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Des insectes envahissent le marché Jean-Talon

Avant de passer à la préparation, la chef mexicaine Maurỉn Arrelano glisse quelques informations aux jeunes chefs. Photo: Josie Desmarais/Métro

Alors que les insectes peinent à se tailler une place dans l’assiette des Québécois, un organisme montréalais propose ce dimanche au marché Jean-Talon un atelier culinaire où les enfants vont préparer des tacos au cactus parsemés de grillons et de vers de farine.

L’atelier
Une semaine avant l’évènement, la cheffe Maurỉn Arrelano a convié quatre enfants âgés de trois à six ans pour une répétition à la Centrale culinaire dans le Mile End. Après une courte introduction, elle leur présente les bibittes et leur propose de goûter à de gros grillons mexicains (plutôt salés), à des fourmis brésiliennes (au goût fumé) et à des ténébrions de Frelighsburgh (ils remportent la palme chez les enfants qui semblent déjà privilégier l’achat local malgré leur jeune âge): «c’est comme des Rice Krispies», lance timidement Elisabeth, 6 ans.

«Avec les insectes, les parents sont curieux, mais ils hésitent à sauter le pas. Les enfants sont les plus intéressés», confie Karine Desserre-Pezé, fondatrice de l’organisme C’est moi le chef! qui organise des ateliers mensuels au marché Jean-Talon, mais aussi dans des bibliothèques ou à des festivals, afin de transmettre aux enfants et à leurs parents le plaisir de cuisiner en famille (avec bien d’autres ingrédients que des insectes).

Avant de passer à la préparation, la cheffe mexicaine glisse quelques informations aux jeunes chefs : «Les insectes, ça goûte bon, c’est bon pour l’environnement, ils ont beaucoup de protéines et c’est facile à élever». Selon les données des Nations-Unies, à quantités de protéines égale, le grillon a besoin de six fois moins de nourriture que le bœuf et deux fois moins que le poulet. Comme il reste 900 millions de personnes mal nourries sur terre, qu’on sera 9 milliards d’humains en 2050 et que le tiers des terres cultivables sert déjà à l’alimentation animale, l’insecte peut s’avérer une voie à explorer afin de limiter la déforestation.

Maintenant que les jeunes s’affairent à couper des tomates, du cactus et de la coriandre, le calme est revenu dans la pièce et l’on décerne le Ricardo d’or à Adrien, quatre ans, qui manie le «couteau d’adulte» avec une dextérité surprenante.

«On est rendu à notre 15e session d’ateliers au marché Jean-Talon et des parents nous confient n’avoir jamais vu leurs enfants manger de légumes avec autant de plaisir», confie Karine Desserre-Pezé en précisant que le secret «c’est parce qu’avant, ils ont pu les toucher, les sentir et les préparer eux-mêmes». Dans ses ateliers, le parent reste là comme assistant, pas question de laisser les gamins et de partir faire ses courses au marché entre temps!

L’industrie
Selon la firme Global Market Insights, le marché des insectes comestibles passera de 33 M$US en 2016 à 710 M$US en 2024. Mais le Canada est encore loin d’avoir des restaurants spécialisés offrant du scorpion ou des oeufs de fourmis, le caviar mexicain. Et mis à part l’ontarienne Entomo Farms, qui produit 900 millions de grillons par an, c’est plutôt le désert.

Toutefois, la toute jeune Fédération des producteurs d’insectes comestibles du Québec, qui a vu le jour il y a un an, compte une quarantaine de membres.

«Un simple changement des mentalités est ce qu’il manque en ce moment pour obtenir une explosion du marché des insectes comestibles. Je pense que le Québec est plus prêts que l’on pense», lance Samuel Richard, président d’Insectivore qui a  récemment racheté La fermes d’insectes qui se spécialise dans la productions de vers de farine à Frelisburgh.

Selon un sondage réalisé en 2016 par un finissant à la maîtrise en environnement de l’Université de Sherbrooke, 70% des  répondants ont dit «que les insectes représentent potentiellement ou définitivement une source de protéines intéressante pour remplacer leur consommation de viande». Mais préférablement sous forme de poudre ou de farine, car l’apparence et la texture restent un frein important.

Côté produits québécois, Maurỉn Arrelano suggère d’essayer les pâtes Melio, les brownies, farines et grignotines offerts en ligne par La Mexicoise ou les suçons aux ténébrions de l’Insectarium. Et pour les adeptes de food trucks, il y a Mi Corazon. Deux fabricants montréalais de barres granola, uKa et Näak, commencent à être référencés en épicerie.

Lire sur le sujet:  L’excellent mémoire de maîtrise de Médhavi Dussault.

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