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Le nombre de suicides diminue au Québec

Des affiches de Suicide Action Montréal dans le métro Photo: Josie Desmarais/Métro
Pierre Saint-Arnaud - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Le nombre de suicides a continué à diminuer au Québec en 2016 selon des données dévoilées jeudi, mais les hommes de 50 à 64 ans et les plus démunis demeurent les plus à risque et de loin.

L’analyse des données de l’Institut national de santé publique du Québec et du Bureau du coroner réalisée par l’Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) montre qu’il y a eu 104 suicides de moins en 2016 par rapport à 2015, soit un total de 1046 décès.

L’Association attribue la baisse aux efforts déployés pour prévenir le suicide, notamment chez les hommes.

«C’est chez les hommes de moins de 50 ans qu’on voit les plus importantes diminutions. C’est très encourageant parce qu’il y a eu beaucoup d’efforts à ce niveau», a expliqué Janie Houle, professeure de psychologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et ambassadrice de la Semaine de prévention du suicide.

L’énigme des hommes de 50-64 ans
Par contre, la situation demeure préoccupante dans le groupe d’âge suivant, les hommes de 50 à 64 ans, qui présentent le taux de suicide le plus élevé, soit plus de 30 par 100 000 habitants, ce qui est deux fois et demie plus élevé que le taux moyen de l’ensemble de la population qui se situe, lui, à 12 pour 100 000 habitants.

«Chose certaine, il va falloir trouver d’autres stratégies pour rejoindre ces hommes parce que présentement on n’y arrive pas», soupire la professeure Houle, signalant que ce taux n’a pas bougé depuis au moins 10 ans.

Les chercheurs n’ont pas d’explication définitive de ce phénomène, seulement «plusieurs hypothèses», reconnaît Mme Houle: «Il y a peut-être un effet de cohorte: les hommes de 50-64 ans font partie d’une certaine génération où l’on peut penser à une adhésion un peu plus rigide au rôle masculin traditionnel qui fait en sorte que de demander de l’aide est un signe de faiblesse.»

«Aussi, poursuit-elle, c’est possible que de perdre son emploi entre 50 et 64 ans et que ce soit ensuite plus difficile de se replacer puisse provoquer une crise suicidaire, en conjugaison avec d’autres facteurs.»

Un lien clair avec le statut socioéconomique
L’Association note par ailleurs que, pour la première fois, l’Institut national de santé publique a colligé les taux avec le statut socioéconomique des victimes ce qui démontre de façon nette un lien entre l’état de santé et les inégalités sociales et matérielles en ce qui concerne le suicide; les personnes défavorisées sont en effet bien plus susceptibles de s’enlever la vie que celles vivant dans des milieux plus aisés.

«Ça confirme ce qu’on voit un peu partout dans le monde, note Janie Houle. Plus on s’élève dans l’échelle sociale, moins notre risque de suicide est élevé.»

Elle prend l’exemple des lignes d’appel pour personnes suicidaires, une ressource pourtant gratuite et facilement accessible: «Ce n’est pas parce qu’une ressource est disponible pour tous qu’elle est accessible pour tous. Certaines personnes démunies, par exemple, n’ont même pas de téléphone.»

«Aussi, certaines personnes peuvent être intimidées ou gênées de s’adresser à des gens plus scolarisés qu’elles. Elles se sentent en position d’infériorité. C’est bien documenté dans la littérature que les personnes moins scolarisées ont une certaine méfiance à l’égard des ressources.»

Mme Houle estime qu’il est «vraiment nécessaire d’avoir des actions ciblées pour les populations les plus vulnérables» et non des mesures mur-à-mur que l’on croit adaptées à tout le monde, mais qui, dans les faits, ne le sont pas.

«Ce que ça prend pour les rejoindre? Il faut sortir de notre bureau», s’exclame-t-elle en riant à l’autre bout du fil. «Il faut aller vers ces personnes et non pas attendre qu’elles viennent vers nous. Ça prend d’autres types d’approches avec des travailleurs de proximité dans ces milieux-là pour rencontrer les personnes.»

Appel à la ministre McCann
De son côté, bien que le taux général soit en baisse, le directeur général de l’AQPS, Jérôme Gaudreault, appelle à de nouveaux efforts en matière de prévention. Il tend la main à la ministre de la Santé et des Services sociaux, Danielle McCann, pour élaborer une stratégie nationale de prévention du suicide ambitieuse, car malgré les statistiques encourageantes, le suicide affecte encore trop de familles, de couples et de milieux de vie.

Cette année, la Semaine de prévention du suicide débutera dimanche et se poursuivra jusqu’au 9 février. Avec sa campagne intitulée, Parler du suicide sauve des vies, l’AQPS a mis en ligne le site www.commentparlerdusuicide.com.

Les gens qui croient avoir besoin d’aide sont invités à utiliser la ligne téléphonique québécoise de prévention du suicide: 1-866-277-3553, disponible partout au Québec, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24.

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