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Avec le prêt de Québec, Simons «s’en va en guerre» contre le commerce en ligne

Photo: Capture d'écran/Google Maps
Caroline Plante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

QUÉBEC — La Maison Simons peut désormais compter sur le gouvernement et la Caisse de dépôt et placement du Québec pour l’aider à construire un nouveau centre de traitement des commandes en ligne, évalué à 215 millions $.

L’annonce du partenariat a été faite à Québec, mardi, par la vice-première ministre et ministre de l’Économie, Dominique Anglade, et le président de l’entreprise, Peter Simons.

Le gouvernement consentit ainsi un prêt à terme de 81 millions $, alors qu’Investissement Québec investit 17 millions $ à même ses fonds propres, et la Caisse de dépôt, 27 millions $.

Ces investissements permettront à l’entreprise, fondée en 1840 à Québec par John Simons, et spécialisée dans la vente de vêtements et d’articles pour la maison, d’accélérer son virage numérique dans un marché de plus en plus coupe-gorge, et de consolider 450 emplois.

Le prêt du gouvernement n’est pas une subvention, s’est bien défendu Peter Simons: «C’est un prêt que j’ai entièrement l’intention de rembourser promptement», a-t-il déclaré.

L’entrepreneur considère plutôt, au contraire, avoir «sacrifié quelque chose» en acceptant l’offre faite par le gouvernement et la Caisse de dépôt.

«Ma vie change, a-t-il confié. On a ouvert nos capitaux, (…) là, maintenant, j’ai des comptes à rendre à tout le monde», a-t-il dit, en évoquant le fait qu’Investissement Québec devient actionnaire dans son entreprise.

S’il avait voulu faire simple, il serait resté à capital fermé et aurait attendu quelques années (même si cela représente «une éternité» dans la vente en ligne) avant de lancer son nouveau centre de distribution, a-t-il ajouté. Il aurait pu aussi s’allier à des partenaires privés, plus «agressifs», selon lui.

Mais ce sont ses «valeurs» qui lui ont dicté la marche à suivre: il était essentiel pour lui de maintenir ses installations dans la Ville de Québec, là où tout a commencé pour La Maison Simons, qui est, fait à noter, la plus vieille entreprise privée du Canada.

«Je vais faire ce que j’ai à faire parce que mon père m’a appris, il y a 33 ans: ‘Décide-toi, l’entreprise existe pour la famille ou la famille existe pour l’entreprise’», a relaté Peter Simons.

«On s’en va en guerre»

Fort d’un investissement total de 125 millions $, et avec un nouveau centre de traitement qui ouvrira en 2020 et qui pourra expédier jusqu’à 40 millions d’articles par année, l’homme d’affaires d’origine irlandaise dit partir «en guerre» contre les géants du web comme Amazon, entre autres.

Il vise l’expansion de ses magasins au Canada (dont neuf sont au Québec, trois sont en Alberta, deux sont en Ontario et un est en Colombie-Britannique) en plus de vouloir prendre d’assaut le marché américain avec son offre en ligne.

«On s’en va en guerre, parce que c’est une guerre pour nous, honnêtement. (…) On va partir en guerre, on va innover comme on fait depuis 10 ans puis on va construire ça ici, à Québec», a-t-il souligné.

Une partie des sommes serviront aussi à convertir le centre de distribution actuel de Simons à Québec en centre multi-usager, «un accélérateur de commerce électronique», qui permettra à des artisans et à des petites entreprises de bénéficier de l’expertise développée par Simons au fil des ans.

Très critique des gouvernements dans le dossier de l’équité fiscale, associé dans le passé à un projet de loi de Québec solidaire, M. Simons se dit maintenant plutôt satisfait des mesures prises par Québec.

Il avait pressé le gouvernement d’agir face à la concurrence des entreprises étrangères, dont les ventes en ligne ne sont pas taxées.

Dans son budget en mars dernier, le ministre des Finances, Carlos Leitao, a dit avoir obtenu «des engagements» de l’Agence des services frontaliers du Canada pour faciliter la perception des taxes à la frontière. En principe, ce sont les douaniers canadiens qui doivent percevoir la TVQ sur les biens commandés depuis l’étranger. Toutefois, le commerce en ligne fait grimper le nombre de colis dans les centres de dédouanement et la taxe de vente n’est prélevée que sur une fraction des biens.

M. Leitao avait également déclaré que les abonnés à des services numériques comme Netflix devraient se résoudre à payer la taxe de vente du Québec (TVQ), et ce, dès l’an prochain.

«Il y a d’autres juridictions à convaincre, que ce soit les autres provinces canadiennes, le gouvernement fédéral, mais on a un rôle de leader à jouer et on va continuer de jouer ce rôle de leadership», a martelé la ministre Anglade, mardi.

En point de presse à l’Assemblée nationale, le député de Québec solidaire, Amir Khadir, a affirmé que les fonds publics investis dans Simons représentent «le prix de l’inaction de Carlos Leitao».

«S’il n’y avait pas une concurrence déloyale des plateformes de vente par internet, le contribuable n’aurait pas à faire ce genre d’aide», a-t-il déclaré.

Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, a abondé dans le même sens: «C’est devenu nécessaire par le laxisme, malheureusement, et l’inaction auxquels on a eu droit, a-t-il déclaré. Le fait de ne pas avoir taxé à ce jour pour la TVQ ou la TPS les biens qui circulent, les biens tangibles, les vêtements, les souliers, les ordinateurs, les livres, bon, tout ça, ça met Simons dans une position concurrentielle défavorable.»

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Le commerce au détail au Québec:

-500 000 emplois

-35 000 établissements

-109 milliards $ de ventes annuelles

Source: Gouvernement du Québec

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