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Suspension de la Loi 21: les demandeurs portent la cause en appel

Photo: Zacharie Goudreault/ Métro
Zacharie Goudreault - Métro

Deux organismes de défense des droits civils ont déposé, mardi, une demande d’autorisation d’appel de la décision du juge Michel Yergeau, de la Cour supérieure du Québec. Celui-ci a rejeté la demande de suspension de la Loi sur la laïcité de l’État, jeudi dernier.

Le Conseil national des musulmans du Canada (CNMC) et l’Association canadienne des libertés civiles (ACLC) estiment que le jugement contient un certain nombre d’erreurs de droit importantes, ce qui motive leur demande à la Cour d’appel du Québec.

Mustafa Farooq, directeur exécutif du CNMC, estime que la décision du juge Yergeau permet à une loi discriminatoire de continuer à s’appliquer, tout en causant un préjudice réel aux personnes qui souhaitent simplement se rendre au travail dans leur métier et leur profession.

«Nous croyons que la loi 21 apporte un préjudice immédiat aux personnes musulmanes et à l’ensemble de la population.» -Mustafa Farooq, directeur exécutif du Conseil national des musulmans du Canada

Dans sa décision d’une trentaine de pages, le juge Yergeau affirme notamment que les deux organisations n’ont pas réussi à prouver qu’une suspension de la Loi sur la laïcité de l’État servirait l’intérêt commun. Le juge a donc tranché que la loi continuerait de s’appliquer jusqu’à ce qu’un tribunal se prononce sur le fond de l’affaire.

En se rendant devant la Cour d’appel, les deux organisations espèrent donc réussir cette fois à obtenir la suspension de l’application de cette loi.

«Je suis confiante dans nos arguments», a fait valoir à Métro la directrice du programme de l’égalité de l’Association canadienne des libertés civiles, Noa Mendelsohn Aviv, qui n’a pas hésité à qualifier cette pièce législative d’«inconstitutionnelle». 

Une «phobie» injustifiée
La loi 21, adoptée le mois dernier à l’Assemblée nationale, interdit aux employés de l’État en position d’autorité coercitive de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions. Cette interdiction s’étend entre autres aux enseignants du réseau public de même qu’aux juges et aux procureurs. Elle ne s’applique toutefois pas aux employés qui étaient déjà en poste avant la mise en place de cette loi.

«Je veux travailler au Québec, mais je sais que, maintenant, je ne peux pas», a déploré en entrevue à Métro Amrit Kaur, vice-présidente de l’Organisation mondiale des sikhs du Canada. Mme Kaur, qui a grandi à Vaudreuil-Soulanges, a terminé ses études en éducation en juin dernier à l’Université d’Ottawa. Elle rêve maintenant d’enseigner en Montérégie. 

«Je veux être sur la liste occasionnelle de professeurs pour enseigner au Québec», a renchéri Mme Kaur, rencontrée devant la porte d’entrée de la Cour d’appel du Québec, dans le Vieux-Montréal. La jeune femme de 28 ans se dit d’ailleurs «vraiment optimiste» que cette démarche judiciaire entraînera des modifications à la Loi sur la laïcité, voire carrément «son retrait».

«Il y a encore d’autres points [de la Loi] qui peuvent être explorés parce qu’ils sont inapplicables et ont été mal pensés», a affirmé celle qui appuie ce processus judiciaire.

«Il n’y a pas lieu d’avoir cette phobie des signes religieux.» -Amrit Kaur, vice-présidente de l’Organisation mondiale des sikhs du Canada

Mme Kaur, qui a entre autres reçu des offres pour aller enseigner en Colombie-Britannique, éprouve par ailleurs «une grande peur» à l’idée que d’autres provinces canadiennes décident de s’inspirer de Québec en mettant en place une loi semblable.

«Les gens vont continuer d’avoir à choisir entre leur religion et leur carrière», a ajouté Mme Kaur, qui craint en outre que la Loi sur la laïcité de l’État, qui ne s’applique actuellement qu’au secteur public, ait un «effet d’entraînement» dans le secteur privé.

Le cabinet du ministre de l’Immigration du Québec, Simon Jolin-Barrette, a refusé de commenter «étant donné les procédures judiciaires».

Avec La Presse canadienne

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