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Le carfentanil inquiète la santé publique à Montréal

Sacs de narcotics saisis par le SPVM contenant du fentanil ou du carfentanil
Fin avril, le SPVM a saisi des sacs de ce qu'il croyait être du fentanil. Selon la santé publique, une partie de la saisie serait plutôt du carfentanil. Photo: Courtoisie - SPVM

Le carfentanil inquiète les autorités de la santé de Montréal. La direction régionale de la santé publique (DRSP) a alerté vendredi organismes et professionnels en dépendance quant à la présence de cet opioïde synthétique dans la métropole. La santé publique enquête aussi sur la présence potentielle d’opioïdes dans des drogues de type stimulant comme le crack.

Dans une missive envoyée le 14 mai, la DRSP dit s’inquiéter de la présence de carfentanil à Montréal, une situation «qui est une première pour nous», selon la Dre Carole Morissette, chef médicale à la DRSP de Montréal, au Centre intégré universitaire de santé et services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.

La présence du carfentanil n’avait jusqu’ici jamais été documentée à Montréal, selon le CIUSSS.

«C’est une situation vraiment préoccupante par le fait que le carfentanil est un analogue du fentanil qui est 100 fois plus puissant que le fentanil. Ça peut créer une hausse au niveau des surdoses sévères au niveau des décès», précise Dre Morissette.

Deux cas ont été signalés au CIUSSS du Centre-Sud de personnes admises à l’urgence, chez qui des analyses toxicologiques auraient permis de détecter la présence de carfentanil.

L’opioïde de synthèse est associé à des risques élevés de décès par arrêt respiratoire surtout chez des consommateurs qui pourraient y être exposés à leur insu, explique la DRSP.

Pour renverser les effets d’une surdose au carfentanil, un plus grand nombre de doses de naloxone pourrait être nécessaire. Une prise en charge en milieu hospitalier pour administration sous supervision médicale de naloxone ou gestion des voies respiratoires pourrait être requise.

En plus de recommander de ne pas consommer seul, la DRSP de Montréal invite les consommateurs de drogues de rue à être prudents et encourage cliniciens et intervenants à rehausser les interventions de prévention des décès auprès de ceux-ci.

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) aurait récemment saisi 2,2 kg de ce qu’on croyait être du fentanil. Mais des analyses effectuées par Santé Canada auraient établi qu’il y avait une très grande quantité de carfentanil dans cette saisie, selon Dre Morissette. Ce serait là un phénomène très inhabituel pour Montréal.

Ne pas «diaboliser» le carfentanil

Jean-François Mary, le directeur général de Cactus, organisme communautaire de prévention des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS), qui œuvre également pour la réduction des méfaits, soutient qu’il ne faut pas «diaboliser» le carfentanil.

«C’est disponible depuis assez longtemps. Autant aux États-Unis qu’ailleurs au Canada. En fait, les « batchs » de carfentanil bien préparées, bien diluées, seraient un peu moins dangereuses, en fait, que le fentanil. L’index thérapeutique du carfentanil est beaucoup plus large que celui du fentanil», explique-t-il.

L’index thérapeutique est, pour une substance, le rapport entre la dose dite «efficace» et la dose qui entraînerait la mort chez 50% des individus.

En somme, plus l’index thérapeutique d’une substance est faible, moins il y a de différence entre la dose susceptible d’obtenir un effet thérapeutique et celle susceptible d’entraîner la mort. Et donc plus cette substance est dangereuse.

Nouvelle enquête

Parallèlement, la santé publique s’apprêterait à envoyer un appel à la vigilance aux chefs des départements des urgences des hôpitaux montréalais. Des signalements d’effets inhabituels ressentis à la suite de consommation de crack ou de cristal inhalé ont été reçus, notamment en provenance de personnes présentant des symptômes compatibles avec une surdose d’opioïdes.

Une enquête a été lancée à l’aide de différents moyens, dont des analyses toxicologiques faites auprès de personnes décédées ainsi que l’analyse des signalements effectués par Urgences-santé.

«On va demander aux médecins des urgences de nous signaler ces situations-là et de faire un prélèvement d’urine pour envoi au Centre de toxicologie du Québec pour qu’on soit capable de faire le lien entre ces tableaux d’effets inhabituels et la présence d’opioïde ou d’autres substances et avoir accès à des résultats toxicologiques complets», précise Dre Morissette.

Les drogues dites stimulantes, comme le crack et le cristal inhalé, ont des effets qui diffèrent normalement de ceux ressentis à la suite de consommation d’opioïdes.

La DRSP s’inquiète des effets inattendus que pourraient ressentir les individus qui en viendraient à consommer des opioïdes de façon inattendue.

«Le consommateur pourrait par exemple être une personne naïve pour ce qui est des opioïdes et qui n’aurait pas de tolérance pour ce type de drogue. La personne serait donc vraiment à risque de faire un arrêt respiratoire et d’en décéder», soutient-elle.

L’appel à la vigilance devrait être envoyé aux chefs des départements des urgences au cours des prochaines heures ou des prochains jours.

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