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Coronavirus: la tolérance des camps de fortune d’itinérants est terminée

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Une voiture de police du SPVM au centre-ville de Montréal. Photo: Josie Desmarais | Métro

Alors que la crise du coronavirus montre des signes d’essoufflement dans la métropole, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a procédé dans les derniers jours au démantèlement de plusieurs camps de fortune érigés par des personnes en situation d’itinérance dans différents arrondissements.

L’installation de tentes est interdite dans plusieurs parcs de la métropole en vertu d’un règlement municipal. Le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal a toutefois recommandé, au début du mois de mai, de tolérer certains «sites d’hébergements extérieurs temporaires».

«Pour une partie de la population de personnes en situation d’itinérance, leur mise en place peut être une option sécuritaire et préférable à un refuge, un hôtel ou autre type d’hébergement temporaire», constate le CIUSSS dans une lettre dont Métro a obtenu copie. On y souligne toutefois que ces sites doivent respecter certaines mesures, notamment assurer le respect de la distanciation physique et l’accès à des installations sanitaires. 

Ainsi, dans les dernières semaines, le SPVM a toléré plusieurs camps de fortune à cause du contexte du coronavirus, sous certaines conditions. Les personnes en situation d’itinérance devaient notamment démanteler leurs installations à 8h le matin. Le 1er juin, toutefois, le SPVM a commencé à démanteler plusieurs de ces campements, qui avaient notamment pris forme autour du square Cabot, du parc Émilie-Gamelin et du parc Morgan, dans le quartier Hochelaga. 

«Dans le contexte de la pandémie, on pensait qu’on allait avoir plus de flexibilité, mais ça n’a pas été le cas», soupire à Métro le travailleur de soutien aux organismes au RÉSEAU de la communauté Autochtone à Montréal, Alexandre Huard. 

Décision critiquée

Ces démantèlements ont d’ailleurs soulevé l’ire de plusieurs organismes contactés par Métro jeudi.

«Pour nous, ce n’est absolument pas justifié», déplore la coordonnatrice de la Table des organismes communautaires montréalais de lutte contre le sida (TOMS), Marjolaine Pruvost. Selon elle, les camps de fortune «représentent un gage de sécurité pour plusieurs personnes».

Dans les dernières semaines, la Ville de Montréal et le réseau de la santé publique ont ouvert quelque 700 lits dans plusieurs ressources d’hébergement temporaires qui ont vu le jour temporairement dans plusieurs centres sportifs et hôtels de la métropole. Une unité d’isolement pour les itinérants atteints du coronavirus a aussi pris forme dans une aile de l’ancien hôpital Royal-Victoria.

Ces mesures, qui visent à compenser la fermeture temporaire de nombreux lits dans les refuges réguliers en raison de la pandémie, ne répondent toutefois pas aux besoins de tous les sans-abri.

«Les personnes qui ne fréquentent pas les refuges, ce sont souvent les personnes les plus marginalisées, dont celles qui consomment des drogues», explique l’organisatrice communautaire au Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), Nadia Lemieux. 

Une intervenante oeuvrant auprès de femmes autochtones en situation d’itinérance a d’ailleurs déploré à Métro des cas d’agressivité de la part de policiers qui ont démantelé certains de ces campements dans les derniers jours.

«Les mesures répressives, dans ce contexte, ne répondent pas à un objectif de santé publique.» –Marjolaine Pruvost, coordonnatrice à la TOMS 

L’agent de liaison autochtone au SPVM, Carlo De Angelis, affirme toutefois que ces démantèlements se sont déroulés dans le calme.

«Ça a très bien été. Les gens sont sortis des campements par eux-mêmes, de façon pacifique», a-t-il déclaré à Métro jeudi soir.

Déconfinement en itinérance

Le déconfinement de la métropole soulève aussi des inquiétudes alors qu’un plan de transition de 6 à 12 mois pour les personnes en situation d’itinérance est en cours de rédaction. Déjà, la Grande Bibliothèque a fermé sa «halte répit», qui a accueilli environ 200 personnes différentes du 12 avril au 31 mai.

Le réseau de la santé et la Ville n’ont toutefois pas encore tranché concernant la date à laquelle devra avoir lieu le transfert des ressources d’hébergement en place temporairement dans des hôtels et des arénas vers d’autres établissements.

«L’évolution de l’épidémie demande à Montréal et à ses partenaires d’ajuster régulièrement les scénarios prévisionnels, car les suites sont difficile à prévoir très à l’avance», indique la Ville dans un courriel à Métro.

Au RAPSIM, on soulève que les impacts de la crise sanitaire sur les refuges pour sans-abri pourraient se faire sentir encore longtemps.

«On essaie de faire valoir que ces mesures-là sont nécessaires. On ne peut pas fermer tous les lits supplémentaires et s’attendre à ce que les organismes communautaires compensent. Il n’y aura pas de place dans les lieux d’hébergement [réguliers]», prévient Nadia Lemieux.

Jusqu’à maintenant, 21 personnes en situation d’itinérance ont reçu un diagnostic positif au coronavirus à Montréal sur les 635 qui ont effectué un test de dépistage.

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