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Une lettre de Mgr Ouellet contredit un cardinal

Andrew Medichini / The Associated Press Photo: Andrew Medichini

VATICAN — Une lettre du cardinal Marc Ouellet montre que le Saint-Siège a empêché des évêques américains d’adopter des mesures en réponse au scandale d’agressions sexuelles au sein du clergé puisqu’ils n’avaient pas adéquatement consulté Rome.

La missive obtenue par l’Associated Press est datée du 11 novembre, soit la veille de l’assemblée annuelle de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis, où un code de conduite devait notamment être adopté.

Le report du vote par le Vatican avait sidéré les victimes et les fidèles qui demandaient aux évêques américains d’agir dans la foulée du scandale d’envergure mondiale.

La lettre de Mgr Ouellet, qui est préfet de la Congrégation pour les évêques au Vatican, contredit la version des faits étayée par le cardinal Daniel DiNardo, qui préside pour sa part la Conférence des évêques catholiques des États-Unis.

Ce rebondissement risque de soulever bien des questions cette semaine, alors que les évêques américains se réuniront à compter de mercredi dans le cadre d’une retraite spirituelle à Chicago.

Ils chercheront sans doute à comprendre pourquoi les propositions sur lesquelles ils devaient se prononcer à la mi-novembre n’avaient été soumises au Vatican que quatre jours plus tôt.

Bien que le Saint-Siège soit réputé pour sa lenteur, même une bureaucratie des plus efficaces aurait eu peine à étudier et à approuver des documents juridiques sensibles en l’espace d’un long week-end.

«Considérant la nature et la portée des documents proposés par la conférence, je crois qu’il aurait été bénéfique d’avoir laissé plus de temps pour consulter sur ceci et avec d’autres congrégations compétentes en matière de ministère et de discipline des évêques», avait écrit Mgr Ouellet au cardinal DiNardo.

Le cas McCarrick

L’Église catholique américaine a notamment été ébranlée par le tollé concernant l’ancien cardinal Theodore McCarrick, qui avait pu monter dans la hiérarchie en dépit des rumeurs concernant son attitude prédatrice envers les séminaristes et les jeunes prêtres. De nouvelles révélations d’inconduites sexuelles — et de leur dissimulation — en Pennsylvanie a également fait grand bruit dans les derniers mois.

Le cardinal DiNardo avait stupéfait l’assemblée épiscopale en annonçant qu’«à l’insistance du Saint-Siège», les mesures élaborées en réponse à cette crise ne pourraient pas être adoptées. Il avait alors expliqué que le Vatican voulait reporter le vote après la tenue d’un sommet mondial sur la prévention des violences sexuelles dans l’Église, en février.

Outre l’adoption d’un nouveau code de conduite, la création d’une commission laïque pour recevoir les plaintes à l’endroit des évêques devait également être soumise à un vote.

Le cardinal avait fait porter le blâme au Vatican, mais la lettre de Mgr Ouellet laisse croire qu’il avait tenté de mettre le Saint-Siège au pied du mur en dévoilant les propositions à la toute dernière minute. Il semble avoir voulu éviter de fastidieuses négociations en plaçant ses supérieurs devant le fait accompli.

Il n’est pas étonnant que le Vatican veuille avoir son mot à dire dans cette affaire, puisque lui seul peut faire enquête sur des évêques et les punir.

«Bien que pleinement conscient de l’autonomie dont bénéficie à juste titre la conférence des évêques pour discuter et éventuellement approuver des mesures de son ressort, le travail de la conférence doit toujours être intégré au sein de la structure hiérarchique et de la loi universelle de l’Église», avait précisé Mgr Ouellet dans sa lettre.

Dans une déclaration transmise mardi à l’Associated Press, le cardinal DiNardo fait état d’une simple mésentente. Il explique avoir présumé que le Vatican aurait la chance de «revoir et de proposer des ajustements» aux mesures après leur approbation — et non avant.

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