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Dure, dure la vie d'arbre de rue

Mardi après-midi ensoleillé mais froid. On s’affaire à couper les branches des érables argentés. Les arbres, droits comme des piquets, sont plantés en rangs. Ils se retrouveront dans quelques années sur les trottoirs de Montréal.

Pourtant, nous sommes à plus de 45 minutes à l’est du centre-ville, à L’Assomption. C’est là que se trouve la pépinière municipale de Montréal, qui fournit la moitié des arbres plantés dans les arrondissements.

Ces érables argentés qu’on traite aux petits soins grandissent à la pépinière depuis six ans. Ils devront passer encore quatre ans ici avant de remplir leur mission d’arbres de ville. «Nous produisons des arbres acclimatés à nos conditions plutôt que d’acheter des arbres du sud de l’Ontario», note Michel Désilets, contremaître à la pépinière.

Chaque année, on plante 10 000 semis – les semences sont récoltées sur des arbres de rue à Montréal –, et 8 000 greffes sont effectuées. Puisqu’un tri est fait à chaque étape de la croissance, il faudra 5 000 semis pour obtenir 1 000 arbres.

«On garantit au moins 3 000 arbres par année sans que les arrondissements ne dépensent un sou», explique M. Désilets. Pour le moment, la pépinière dessert 10 des 19 arrondissements montréalais, mais la Ville souhaite que ce chiffre augmente. «Il y a plus de demande que d’offre», indique Daniel Desjardins, chef de la division de l’arboriculture à la Ville. Chaque année, on plante en moyenne 7 000 arbres à Montréal.

Plus loin dans la pépinière de 75 hectares (36 hectares de culture), on a recréé les conditions des trottoirs de ville dans le cadre d’un projet pour tester un sol à granulométrie discontinue, un mélange de terre et de pierres qui permet au système racinaire de mieux «respirer».

Cette expérience fait partie du programme de recherche en arboriculture de Montréal, qui existe depuis 1997. «On se concentre surtout sur les arbres de rue», explique Pierre Jutras, agronome chercheur.

Le centre-ville demeure le secteur le plus critique pour un arbre : canyons urbains créés par les immeubles, sol imperméable, fosses de plantations étroites, sels d’hiver, dommages dus au déneigement et aux vélos. De plus, avec la ville souterraine, il n’y a aucun sol sous les trottoirs. «On tend à élargir les fossés, on a changé nos pratiques d’épandage de sel, indique Alan De Sousa. Il ne suffit pas de planter des arbres. Le suivi et l’entretien sont très importants.»

D’ailleurs, un volet majeur du programme de recherche est de faire l’inventaire géomatique complet de la forêt urbaine. «À Montréal, nous avons 4 500 km de rues à couvrir, relate Pierre Jutras, agronome chercheur. Faire l’inventaire depuis les airs [avec un programme au pixel] faciliterait le travail de terrain.»

«On n’aurait qu’à peser sur un bouton pour avoir des informations sur chaque arbre», explique Daniel Desjardins.

Des êtres fragiles
«On dit fort comme un chêne, mais ce n’est pas toujours le cas, note Suzanne Hardy, auteure et l’une des plus grandes spécialistes du patrimoine arboricole au Québec à qui on a confié l’inven­taire des arbres remarquables de l’arrondissement historique du mont Royal. Certaines espèces sont menacées.»

Mme Hardy cite en exemple les ormes d’Amérique vieux de 140 à 200 ans sur la Grande-Allée à Québec. Lors de travaux, on a fait passer des fils électri­ques sous les racines plutôt que de les installer de l’autre côté de la rue ou de les faire passer en zigzag, tel que conseillé. Résultat : un arbre a été abattu, victime de la maladie hollandaise.

Pour Christian Messier, deux des plus importants problèmes sont les vélos qu’on accroche aux arbres et les déneigeuses. Dans les deux cas, on abîme le cambium, la partie vivante de l’arbre, et on fait vivre un stress à l’arbre qui peut lui être fatal.

L’arbre de rue

Pour être un arbre de rue, les candidats…

  • ont au moins de 40 à 50 mm de diamètre;
  • ont un tronc dégagé sur au moins 2 m pour libérer la voie pour les piétons, les autobus et les déneigeuses;
  • n’ont pas trop de branches (de 5 à 8 bien structurées);
  • ont un système racinaire très compact;
  • sont capables de résister au climat montréalais;
  • ont une structure droite et solide.


Une visite de la pépinière
L’Après-midi porte conseil
Lundi à 13h
Première chaîne de la radio de Radio-Canada

À lire aussi: La forêt urbaine, un actif  de 1 G$ à protéger

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