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Michael Kovrig était surveillé en Chine depuis longtemps

HO / La Presse Canadienne Photo: HO/La Presse canadienne

OTTAWA — L’ex-diplomate canadien détenu en Chine était vraisemblablement sous la surveillance étroite des autorités chinoises il y a quelques années déjà, alors qu’il parcourait le pays et s’entretenait avec des dissidents au nom du gouvernement du Canada, soutient son ancien patron.

Michael Kovrig a assumé des missions de reportage politique sur des sujets extrêmement délicats, a déclaré Guy Saint-Jacques, ancien ambassadeur du Canada à Pékin.

M. Saint-Jacques a raconté que Michael Kovrig avait tenté de «prendre le pouls» de nombreux groupes, tels que les Tibétains déplacés un peu partout en Chine et les minorités musulmanes du nord-ouest du Xinjiang, où Pékin était accusé par la communauté internationale — y compris le Canada — de procéder à des détentions massives.

«Tout cela aura évidemment attiré l’attention des services de sécurité chinois», a soutenu l’ancien ambassadeur. D’autant plus que les autorités colligeaient des dossiers sur tous les diplomates étrangers en poste en Chine — en particulier ceux qui, comme M. Kovrig, parlaient couramment le mandarin.

La Chine a placé M. Kovrig en détention au début de la semaine, quelques jours après que Pékin a averti Ottawa des «graves conséquences» de l’arrestation de Meng Wanzhou, directrice financière du géant de la technologie Huawei. Les autorités canadiennes ont arrêté Mme Meng le 1er décembre, à l’aéroport de Vancouver, à la demande des États-Unis, qui l’accusent d’avoir tenté de contourner les sanctions commerciales imposées à l’Iran.

Le journal «Beijing News» a écrit mercredi que M. Kovrig «était soupçonné de se livrer à des activités mettant en danger la sécurité nationale de la Chine».

Michael Kovrig a renoncé à son immunité diplomatique lorsqu’il a pris un congé sans solde d’Affaires mondiales Canada à la fin de 2016, au terme de son affectation. Un haut responsable du gouvernement a informé mercredi les journalistes sous couvert de l’anonymat que M. Kovrig demeurait toujours un employé du gouvernement canadien.

Un amoureux de la Chine
L’ancien ambassadeur Saint-Jacques a déclaré que M. Kovrig aimait profondément la Chine, et qu’il avait choisi d’y rester. En février 2017, après avoir rejoint l’International Crisis Group à titre de conseiller, il a poursuivi ses missions d’information sur certains des sujets les plus sensibles concernant la Chine. Ses travaux pour l’organisation non gouvernementale ont porté sur divers sujets, dont la crise nucléaire en Corée du Nord, les relations entre Pékin et Washington, et la présence croissante de la Chine en Afrique.

Selon le haut responsable gouvernemental canadien, la Chine a confirmé au Canada mercredi que le Bureau de la sécurité de l’État à Pékin avait arrêté M. Kovrig. Ottawa ignore toutefois les allégations qui le visent et l’endroit où il se trouve. Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré plus tôt dans la journée que l’International Crisis Group n’était pas enregistré en Chine et que ses activités dans le pays étaient donc illégales.

M. Saint-Jacques a beaucoup de sympathie pour son ancien collègue Kovrig qui, d’après son expérience, a dû subir déjà de longs interrogatoires. Selon lui, les autorités chinoises emmènent généralement les détenus dans des endroits secrets, où ils sont surveillés 24 heures sur 24, les lumières constamment allumées. Michael Kovrig serait privé de sommeil et de nourriture, et soumis à des interrogatoires aléatoires à toute heure du jour et de la nuit.

«Ils essaient de créer autant de pression psychologique que possible pour vous faire craquer», a déclaré M. Saint-Jacques. «Cela va durer jusqu’à ce qu’ils soient satisfaits, jusqu’à ce qu’ils obtiennent de force une confession. Nous avons vu des personnes prêtes à avouer n’importe quoi rien que pour que ça cesse.»

Selon l’ex-ambassadeur, Michael Kovrig ne sera pas officiellement arrêté ni accusé avant cette étape des interrogatoires, qui pourrait prendre des mois, voire plus.

«Dans le système chinois, une fois que vous êtes officiellement accusé, vous êtes aussi reconnu coupable dans 99,9% des cas», a-t-il déclaré. «Alors, les chances sont vraiment contre vous.»

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