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Les chefs croisent le fer une dernière fois

Sebastien St-Jean / La Presse Canadienne Photo: Sebastien St-Jean
Caroline Plante, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — La tension était à son comble, jeudi soir, alors que les chefs prenaient place dans les studios de TVA pour le dernier débat officiel de la campagne électorale.

Moment charnière de la course, ce débat était particulièrement important pour le chef caquiste François Legault, en dégringolade dans les sondages depuis quelques jours.

Dès le premier face-à-face, qui portait sur la santé (le salaire moyen d’un spécialiste est de 455 000 $, a rappelé l’animateur Pierre Bruneau), M. Legault a accusé le chef libéral Philippe Couillard d’être injuste envers les infirmières, qui gagnent beaucoup moins.

Il lui a également demandé pourquoi l’argent n’atteignait jamais les Centres d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD).

«C’est vous qui nous avez mis la main dans le tordeur» en acceptant le principe d’un rattrapage salarial des médecins québécois avec leurs collègues de l’Ontario, a répliqué M. Couillard, du tac au tac.

Selon M. Legault, Philippe Couillard, un neurochirurgien qui avait été présenté comme un «sauveur» à son arrivée en politique, n’a pas été à la hauteur en santé. «M. Legault, je vous retournerai la question. Donnez-moi un accomplissement.»

Le ton était donné.

Couillard sur la défensive, Lisée rappelé à l’ordre

Le thème de la famille a donné du fil à retordre au chef libéral. «L’éléphant dans la pièce», selon M. Bruneau: la déclaration de M. Couillard à une radio montréalaise, jeudi matin, à l’effet qu’il est possible pour une famille de quatre personnes de se nourrir en faisant une épicerie de 75 $ par semaine.

Les autres chefs ont sauté à pieds joints dans la mêlée, laissant entendre que M. Couillard était «déconnecté» de la réalité.

M. Couillard a expliqué qu’il était possible de le faire — il connaît des gens qui le font — mais que telle situation était «regrettable».

Il a vanté son plan de lutte contre la pauvreté, et invité M. Legault à expliquer le sien. Pour la CAQ, la lutte contre la pauvreté passe par les prématernelles quatre ans.

Malaise palpable alors que le chef péquiste Jean-François Lisée entamait le débat en dérogeant aux règles et en interrogeant la co-porte-parole de Québec solidaire, Manon Massé, au sujet du chef de QS. «Qui est le chef», a-t-il insisté, faisant fi des interventions répétées de M. Bruneau.

Il a subi d’autres rappels à l’ordre. «Vous continuez à dire ce que vous voulez», a rouspété l’animateur à l’endroit de M. Lisée, qui a éventuellement abandonné sa stratégie peu orthodoxe.

En éducation, la CAQ ferait des élèves en difficultés d’apprentissage sa priorité. Quant à Manon Massé, elle a défendu la gratuité scolaire, qui coûterait environ 2,5 milliards $, d’après elle. Réaliste? Oui, si les grandes entreprises et les banques «font leur juste part», a-t-elle maintenu.

La CAQ ne créera pas les 5000 classes de prématernelle quatre ans qu’elle promet, a prédit M. Couillard, parce qu’elle sous-estime les coûts de fonctionnement.

«Vous n’avez jamais admis avoir fait mal aux étudiants avec vos compressions», a lancé Mme Massé à Philippe Couillard durant ces échanges.

Immigration: mea culpa de Legault

Sans surprise, le thème de l’immigration a de nouveau soulevé les passions. Le débat s’est corsé entre les chefs caquiste et libéral, qui ont débattu du plan de la CAQ de réduire les seuils annuels d’immigration, et de faire passer des tests de français et valeurs aux nouveaux arrivants, une proposition qui «fait peur aux gens», selon les libéraux.

«Il n’est pas question d’expulser (des immigrants), s’est défendu M. Legault, qui dit voir une grande différence entre «ne pas accepter un immigrant» et «l’expulser». Le seul qu’on veut expulser au Québec, c’est le Parti libéral», a-t-il tonné.

Au sujet de son présumé manque de connaissances sur le fonctionnement du système d’immigration, M. Legault s’est fait repentant. «Je ne suis pas parfait, ça m’arrive de faire des erreurs», a dit celui qui avait promis de «parler avec son coeur» lors du débat.

La question de la laïcité a également fait un retour en force. «On a le droit de défendre nos valeurs», a plaidé François Legault, qui propose d’interdire le port des signes religieux chez les fonctionnaires en position d’autorité, y compris les enseignants.

Une policière qui porte le hidjab, c’est acceptable? «On ne dispose pas des minorités avec des sondages», a martelé M. Couillard, en accusant son rival caquiste de faire preuve d’un «mépris à peine voilé» pour la policière en question. «Vous donnez encore des leçons, M. Couillard», s’est plaint M. Legault.

Le chef péquiste a rappelé plusieurs fois que François Legault a déjà été indépendantiste. Ce dernier a fait valoir que le PQ n’avait pas de rapport de force avec Ottawa, étant donné le faible appui des Québécois pour cette option.

Il en a profité aussi pour fustiger les libéraux «qui ne demandent rien à Ottawa». «Quand on ne demande rien, on n’a rien», a-t-il reproché.

Le débat de jeudi s’est terminé sur les thèmes de la justice, de l’environnement et de l’économie. Les chefs se sont tour à tour prononcés sur l’importance du contenu québécois dans les différents projets, comme celui d’Apuiat, sur la Côte-Nord.

M. Couillard a accusé M. Legault de s’opposer de façon «vociférante» au développement de projets éoliens. En revanche, le chef caquiste a dit trouver inutile de bâtir de tels projets, particulièrement en situation de surplus d’hydro-électricité.

Sur la renégociation de l’ALÉNA, le premier ministre sortant a qualifié le président américain de «matamore».

M. Lisée a dit craindre pour les fermes québécoises. «On est sur le point de se faire manger tout rond», s’est-il désolé.

«Il faut tenir bon», a conclu M. Couillard.

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