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Bombardier: Québec veut du contenu local

Mylène Crête, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Le premier ministre Francois Legault exige au moins 25% de contenu local dans l’octroi du contrat des nouveaux wagons de Via Rail.

«Je n’en reviens pas de voir M. Garneau baisser les bras», s’est-il exclamé mardi lors d’une mêlée de presse à Québec.

«Ce sont les contribuables qui, via le gouvernement fédéral, vont investir 1G$ dans ce train-là, puis là on a un gouvernement fédéral qui dit « je n’exigerai pas de contenu canadien ou québécois ». Ça n’a pas de bon sens!»

Le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, avait expliqué un peu plus tôt que les traités de libre-échange avec l’Europe et les États-Unis ne permettent pas à Via Rail de favoriser Bombardier dans l’octroi de ses contrats.

«Nous on joue sur toute la planète et au fédéral, nous n’avons pas le droit d’imposer des règles qui favoriseraient des compagnies canadiennes quand on croit aux traités de libre-échange et ça s’applique dans les deux cas», a-t-il dit en rappelant que Via Rail est indépendante du gouvernement.

La société d’État s’apprêterait à annoncer l’attribution d’un contrat de 1G$ à la multinationale allemande Siemens, selon La Presse. Via Rail veut renouveler son parc de locomotives et de voitures pour le corridor ferroviaire entre Québec et Windsor, en Ontario.

Le ministre Garneau n’a pas confirmé cette information et a rappelé que le processus d’appel d’offres n’était pas terminé. Même son de cloche chez Via Rail qui a précisé que le nom de l’entreprise choisie serait connu en décembre.

La nouvelle suscite tout de même de l’inquiétude chez les 600 employés de Bombardier à La Pocatière où la mise à pied d’une centaine d’employés a déjà commencé en raison de la fin d’un contrat des voitures Azur destinées au métro de Montréal.

«Ce n’est pas concevable que ça soit donné à une compagnie allemande, que le travail soit fait aux États-Unis pour des voitures du Canada», a déploré le président du syndicat, Claude Michaud.

Il demande à Via Rail de revoir son processus d’appel d’offres.

Garneau critiqué de toutes parts
Autant à Québec qu’à Ottawa, les partis d’opposition ont fait part de leur mécontentement.

«Je suis extrêmement déçu, extrêmement déçu», a lancé le député conservateur Bernard Généreux, en entrevue. L’usine de La Pocatière est située dans sa circonscription.

«Via Rail, c’est financé par le gouvernement du Canada, à ce que je sache, avec l’argent des Canadiens, a-t-il ajouté. Le moins du monde qu’on aurait pu s’attendre, c’est sans nécessairement contrevenir à nos ententes internationales de libre-échange, qu’on ait un minimum de contenu local dans ce contrat-là.»

«C’est un non-sens, il n’y a pas d’autre réponse», a déploré le porte-parole néo-démocrate en matière de transports, Robert Aubin, qui avait écrit au ministre dès l’annonce des fonds fédéraux pour les wagons dans le budget 2018 pour lui demander l’inclusion de contenu canadien dans l’appel d’offres.

«J’ai eu la réponse laconique que nos ententes internationales nous interdisent de faire ça. Or, nos principaux partenaires le font.»

Par exemple, la politique Buy America aux États-Unis exige un contenu local de 65% et qui atteindra 70% en 2020.

«Quand on dit que les députés libéraux du Québec, c’est des députés fantômes, c’est ce qu’on voit», a dénoncé le chef intérimaire du Bloc québécois, Mario Beaulieu, en pressant le ministre Garneau d’agir.

«Ce qui est fascinant, c’est comment encore une fois, comment le Canada abandonne le Québec», a réagi la coporte-parole de Québec solidaire, Manon Massé.

Le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Pierre Arcand, a quant à lui rappelé que le gouvernement du Québec s’était assuré de protéger les emplois de l’usine de La Pocatière lors de l’attribution du contrat Azur pour le métro de Montréal.

«Il faut que le premier ministre (Legault) s’assure auprès des autorités fédérales qu’on fasse le maximum pour privilégier les emplois au niveau des travailleurs québécois, a-t-il dit. On l’a fait dans le cas d’Azur, entres autres, où on s’est servi des moyens que nous puissions avoir pour favoriser l’emploi chez les travailleurs québécois.»

Mais la situation n’est pas aussi simple, a soutenu Marc Garneau en après-midi.

«Je sais que la province, quand elle fait des acquisitions, peut mettre 25% (de contenu local) en place, mais ça ne peut pas se faire quand on parle du côté fédéral», a-t-il expliqué.

Il a rappelé que les accords de libre-échange avec l’Union européenne, les États-Unis et les pays du Pacifique donnent accès à un marché d’un milliard et demi de personnes aux entreprises canadiennes.

«Ça crée des jobs, puis ça coûte des jobs, a-t-il reconnu. On peut prendre les arguments des deux côtés.»

Via Rail avait déjà écarté en mars la possibilité d’exiger du contenu local dans son appel d’offres. La société a besoin de 32 nouveaux trains bidirectionnels écologiques pour maintenir sa capacité actuelle de 9100 sièges. Ces locomotives et ces wagons devront pouvoir fonctionner sur des rails électriques dès qu’ils seront installés. Les rames de train devront être livrées en 2022.

Outre Bombardier Transport et Siemens, deux autres entreprises s’étaient qualifiées pour participer à l’appel d’offres. Il s’agit de la multinationale suisse Stadler et de l’espagnole Talgo.

Bombardier Transport s’était montrée intéressée par ce contrat qui aurait pu fournir du travail durant quelques années à son usine de La Pocatière. L’entreprise a annoncé il y a un peu plus de deux semaines le licenciement de 5000 employés, dont 2500 au Québec. L’entreprise a refusé de commenter, citant les règles de l’appel d’offres.

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