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Parité homme-femme à l’Assemblée nationale: d’ex-élues réclament une loi

Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Lasses d’attendre le grand soir, d’anciennes parlementaires ont décidé de se regrouper pour réclamer l’adoption d’une loi contraignante visant à donner enfin aux femmes la place qui leur revient à l’Assemblée nationale.

Car seule une loi peut renverser la tendance et faire en sorte que les partis politiques ne puissent plus se défiler, selon ce nouveau regroupement non partisan, formé de plusieurs anciennes députées et ministres.

Une telle loi stipulerait que tous les partis politiques doivent présenter un minimum de 40 % de candidates aux élections générales.

Question fort controversée depuis des décennies, tant dans les milieux politiques que féministes, l’idée d’imposer des quotas de candidatures féminines aux élections vient donc de franchir un pas important, avec la caution morale apportée par un grand nombre d’anciennes ministres et députées de tous les partis représentés à l’Assemblée nationale.

L’initiative a germé dans la tête de l’ex-ministre de l’Éducation péquiste Marie Malavoy, préoccupée du fait que la proportion d’élues à l’Assemblée nationale avait tendance à régresser au lieu d’augmenter.

«L’idée, c’est de reconnaître d’abord qu’on n’y arrivera pas si on ne prend pas des moyens», a soutenu Mme Malavoy à La Presse canadienne, lors d’un entretien récent.

Et dans son esprit 40 % constitue un seuil minimal.

Même s’il faut à plus long terme viser plutôt l’égalité, donc 50 % des 125 sièges, fait-elle valoir, un tel objectif ne serait pas réaliste dans les années qui viennent, compte tenu qu’une grande majorité de sièges est actuellement occupée par des hommes, dont un bon nombre tiennent à poursuivre leur carrière politique. «Pour que ça fonctionne, il faut qu’on soit réalistes», dit-elle.

Elle a donc décidé de contacter d’autres anciennes parlementaires et de créer un comité dont le but serait double: faire pression sur les partis pour qu’ils adoptent une loi imposant la parité hommes-femmes et, en parallèle, cibler et recruter des femmes qui pourraient être intéressées par l’aventure politique.

L’idée a fait boule de neige.

Avec une autre ex-ministre péquiste, Rita Dionne-Marsolais, Mme Malavoy a créé officiellement son comité en mai dernier.

Rapidement, plusieurs autres «ex» sont montées dans le train de la parité: l’ex-ministre libérale Carole Théberge, l’ex-députée libérale Christiane Pelchat, l’ex-ministre péquiste Louise Harel et l’ex-députée caquiste Hélène Danault.

Elles ont d’abord constitué un répertoire des 84 anciennes parlementaires de l’Assemblée nationale, en vue de les contacter pour connaître leur intérêt envers le projet. Une trentaine ont déjà adhéré au groupe.

Le comité aimerait devenir une sorte de mentor d’éventuelles candidates, les accompagner dans leur démarche et leur offrir de la formation, au besoin.

Au cours des derniers mois, des liens ont été tissés avec d’autres groupes partageant les mêmes objectifs, dont le Groupe Femmes, politique et démocratie, le Conseil du statut de la femme et le Cercle des femmes parlementaires.

Le prochain rendez-vous électoral aura lieu dans un an et demi, autant dire que le temps presse pour les formations politiques de mettre en branle la machine, indique la présidente du comité, Mme Malavoy, qui a quitté la politique en 2014.

«Il ne faut pas juste dire la veille de l’élection: ‘j’ai essayé, j’en ai pas trouvé’», plaide l’ex-parlementaire.

«Si on souhaite vraiment avoir des femmes, il faut travailler en amont. Il faut d’abord repérer des femmes, il faut les accompagner», dit-elle, «sinon les places seront prises par les hommes».

Pour y arriver, «il doit y avoir une impulsion des chefs de parti. C’est sûr qu’il faut qu’ils soient dans le coup» et il faut aussi que les différentes instances au sein des partis, de la base au sommet, «soient dans le coup».

Lors de la dernière élection générale, en avril 2014, 34 femmes ont été élues à l’Assemblée nationale. La proportion d’élues est passée de 32,8 % en 2012 à 27,2 % en 2014.

Le nombre de candidates doit être plus important, mais il lui apparaît aussi «capital» de convaincre les partis de présenter des femmes dans des circonscriptions gagnantes.

Les années passent et on aimerait croire que tout est acquis pour les femmes en politique, mais c’est loin d’être le cas, selon elle. Le «moule politique est masculin», très traditionnel dans ses valeurs, sa culture, ses règles du jeu, un monde conçu sur mesure pour attirer des hommes.

Souvent, encore aujourd’hui, les femmes s’identifient mal au jeu politique, elles «commencent par penser que ce n’est pas pour elles», déplore Mme Malavoy.

Au lieu de pénaliser les partis qui ne se conformeraient pas à une éventuelle loi sur la parité, Mme Malavoy propose plutôt de récompenser les meilleurs élèves, en leur accordant une sorte de «bonus» financier s’ils présentent un nombre suffisant de candidates.

Aux yeux des anciennes parlementaires, la création de ce groupe est «une façon de passer le flambeau» aux suivantes.

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