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Cri d’alarme d’un organisme de soutien aux victimes d’agressions sexuelles

Photo: Chantal Lévesque/Métro

Les victimes d’agression sexuelle doivent attendre jusqu’à huit mois pour obtenir un soutien psychologique auprès de l’organisme La Traversée, a dénoncé jeudi son directeur général, Pierre Ménard. Ce dernier juge la situation «intenable».

«Nous ne sommes clairement pas en mesure de répondre à la demande», a affirmé celui qui dirige l’organisme lambertois depuis cinq ans. Il a mentionné qu’environ une centaine de femmes et une trentaine d’enfants et d’adolescents obtiennent à chaque année de l’aide psychologique auprès des six thérapeutes de La Traversée. Presque qu’autant sont en attente d’un traitement. «À l’heure actuelle, nous avons près de 50 dossiers de femmes en attente et près de 30 dossiers d’enfants et d’adolescents», a dit M. Ménard.

La Traversée veut augmenter ses revenus de 500 000$ au cours des trois prochaines années afin d’embaucher davantage de thérapeutes et de réduire du même coup les délais d’attente. Elle aimerait que les femmes ne patientent pas plus de quatre mois avant d’entamer une thérapie et que les enfants et les adolescents puissent rencontrer un psychologue en l’espace d’un mois.

«Il y a des cas d’adulte où on peut penser que c’est plus tolérable [d’attendre] alors qu’un enfant, il faut absolument travailler sur le dossier le plus rapidement possible, a mentionné le directeur général de la Traversée. C’est une personne en plein développement.»

Marie Karina Dimitri est une femme qui a dû obtenir rapidement l’aide de la Traversée. Elle a été agressée sexuellement par un homme «en qui [elle] avait entièrement confiance» pendant son enfance. Après avoir fait des tentatives de suicide et reçu un diagnostic de stress post-traumatique, elle a pu entamer une thérapie avec un psychologue de la Traversée. «C’est la première fois qu’on m’a crue et qu’on a validé ma souffrance, a-t-elle dit, en insistant sur la nécessité de fournir des services spécialisés aux victimes d’agressions sexuelles. «C’est vrai que c’est difficile, que c’est long et que c’est pénible, mais c’est vraiment moins pire que les 40 ans de calvaire que je venais de passer», a confié, avec un trémolo dans la voix, Mme Dimitri.

«Quand il y a une agression sexuelle, ça devient l’histoire d’un vie», a déclaré pour sa part la porte-parole de la Traversée, Marie-Claude Barrette, pour expliquer l’impact de ces sévices sur les victimes.

L’aide de l’entreprise privée est ainsi sollicitée par l’organisme la Traversée, mais aussi celle du gouvernement du Québec, qui a promis des fonds supplémentaires pour l’aide aux victimes d’agressions sexuelles dans sa Stratégie pour prévenir et contrer les violences et l’exploitation sexuelles dévoilée en octobre dernier. «Nous sommes toujours en attente des retombées financières de cette stratégie», a dit Pierre Ménard. Ce dernier a indiqué que son organisme reçoit à chaque année 400 000$ du ministère de Santé et des Services sociaux, ce qui représente 60% de ses revenus. Le reste est amassé pendant des campagnes de financement ou grâce à des dons d’entreprises privées.

Le cabinet de la ministre de la Condition féminine, Lise Thériault, a fait savoir à Métro qu’il travaillait avec plusieurs autres organismes pour la mise en œuvre de la Stratégie pour prévenir et contrer les violences et l’exploitation sexuelles, mais il ne s’est pas avancé sur un délai pour ce qui est du versement des sommes qui sont prévues.

La Traversée n’est pas l’unique organisme dans cette situation. Tous les membres du Regroupement québécois des centres et de lutte contre les agressions sexuelles (RQCALACS) doivent composer avec un sous-financement et 40% d’entre eux détiennent une liste d’attente, d’après son agente de liaison, Mélanie Sarroino. «Avant c’était deux ou trois organismes [qui avaient une liste d’attente], mais maintenant, c’est dix organismes sur 26», a-t-elle fait savoir. Elle a ajouté que les membres du RQCALACS peinent à répondre aux demandes d’aide des victimes mais aussi des écoles qui réclament des activités de sensibilisation.

D’après Mme Sarroino, la médiatisation entourant le mouvement #AgressionNonDénoncée sur les réseaux sociaux, le procès de l’animateur Jian Ghomeshi, les agressions sexuelles perpétrées à l’Université Laval et l’histoire d’Alice Paquet, qui a dit avoir été agressée par le député Gerry Sklavounos, a incité plusieurs victimes à sortir de l’ombre depuis deux ans.

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