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La crise des opioïdes est source de stigmatisation

La crise des opioïdes, particulièrement médiatisée au Québec, aurait contribué à la stigmatisation des patients utilisant ces substances pour traiter des douleurs chroniques, selon un sondage publié mercredi par le Centre de recherche du Centre hospitalier de l’université de Montréal (CRCHUM).

«Les patients ont de plus en plus de difficulté à trouver un médecin pour traiter leurs douleurs, explique la docteure Manon Choinière, qui a dirigé l’analyse. L’émission de recommandations pour diminuer les prescriptions a rendu les médecins de famille un peu plus frileux. Souvent, ça va au détriment des patients.»

Une majorité des 1400 répondants de l’étude, provenant du Québec et de la Colombie-Britannique, considèrent que la couverture de la crise des opioïdes effectuée par les médias contribue à alimenter la stigmatisation des utilisateurs.

Cette mise à l’écart est bien réelle, selon Vincent Raymond, qui utilise des opioïdes depuis 15 ans pour traiter ses douleurs au bas du dos. «Nous existons, nous souffrons de douleurs chroniques, nous pouvons être dépendants, mais les opioïdes fonctionnent», lance-t-il.

«Je me suis fait faire la morale [en raison de ma prise d’opioïdes], ajoute-t-il. C’est pire depuis deux ou trois ans à cause de la crise. Les personnes qui ne nous connaissent pas vont nous regarder de façon bizarre, comme si nous étions des criminels.»

Cette stigmatisation des patients qui prennent des opioïdes fait en sorte qu’ils développent des craintes au sujet de cette prise de médicaments. En effet, un cinquième des utilisateurs québécois croient qu’ils pourraient devenir «drogués».

Dre Choinière tient à régler le tir par rapport à la prise contrôlée d’opioïdes. «Oui, il y a un risque, mais le risque est faible, relativise-t-elle. Chez les patients qui n’ont aucun antécédent d’abus d’alcool et de drogues, on parlerait d’un risque de moins de 1%.»

C’est lorsque les patients ou les ex-patients sont forcés de se tourner vers le marché noir que le danger se présente.

Médecins sans ressources

Même chez les médecins et les pharmaciens, des préjugés peuvent être présents, croit Vincent Raymond. Ce dernier doit d’ailleurs tout le temps retourner à la même pharmacie pour éviter de se «faire voir comme un méchant».

Le sondage du CRCHUM avance tout de même que seulement 2% des patients questionnés ont vu leur demande de prescription être rejetée par une pharmacie ou ne pas être remboursée par leur compagnie d’assurance dans la dernière année.

M.Raymond, tout comme Dre Choinière, estime que la formation donnée aux médecins pour le traitement des douleurs doit être bonifiée.

«Il n’y a presque pas d’heures qui sont consacrées à l’évaluation et au traitement de la douleur, observe Dre Choinière. Les médecins de famille ne sont pas bien équipés, et, avec le mouvement actuel, ils ont encore plus peur de prescrire des opioïdes.»

«En ce moment, les médecins ont de 15 à 17 heures de formation [pour traiter la douleur]. Les vétérinaires en ont 90», fait remarquer M. Raymond, également médecin.

Le Québec se classe actuellement dernier parmi toutes les provinces canadiennes en terme de prescriptions d’opioïdes.

 

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