la majorité des usagers de la Société de transport de Montréal (STM) passent leur chemin sans les remarquer, certains les cherchent. Métro a suivi, le temps d’une matinée, les intervenants psychosociaux de la Société de développement social (SDS), qui parcourent le réseau souterrain pour venir en aide aux personnes itinérantes ou vulnérables.

Karine-Isabelle Sylvain et Michael Marois Boucher, deux des huit intervenants de la SDS, qui œuvrent pour le Pôle de services en itinérance de la STM, partent avec nous de la station Berri-UQAM. Aujourd’hui, ils sont l’équipe de la ligne verte. Premier arrêt : Place-des-Arts. À la sortie du wagon, Karine attend que la foule se disperse et observe sur le quai «pour voir si quelqu’un dort». Il n’y a personne. Avec son collègue, elle peut monter à l’étage.

Le duo croise des policières du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), qui leur disent qu’un itinérant intoxiqué dort près des tourniquets. «On a peur pour sa santé. On va aller le réveiller. On le connaît, mais c’est délicat», indique Karine.

Cette intervention a pour but de s’assurer que l’homme puisse aller vers une autre ressource d’aide s’il en a besoin. «On essaie aussi de faire de la prévention et de la réduction des méfaits, en lui expliquant que, s’il reste couché, il peut avoir un ticket», poursuit Karine. L’homme est très intoxiqué et reconnaît à peine les intervenants.

Les policières du SPVM lui demandent donc de se lever et de partir. «Les policiers sont souvent les ennemis des gens de la rue, illustre Michael, qui travaille dans le métro depuis un an. Nous, on a notre écoute, notre parole et, surtout, notre patience. Ils vont commencer par tout décharger sur nous. On comprend que ce n’est pas personnel. Si ça devient trop rough, par contre, il faut mettre ses limites. On se regarde et on se dit qu’on s’en va. Parce que tout peut arriver, on peut être attaqué avec une seringue, de la vitre. Mais quelques jours plus tard, ils viennent souvent s’excuser. Et on leur rappelle qu’on ne le juge pas.»

«On ne peut pas demander­ directement à quelqu’un: “Est-ce que tu as un toit?” La personne pourrait mal le prendre.» – Michael Marois Boucher, intervenant psychosocial de la SDS, qui explique que l’équipe prend souvent le temps d’établir un lien de confiance avec les personnes itinérantes ou vulnérables pour mieux les aider.

«Des histoires de vie incroyables»
Aujourd’hui, c’est plutôt à coup de câlins que se font accueillir le SPVM et les intervenants de la SDS. Une femme inuite arrive et donne un câlin à une policière, puis à la directrice des programmes de médiation sociale de la SDS, Sylvia M Rivès.

«Le métro, c’est un peu comme un grand centre de jour, dit Mme Rivès. On croise souvent les mêmes visages. On finit par connaître des histoires de vie incroyables, auxquelles la plupart d’entre nous n’auraient pas survécu.»

La dame inuite est toute fière de lui montrer la clé de sa chambre. Elle a désormais un toit.

Si les intervenants croisent souvent les mêmes personnes, «il y a toujours de nouveaux visages». Karine et Michael en rencontrent d’ailleurs plusieurs dans un des édicules de la station Place-des-Arts, peut-être surpris par le froid tardif. «On essaie d’établir un premier contact, de les informer de qui on est», souligne Karine, qui est dans l’équipe de la SDS depuis trois ans.

C’est d’ailleurs ce que fait Michael avec une dame à la station McGill. Un simple bonjour, puis elle repart, gênée. «Ça arrive beaucoup, relate-t-il. On parle petit à petit pour gagner la confiance de la personne.»

Parfois, la confiance est très bien établie. L’équipe convainc Réjean, qui dit n’être dans la rue que depuis environ un mois et demi, de parler aux journalistes. «Karine et Michael, ils sont là pour m’aider. Ils s’informent pour voir si j’ai besoin de quelque chose», rapporte-t-il.

L’ancien logement de Réjean était insalubre et il a été incapable de s’en trouver un autre, raconte-t-il. S’il dit qu’il se «débrouille très bien dans la rue», il essaie tout de même, étape par étape, de se retrouver un logement.

Parce que l’idée est là : aider les gens à sortir de la rue. «C’est ce que j’adore, insiste Sylvia. Tu investis beaucoup dans quelqu’un et, des fois, ça peut être décourageant, mais il suffit d’un petit déclic et ça marche. C’est fantastique.»

Investissements
La Ville de Montréal a injecté des fonds pour multiplier par deux le nombre d’heures d’intervention de la SDS dans le métro.

«Ça va me permettre d’étendre les plages horaires, indique Sylvia M Rivès. En ce moment, on fait une tournée le matin, et une l’après-midi [la semaine].»

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