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Une famille rom menacée d’être déportée interpelle le gouvernement

Photo: Josie Desmarais/Métro

Une famille rom montréalaise menacée d’être déportée ce jeudi demande au gouvernement Trudeau d’infirmer une décision de l’ancien gouvernement de crainte d’être victime de persécution en Hongrie.

«Je ne veux pas retourner en Hongrie, j’aimerais terminer mon secondaire ici, aller au cégep, puis à l’université. Je veux avoir un bon emploi et avoir une vie normale», a lancé Gilda Lakatos, jeune Rom de 17 ans, mardi en conférence de presse.

La famille Lakatos, des Roms venus de Hongrie, est arrivée en 2011 au Canada. Leur statut de réfugié a été refusé en avril 2015. Sans papier, le père et le fils sont retournés en Hongrie en mars 2016. Gilda et sa mère Katalin ont reçu un avis de déportation fixé au 12 mai 2016, soit ce jeudi.

L’organisme Solidarité sans frontières fait valoir que les Roms sont victimes d’un racisme notable en Hongrie et la mère et la fille Lakatos risquent de le subir à nouveau si elles retournent dans leur pays d’origine.

Le frère aîné de Gilda s’est d’ailleurs suicidé en 2004 suite aux menaces racistes de la police hongroise, explique la famille.

«Mon frère et mon père [qui sont retournés en Hongrie] ne peuvent pas avoir d’emploi, on le leur refuse parce qu’ils sont Roms. Ils ne peuvent pas avoir de logement. Si mon frère veut aller dans un bar, on lui interdit sous prétexte qu’ils refusent les Roms», explique Gilda.

Elle se rappelle que lorsqu’elle était à l’école en Hongrie, elle devait être dans une classe attribuée spécifiquement aux Roms et «le professeur ne répondait pas à nos questions», a-t-elle dit dans un français bien maîtrisé.

Bien que la Hongrie soit considérée comme un pays «sûr», selon le Canada, il ne l’est pas pour la communauté rom de ce pays victime de racisme, souligne Solidarité sans frontières.

L’organisme fait référence également à une étude réalisée en 2015 par la Osgoode Hall Law School de l’Université York et la Western University dans laquelle les chercheurs ont étudié les décisions de plus de 10 000 familles roms demandant le statut de réfugié au Canada. L’étude a conclu que sous le gouvernement de Stephen Harper, les demandes étaient traitées avec des «stéréotypes racistes» contre la population rom et remettait en question la crédibilité de leur dossier.

Solidarité sans frontière ajoute que 18% des demandes de statut de réfugié sont acceptés au Canada contre 47% dans les pays européens.

«Le gouvernement Trudeau a tellement une attitude positive envers les réfugiés, c’est une occasion de montrer qu’il y a une réelle rupture avec le racisme de l’ère Harper en infirmant la décision de l’ancien gouvernement», a affirmé Mary Foster de Solidarité sans frontières.

La famille a déposé une demande de résidence permanente pour circonstance d’ordre humanitaire il y a huit mois. «La réponse devrait arriver très bientôt et ils ont de bonnes chances qu’elle soit acceptée, surtout considérant que Gilda parle français et qu’elle va à l’école», souligne Mme Foster qui ajoute que la demande pourrait être refusée s’ils retournent en Hongrie.

Métro a demandé au gouvernement fédéral s’il était en mesure d’infirmer la décision de l’ancien gouvernement. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a répondu que «compte tenu de la législation sur la protection de la vie privée [ils] ne [peuvent] pas offrir de commentaires sur des cas précis».

L’avis d’un expert

Rejoint par téléphone, Kyle Matthews, directeur adjoint à l’Institut montréalais d’études sur le génocide et les droits de la personne (MIGS), comparait la situation des Roms en Hongrie à celle des Premières Nations au Québec. «Les deux situations sont comparables puisque dans les deux cas, un groupe tente d’assimiler l’autre communauté de façon contraignante», explique-t-il. Celui qui a aussi occupé le poste de membre du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, affirme qu’il y a effectivement une discrimination importante envers ce peuple, surtout provenant des groupes extrémistes de droite. Toutefois, il n’a pas tenu à s’avancer sur la question à savoir si ce type de discrimination correspondait à un danger pour leur vie ou si au contraire les Roms cherchaient simplement une meilleure vie sociale ou financière.

Avec la collaboration de Steve Lebel

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