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Football féminin : une équipe sans ligue

La gérante du Blitz de Montréal, Manon Migner. Derrière-elle, la défensive révise ses différentes couvertures Photo: Félix Lacerte-Gauthier

De loin, le Blitz peut ressembler à n’importe quelle autre équipe de football. Un élément le distingue cependant : il s’agit de la seule équipe féminine au Québec. Son avenir est toutefois incertain, alors qu’elle n’a plus de ligue dans laquelle évoluer.

Sur le terrain du Collège André-Grasset, où se tient la pratique de son équipe, Manon Migner, la gérante du Blitz, garde encore espoir malgré les difficultés qui accablent son organisation. Dernière tuile qui vient de lui tomber sur la tête : la partie hors-concours qu’elle avait prévue samedi sera annulée. Le Misfits de Mississauga, une équipe nouvellement formée, n’a plus assez de joueuses pour terminer sa saison. « Nous sommes dans une année de transition et de survie, résume M, Migner. Il faudra prendre une décision d’équipe pour la suite des choses. »

Fondé en 2002, le Blitz a évolué, jusqu’en 2016, dans la maintenant inactive Independent Women’s Football League. En 2017, à l’instar de nombreuses autres équipes féminines, le Blitz a migré vers la Women’s Football Alliance (WFA). Après une saison toutefois, l’organisation montréalaise a dû trouver une autre solution.

« En raison de multiples problématiques aux douanes pour nos équipes se rendant au Canada, en plus des frais de passeport élevé, nous leur avions demandé qu’elles jouent leurs parties à domicile au sud de la frontière, explique la commissaire de la WFA, Lisa King. Elles ne voulaient pas le faire, ce que je comprends très bien. »

L’année dernière, afin de garder l’équipe active, Mme Migner avait organisé plusieurs parties contre des équipes de la Maritime Women’s Football League (MWFL), situé sur la côte atlantique canadienne. Cette année toutefois, l’option n’était plus sur la table alors que l’horaire de la ligue était accaparé par l’intégration d’une nouvelle équipe en son sein.

En désespoir de cause, Mme Migner a prévu pour cette année cinq parties hors-concours, contre deux équipes de la région de Toronto, ainsi que contre les Valkyries de Saskatoon.

L’enjeu est de taille : Équipe Canada sélectionnera l’an prochain les joueuses qui participeront à la Coupe du monde féminine de football américain, qui se tiendra en 2021 en Finlande. Il est donc impératif pour elle que les joueuses restent actives afin de se faire voir des dépisteurs.

Un domaine en manque de visibilité
Pourtant, malgré ses succès, le Blitz reste, somme tout, méconnu. « Je dirais qu’il n’y a pas tant de préjugés envers le football féminin, que la discipline reste peu connue, pense Mme Migner. Lorsque des spectateurs nous voient jouer pour la première fois, ils sont souvent emballés par notre niveau de jeu et par le spectacle qu’on donne. »

À cet égard, elle croit qu’une certaine ouverture commence à se manifester, alors que Football Canada commence à faire la promotion du football féminin et qu’en mai, la LCF a intégré, pour la première fois, deux femmes dans son personnel d’arbitres.

Habitant toutes deux Anjou, Lan Anh Phan et Joanie Duchesneau jouent sur l’unité defensive, respectivement à la position de maraudeur et sur la ligne.

Actuellement, le Blitz est composée de 40 joueuses, toutes d’âge adulte. Certaines sont encore aux études, alors que d’autres doivent composer avec les aléas de leur profession.

C’est le cas de Lan Anh Phan qui, après avoir complété deux baccalauréats et une maîtrise en psychologie du sport, est devenue consultante en préparation mentale. Elle entame sa sixième saison avec l’équipe, où elle évolue à la position de maraudeur. « C’est beaucoup d’engagements, tant en temps qu’en argent, souligne-t-elle. Il faut être organisé et il y a des sacrifices à faire, mais ça en vaut la peine. »

Les coûts d’une saison s’élèvent à près de 1 200 $ par joueuse, et incluent les frais opérationnels, de transport, ainsi que de logement, pour certaines parties à l’étranger. Diverses activités de levés de fonds permettent de faire baisser la facture à environ 800 $.

Diplômée de l’École nationale de police du Québec, à Nicolet, et en cours de processus pour intégrer les rangs du SPVM, Joanie Duchesneau, une résidente d’Anjou, joue depuis maintenant quatre ans pour le Blitz, sur la ligne défensive. « J’ai joué au hockey jusqu’à 20 ans. Le football m’avait toujours intéressé, mais je n’avais pas d’équipe dans laquelle jouer, révèle-t-elle. Lorsque j’ai entendu parler du Blitz, j’ai voulu m’essayer. Ça me permet aussi de rester dans un milieu compétitif. »

Des pistes de solutions
« L’an prochain, on aura une saison régulière, assure Mme Migner. Je ne sais pas encore où, mais c’est une certitude. » Les options : intégrer la MWFL ou retourner dans la WFA, quitte à ce que toutes les parties à domicile soient jouées à Plattsburgh.

Pour les deux joueuses, ce dernier scénario serait préférable, alors que le niveau de compétition est plus relevé dans la ligue états-unienne. De son côté, Mme King assure que le Blitz serait accueilli à bras ouverts.

Néanmoins, certains obstacles persistent. « On perdrait tous nos matchs à domicile, et les revenus qui viennent avec, alors qu’on pouvait avoir 200 partisans à nos matchs, explique Mme Mignier. Ça signifierait aussi que d’avril à juin, nous n’aurions plus une seule fin de semaine à Montréal. Ce serait exigeant et je me demande si ça resterait réaliste à long terme. » Elle souligne que les deux scénarios seront longuement étudiés et soupesés, avant que l’organisation ne prenne une « décision d’équipe ».

D’ici là, le Blitz devrait disputer une partie le 16 juin prochain au Centre Claude-Robillard contre le Misfits de Toronto (au moment de mettre sous presse, le tout restait à confirmer). Par la suite, l’équipe montréalaise terminera son année le 6 juillet à Saskatoon.

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