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Le Pacte: convergence sur le but, division sur les moyens

Photo: Beatrice Flynn / Collaboration spéciale

Depuis son lancement, la campagne pour une transition écologique, le Pacte, signé par près de 500 célébrités et des milliers de citoyens, a fait grand bruit. Si des critiques se sont arrêtées sur le mode de vie de certains signataires célèbres du Pacte, d’autres se sont intéressées au fond de la démarche, en critiquant son manque d’ambition et de substance politique.

«Je n’ai pas envie de les planter», a lancé d’emblée le professeur d’HEC,  Yves Marie Abraham. Sa critique, a-t-il poursuivi, veut servir à «aller plus loin», pour ne pas s’arrêter aux vœux pieux des signataires. «Les demandes adressées au gouvernement sont extrêmement modestes compte tenu de la gravité de la situation. Pour moi, le point de départ du Pacte aurait été de dire qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans le système, comme l’a fait Nicolas Hulot, le ministre français de l’Environnement, qui a démissionné en direct à la radio en expliquant que le système dans lequel on vit est incompatible avec la préservation de la vie sur terre», a-t-il dénoncé.

Selon lui, les énoncés du manifeste omettraient la véritable cause du réchauffement climatique : le capitalisme et sa croissance infinie, tout en s’adressant à un public privilégié.

Pour le professeur à l’École d’innovation sociale de l’Université Saint-Paul, Jonathan Durant-Folco, le Pacte est une bonne initiative, qu’il a d’ailleurs signé, mais qui manque de substance.

«Il faudrait penser à une série d’actions qui sont pas juste des gestes qui envoient à une image de bonne conscience, mais vraiment des actions concrètes, des exemples d’initiatives citoyennes, des projets d’agricultures urbaines par exemple», a-t-il détaillé.

Le metteur en scène et initiateur du mouvement écologique, Dominic Champagne, a été quelque peu irrité par ces critiques, qui selon lui, desservent la cause écologique. Pragmatique, son mouvement se veut une prise de conscience collective et d’envergure, pour influencer notamment le gouvernement provincial et le premier ministre François Legault, avant de mettre de l’avant une profonde remise en question du système productiviste.

«M. Legault visiblement a besoin d’être plus informé à la situation globale. On le sait, c’est un secret de polichinelle de savoir que la lutte contre le réchauffement climatique n’est pas au cœur de ses priorités depuis des années», a soutenu M. Champagne, qui veut profiter de la mobilisation pour influencer le premier ministre sur ces enjeux. «Si M. Legault tient un double discours sur ces enjeux dans le futur, on saura le ramener», a-t-il averti.

Pour Yves Marie Abraham, la décroissance devrait être un des points centraux de la lutte aux changements climatiques, c’est-à-dire abandonner la logique de croissance infinie, diminuer la production et mieux partager les biens et les richesses.

«S’il n’y  a pas d’intention de changer les institutions et le système économique, pour moi, dans le cadre actuel, on ne sera pas capable d’atteindre nos objectifs», a abondé Jonathan Durand Folco.

«Bien sûr que la décroissance peut apparaître comme une étoile dans la nuit. Notre réalité, aujourd’hui, c’est qu’on vit avec les ressources de 3 ou 4 planètes pour supporter notre mode de vie. On est loin de la décroissance, mais le pacte, c’est un pas dans le sens de la décroissance, un peu plus réaliste dans nos objectifs», a nuancé Dominic Champagne.

Terrain d’entente

Depuis 2015, le Front commun pour la transition énergétique s’est mis en branle pour accélérer la transition écologique, le tout dans une logique de justice sociale, un point qui ne figure pas dans les énoncés du Pacte. Composé de groupes communautaires, de syndicats, de groupes de pression et d’organisations environnementales, le Front a milité contre les principaux projets de transport ou d’extraction d’énergie fossile au Québec depuis sa création.

Ce mouvement semble faire la synthèse entre les revendications de Yves Marie Abraham et Jonathan Durand Folco, et la volonté de mobilisation de Dominic Champagne.

Le Front a d’ailleurs accueilli avec enthousiasme le mouvement du metteur en scène, le voyant comme un bon moyen de mobiliser le citoyen, même s’il n’est pas «une fin en soi».

«On est tous en train de se parler, savoir comment accueillir ces nouvelles personnes et les amener plus loin. C’est bien beau des engagements individuels, mais il faut aussi faire pression sur les gouvernements, aller parler à ses députés, provinciaux ou fédéraux», a illustré la coordonnatrice du Front, Anne-Céline Guyon.

Dominic Champagne espère maintenant gagner par la force du nombre, avec pour objectif qu’un million de Québécois signent le Pacte pour la transition.

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