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Inconduite sexuelle: un député libéral quitte le caucus

Jocelyne Richer, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — Le député d’Argenteuil, Yves St-Denis, se voit forcé de quitter le caucus libéral, à la suite de révélations d’inconduite sexuelle et d’allégations de harcèlement psychologique.

La présidente du caucus libéral, Filomena Rotiroti, a confirmé mardi matin que M. St-Denis allait désormais siéger à titre de député indépendant.

On l’avait informé en haut lieu mardi matin que s’il ne quittait pas de lui-même le caucus il en aurait été expulsé, à l’occasion de la rencontre quotidienne des députés libéraux prévue le jour même.

Il s’agit du troisième député à être chassé du caucus libéral en marge d’allégations d’inconduite sexuelle, après Gerry Sklavounos, en 2016, et Pierre Paradis, en 2017. Les deux siègent toujours comme indépendants, même si aucune accusation n’a été retenue contre eux.

Deux enquêtes visent M. St-Denis.

À la suite d’une plainte déposée par une employée du Parti libéral du Québec (PLQ) de la région des Laurentides, M. St-Denis a admis avoir expédié à cette dame une photo montrant un homme en position assise, alors qu’une femme à genoux lui faisait une fellation.

En entrevue au réseau Cogeco, M. St-Denis a assimilé la transmission de cette photo à une «blague», faite à partir d’une image captée à la télé alors qu’il visionnait un film pornographique.

«Je ne suis pas différent des autres», a-t-il affirmé pour justifier son geste, en se disant victime d’une vendetta.

L’incident est survenu en avril 2014, au moment de la campagne électorale.

La plaignante, qui souhaite conserver l’anonymat, a cependant attendu le 1er décembre 2017 pour contacter la whip en chef du gouvernement, Nicole Ménard, et l’informer des faits. Cette dernière affirme lui avoir «conseillé fortement» de déposer une plainte formelle à l’Assemblée nationale, ce qui fut fait.

À Montréal, en mêlée de presse, le premier ministre Philippe Couillard a confirmé qu’il existait une autre enquête sur M. St-Denis, éventée par le réseau Cogeco, à propos d’allégations de harcèlement psychologique et de remarques dégradantes à caractère sexuel présentées par d’autres employées du parti dans sa circonscription.

M. Couillard a dit juger la situation «regrettable». Le processus d’enquête a été mis en place au PLQ «immédiatement», dès que «les allégations ont été entendues», a assuré le premier ministre.

Sitôt connue, l’histoire a semé l’indignation, dans les couloirs du parlement, mardi.

«Quel manque de jugement! Quel mon’oncle macho!», s’est exclamée la députée caquiste Nathalie Roy, en s’interrogeant à savoir depuis combien de temps le premier ministre connaissait la situation.

Pour la députée solidaire Manon Massé, «c’est ça du harcèlement sexuel, c’est ça le maintien de la culture du viol, c’est ça qui fait qu’un moment donné les femmes mettent leur pied à terre et disent à travers « moiaussi », il faut que ça arrête».

Ce n’est pas la première fois que le comportement du député d’Argenteuil, un ancien directeur de commission scolaire, fait l’objet de plaintes.

En décembre 2016, des députés de Québec solidaire et de la Coalition avenir Québec reprochaient au député d’utiliser un langage «insultant» et «violent» à leur égard, de constamment interrompre ses collègues et de leur jeter des «regards intimidants» en Chambre, lorsqu’ils prenaient la parole. «Il a un comportement de goon», affirmait alors le député de Mercier, Amir Khadir, qui était assis non loin d’Yves St-Denis à l’Assemblée nationale.

M. Khadir et François Bonnardel, de la CAQ, avaient demandé au président de l’Assemblée nationale, Jacques Chagnon, d’intervenir pour mettre fin à ce qu’ils qualifiaient de harcèlement et d’intimidation. Le député d’Argenteuil s’était vu assigner une autre place en Chambre.

«À la base, ça reste un colon», a commenté M. Bonnardel, mardi, en apprenant les faits nouveaux visant M. St-Denis.

Dès son élection en 2014, M. St-Denis avait aussi eu des démêlés avec son ancien employeur, la Commission scolaire des Affluents, qui lui reprochait d’avoir quitté ses fonctions en emportant avec lui du matériel informatique.

Sept mois plus tard, le PLQ avait dû exiger que M. St-Denis retourne le matériel informatique, incluant deux ordinateurs, à son ancien employeur.

M. St-Denis était l’adjoint parlementaire de la ministre du Travail, Dominique Vien.

Dans ce contexte, l’avenir politique du député semble bien incertain, à quelques mois de l’échéance électorale. M. St-Denis n’a toujours pas eu son assemblée d’investiture pour la prochaine élection, prévue à l’origine le 29 avril.

Mais la situation actuelle «rend une candidature beaucoup plus difficile», a convenu le premier ministre Couillard, sans fermer la porte complètement.

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