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Décès de Nicholas Gibbs: peu de réponses, un an plus tard

Nicholas Gibbs
Une manifestation s'était tenue en novembre 2018 en soutien à la famille de Nicholas Gibbs. Photo: Pablo A. Ortiz/Métro

Le 21 août 2018, Nicholas Gibbs, 23 ans, a été tué par des policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) lors d’une altercation. Les policiers ont tiré sur l’homme à plusieurs reprises. La famille du jeune homme poursuit toujours la Ville pour plus de 1,1 M$ en dommages moraux et punitifs. À l’approche de la commémoration de la mort du père de trois enfants, plusieurs membres de la communauté noire de Montréal disent vouloir des changements quant au traitement des personnes noires par les forces de l’ordre.

«Il n’y a pas de réponses et pas d’explications», déplore la sœur du défunt, Pauline Thorne.

Plus tôt cette semaine, la Ligue des Noirs du Québec a déposé un recours collectif contre la Ville de Montréal pour des allégations de profilage racial contre le SPVM. En entrevue avec Métro, l’organisme a soutenu que plusieurs personnes noires qui ont vécu des situations de profilage racial avec les policiers de Montréal n’ont pas obtenu justice avec le comité de déontologie policière de l’administration municipale. « Ça fait des années qu’on vit les mêmes problèmes, martèle-t-il. Les gens n’osent même plus porter plainte, car ils ne voient pas de conséquences pour les policiers en cause ».

Dans son livre, Noires sous surveillance, l’auteure et afro-féministe canadienne, Robyn Maynard, affirme qu’elle a trop souvent assisté à des vigiles pour des personnes noires tuées aux mains de la police. La militante qui a longtemps travaillé avec des communautés marginalisées de Montréal croit que la mort de Nicholas Gibbs est malheureusement un exemple d’une brutalité policière grandissante envers les personnes noires. Elle se désole que plus de 30 ans après la mort d’Anthony Griffin, un jeune homme de 19 ans, le nombre de personnes noires tuées, interpellées et contrôlées par la police ne cesse d’augmenter. «Ça fait des décennies que l’on voit de l’impunité policière lorsque des personnes noires meurent.»

Le militant Will Prosper qui suit de près la brutalité policière et le profilage racial au Québec note que quatre des dix dernières personnes tuées par le SPVM par des armes à feu sont noires. Tout comme Robyn Maynard et l’avocate de la famille Gibbs, Virginie Dufresne-Lemire, il conteste l’impunité des policiers lors de décès aux mains du SPVM. À ce jour, aucune accusation en lien avec un décès n’a été déposée à la suite d’une enquête du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI). Questionné à ce sujet, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) explique qu’il analyse les dossiers soumis par le BEI en vertu des infractions prévues au Code criminel et que le profilage racial ne constitue pas une infraction spécifique du Code criminel.

Le militant et ancien policier est malgré lui une ressource importante pour les familles de personnes tuées par la police et les victimes de racisme. «Je ne peux pas vous dire le nombre de messages que je reçois par des personnes qui sont victimes de brutalité policière, de profilage racial et de discrimination au travail.» M. Prosper aimerait voir des mesures qui s’attaquent au racisme anti-noir et au profilage racial au sein de la société québécoise. «Il faudrait qu’on regarde notre situation et qu’on se dise qu’on a un problème, est-ce qu’on pourrait les adresser ces problèmes-là ?» demande-t-il.

Robyn Maynard croit pour sa part que la Ville de Montréal et la province du Québec doivent davantage s’investir pour mettre fin à la surveillance policière extrême que vivent les communautés noires. «Est-ce qu’on veut continuer à investir dans la criminalisation et la répression des communautés noires ou est-ce qu’on veut créer un modèle qui n’est pas répressif et encourage l’émancipation de ces communautés ?», s’interroge-t-elle notamment.

Le directeur de La Ligue des Noirs, Dan Philip, espère que le recours entrepris par son organisme est un signal d’alarme aux policiers de Montréal.

« Ils ne peuvent pas continuer à violer les droits de simples citoyens sans avoir des recours contre eux», a-t-il fait valoir. Nous voulons que les gens respectent notre citoyenneté, notre droit de participer pleinement à la société sans avoir d’inquiétudes. »

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