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Les proches aidants bientôt reconnus officiellement par Québec

Jacques Boissinot / La Presse Canadienne Photo: Jacques Boissinot/La Presse canadienne

Québec reconnaîtra les jeunes proches aidants dans sa politique nationale, a déclaré mardi la ministre responsable du dossier, Marguerite Blais.

«Ça sera pris en considération dans la politique», a-t-elle affirmé devant les quelque 200 personnes qui prenaient part au forum d’un jour sur la proche aidance à l’Université Laval.

Ce forum doit mener à une première Politique nationale pour les proches aidants en 2019, qui sera accompagnée d’un plan d’action et dotée d’un budget, a assuré la ministre.

À l’heure actuelle, des «dizaines de milliers» de petits Québécois viennent en aide à leurs parents malades, dépressifs, handicapés ou endeuillés, selon Josée Masson, fondatrice et directrice générale de l’organisme Deuil Jeunesse.

Or, les enfants ne sont pas reconnus comme proches aidants, dit-elle. Conséquence: ils affrontent à tous les jours de grandes difficultés, souvent en silence, notamment à l’école.

«On n’en parle jamais, s’est exclamée la travailleuse sociale de formation en entrevue à La Presse canadienne. C’est anormal qu’une petite fille, quand maman revient de sa chimiothérapie, qui vomit, qu’elle ramasse le vomi de sa maman à six ans.

«On ne devrait pas les laisser seuls, on devrait leur apporter une assistance», a-t-elle plaidé.

D’autres pays reconnaissent les jeunes proches aidants, notamment les États-Unis qui en comptent entre 1,3 et 1,4 million, le Royaume-Uni, 175 000, l’Australie, 170 000, et la Nouvelle-Zélande, 10 500, a poursuivi Mme Masson.

«Il y en a vraiment beaucoup, a-t-elle déclaré. Ce sont des jeunes qui n’ont plus d’activités, qui ne vont pas jouer au hockey, à la danse. Au niveau scolaire, ce sont des jeunes qui auront moins d’attention à l’école. (…) C’est souvent une grande fatigue qu’ils vont ressentir.»

Selon elle, le personnel médical québécois devra développer un nouveau «réflexe», celui d’aller à la rencontre de ces jeunes. «Regardez un enfant et demandez-lui: « C’est quoi, toi, tes tâches quand maman ne va pas bien? »»

La politique nationale sera un pas en avant — «Les gens vont dire: « Ah oui? » Et ils vont commencer à porter une réflexion. Si ce n’est que ça, c’est déjà énorme.»

Un Québécois sur quatre est proche aidant
Mardi, la ministre Blais a demandé aux intervenants présents de lui proposer une définition «inclusive» de la proche aidance.

Elle a précisé qu’elle souhaitait que l’exercice soit non partisan. D’ailleurs, la libérale Francine Charbonneau, le péquiste Harold LeBel et la solidaire Catherine Dorion étaient tous sur place.

«Chacun de nous, dans nos bureaux de comté, on reçoit des gens qui ont besoin de services, d’écoute et de ce fait, chacun de nous y croit», a souligné Mme Charbonneau.

Sophie Éthier, professeure agrégée à l’École de travail social et de criminologie de l’Université Laval, a soutenu qu’au moins 25% des Québécois âgés de plus de 15 ans sont proches aidants.

Près de 60% d’entre eux sont des femmes, et celles-ci s’occupent généralement des tâches essentielles, comme prodiguer des soins d’hygiène, par exemple.

Quarante pour cent des proches aidants n’auraient pas choisi d’assumer ce rôle. 24% disent y consacrer plus de 10 heures par semaine.

La majorité des proches aidants travaille. En moyenne, cela se traduit par une perte de revenu personnel de 16 000$ par année. «Il ne faut surtout pas les surresponsabiliser», a prévenu Mme Éthier.

La professeure a notamment divisé les principaux besoins des proches aidants en quatre catégories: soutien financier, soutien social, répit et information.

«Oui, il y aura un dossier médical pour le proche aidant au même titre que l’aidé, oui on va réfléchir à toute la question juridique, oui il y aura un observatoire», a énuméré Mme Blais dans son discours de clôture, mardi, en félicitant les participants pour la qualité des échanges.

Outre la Politique nationale pour les proches aidants et l’observatoire de la proche aidance, le gouvernement Legault s’est engagé à doubler le crédit d’impôt des proches aidants jusqu’à concurrence de 2500$ d’ici quatre ans, en plus d’injecter 22M$ dans le programme d’aide financière pour les parents d’enfants lourdement handicapés.

«On attend ça depuis des décennies», a lancé une proche aidante qui participait aux discussions, mardi.

En juin dernier, le gouvernement Couillard avait revu les normes du travail, afin que les employeurs reconnaissent la proche aidance.

La loi 176 prévoit notamment que certaines journées d’absence peuvent être prises au bénéfice de personnes, autres que des parents, pour lesquelles le salarié agit à titre de proche aidant.

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