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Colette Roy Laroche revient sur la tragédie de Lac-Mégantic

Colette Roy-Laroche. Adrian Wyld / La Presse Canadienne Photo: Adrian Wyld / La Presse Canadienne

MONTRÉAL — «Chaque jour, le sifflement du train nous rappelle la tragédie.»

Cinq ans après la nuit où tout a basculé, Colette Roy Laroche se rappelle avec émotion ces «souvenirs à la fois tristes et réconfortants».

Des souvenirs d’une tristesse infinie dans lesquels la mort a avalé tant de vies. Des images aussi apaisantes, où la solidarité humaine est venue calmer, autant qu’elle se peut, la douleur qui semblait à ce moment insondable.

Le 6 juillet 2013 à 1 h 14, un train fantôme gorgé de pétrole dévale à toute vitesse la pente menant au centre-ville de Lac-Mégantic.

Pendant que plusieurs dorment et que d’autres sont attablés au Musi-Café, le pire se produit. Dans une succession d’explosions causées par le déraillement du train, 47 vies s’envolent et la quasi-totalité du centre-ville est détruite.

En entrevue à La Presse canadienne, celle qui était mairesse de la municipalité de Lac-Mégantic au moment du drame évoque des «sentiments partagés» lorsqu’elle se remémore la tragédie.

«Ce sont de douloureux souvenirs, quand on pense particulièrement à la première nuit, au premier jour, raconte-t-elle. (…) Mais les images qui sont pour moi les plus importantes, ce sont les images d’humanité, les images de citoyens qui se prennent en main, qui se relèvent et qui se tiennent debout.»

Rapidement, Colette Roy Laroche devient un phare pour la communauté de Lac-Mégantic. D’un sang-froid hors du commun, elle se fait surnommer la «Dame de granit».

«J’ai découvert que j’avais des forces insoupçonnées parce qu’avec le recul, quand je regarde et j’analyse ce qui s’est passé, je suis comme plusieurs personnes, je me pose souvent la question: « comment ai-je fait pour passer à travers? »», pointe-t-elle.

Ce n’est que deux ans plus tard, lorsqu’elle lève le pied et quitte la mairie de la petite municipalité estrienne, que Colette Roy Laroche se permet enfin de regarder en arrière.

«Je m’étais complètement oubliée durant cette période-là, se remémore-t-elle. Je ne me donnais pas le droit, je ne me permettais pas d’écouter ce que j’avais à vivre comme personne.»

L’atterrissage est toutefois brutal pour l’ex-mairesse, d’autant plus que son mari est décédé quelque temps avant sa retraite politique, en février 2015.

«Quand je me suis retrouvée toute seule à la maison, c’est là qu’avec le calme et le temps, j’ai vécu à retardement les peines et les souffrances que d’autres ont vécues au fur et à mesure pendant la tragédie», souligne-t-elle.

«Vous dire que la première année a été facile quand j’ai tout laissé, ce serait mentir, laisse-t-elle tomber. Tout ce que j’avais enfoui remontait à la surface.»

Et encore cinq ans plus tard, la tragédie laisse ses traces. Certaines sont plus lourdes à porter, d’autres sont porteuses d’espoir.

Colette Roy Laroche dit croire que le drame a approfondi son côté humain, faisant d’elle «une meilleure personne». «Je suis encore plus sensible aux besoins des gens, particulièrement dans des périodes de deuil et de maladie. Je porte un regard plus profond chez les personnes qui peuvent vivre des difficultés», souligne-t-elle.

Les années ont donc passé, mais l’ex-mairesse se prend encore à rêver que tout cela n’était qu’un songe. «C’est comme si ça ne se pouvait pas qu’une telle catastrophe puisse arriver, ça dépasse tout ce qu’on peut imaginer», marque-t-elle.

Mais rapidement, des images rejaillissent, lui rappelant que le pire est bel et bien arrivé. «Ce sont des images de feu, de flammes, de champignons de fumée, des bruits… Le ciel était tellement clair, il y avait tellement de lumière, on se serait cru en plein jour», se rappelle-t-elle.

Et comme pour de nombreux habitants de Lac-Mégantic, ces images reviennent avec la constance d’un métronome, à chaque sifflement du train.

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