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#MoiAussi a entraîné une hausse marquée des dénonciations au Québec

Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne Photo: Sean Kilpatrick
Stéphanie Marin, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Lorsque le mouvement de dénonciation #MoiAussi est devenu viral dans les médias sociaux en octobre 2017, le nombre d’agressions sexuelles signalées à la police et jugées fondées a explosé. Et c’est au Québec que l’augmentation a été la plus marquée, est-il rapporté jeudi dans le plus récent bulletin de Statistique Canada.

L’agence fédérale de statistiques a voulu évaluer le nombre d’agressions sexuelles rapportées avant et après le mouvement #MoiAussi. Les périodes évaluées pour «l’avant» sont du 1er janvier 2016 au 30 septembre 2017, et pour «l’après», du 1er octobre 2017 au 31 décembre 2017. Il ne s’agit que d’une période retenue à des fins statistiques, ce qui ne signifie pas que l’impact du mouvement a pris fin à ce moment.

Le Québec a enregistré la plus forte augmentation du nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police après le mouvement #MoiAussi, soit 61 pour cent, passant de 12,4 à 20 victimes par tranche de 100 000 habitants.

En deuxième place se trouve Terre-Neuve-et-Labrador qui a connu une hausse de 36 pour cent.

Les chiffres font état des agressions sexuelles rapportées par la police à Statistique Canada: cela veut dire que les différentes forces policières au pays ont déclaré les chiffres, basés sur les plaintes qu’elles ont reçues. La police n’a rapporté que les plaintes qu’elle a classées comme fondées. Ces données ne font donc pas état du total de plaintes d’agressions rapportées à la police. Et cela ne signifie pas non plus que des accusations criminelles ont ensuite été déposées dans tous ces cas.

De plus, «cette hausse marquée du nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police à la suite du mouvement #MoiAussi ne reflète pas nécessairement une augmentation de la prévalence des agressions sexuelles au Canada», avertit Statistique Canada.

La hausse serait plutôt attribuable à une série de facteurs: des victimes davantage disposées à signaler une agression à la police, la sensibilisation accrue à ce qui constitue une agression sexuelle et des initiatives des services de police pour encourager les victimes à dénoncer.

Pour ce qui est des provinces, «c’est au Québec — où les médias ont largement couvert le mouvement, où des personnalités publiques ont été accusées d’inconduite sexuelle et où de nombreux services de police ont mis en place des lignes d’aide spécialisées pour le signalement des agressions sexuelles — que le nombre d’agressions sexuelles signalées a le plus augmenté», relève l’agence.

Selon Marie-Christine Michaud, la porte-parole et coordonnatrice des centres d’aide aux victimes d’actes criminels, des victimes hésitent à dénoncer car elles ont peur de ne pas être crues. Ainsi, l’impact du mouvement #MoiAussi n’est pas négligeable: «Le message qui était envoyé, les gens ont senti que s’ils dénonçaient ou allaient chercher de l’aide, on allait les croire. Et je pense que ça a pu favoriser la dénonciation ou le fait d’aller chercher de l’aide».

Des chiffres qui frappent

Le nombre moyen de victimes d’agressions sexuelles déclarées par la police au pays est passé de 59 victimes par jour avant #MoiAussi à 74 après la naissance du mouvement. Bref, une hausse de 25 pour cent pour la période d’octobre à décembre 2017, comparé à une période de trois mois équivalente dans la période «avant-#MoiAussi».

Et en raison de l’augmentation survenue au cours des trois derniers mois de 2017, le nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police cette année-là était le plus élevé depuis 1998, note l’agence fédérale.

Si l’on regarde le mois d’octobre 2017, qui coïncide avec la propagation du mouvement #MoiAussi en ligne, il y a eu ce mois-là près de 30 pour cent de plus de plaintes retenues par la police que le mois précédent.

Et si certains pouvaient penser que cette hausse est due au fait que le mouvement de dénonciation a incité des victimes à rapporter des agressions ayant eu lieu il y a fort longtemps, les chiffres ne soutiennent qu’en partie une telle conclusion: trois agressions sur quatre ont été commises le mois précédant leur dénonciation, et beaucoup ont été rapportées le jour même, est-il indiqué.

Fait à noter: les hausses du nombre d’agressions sexuelles déclarées par la police ont plus souvent été observées dans les grandes villes et les régions urbaines. En tête de liste: la grande région de Québec (plus spécifiquement, la région métropolitaine de recensement, ces régions étant celles utilisées par l’agence de statistiques) a connu une hausse de 78 pour cent, suivie de près par la RMR de Sherbrooke avec 76 pour cent, puis de Brantford en Ontario.

Comme par le passé, environ neuf victimes d’agressions sexuelles sur 10 étaient de sexe féminin, tant avant qu’après le mouvement #MoiAussi.

Et le nombre de ces agressions survenues sur les terrains d’écoles — bien qu’elles soient une minorité des agressions rapportées — a connu une hausse considérable de 59 pour cent après octobre 2017.

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