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Zones inondables: le PL 67 doit être amélioré, dit un expert

La rue Cousineau de Cartierville a été inondée en 2017
La rue Cousineau de Cartierville a été inondée en 2017. Photo: Josie Desmarais/Métro

En matière de zones inondables, le PL 67 devrait tenir compte des changements climatiques et de la variabilité du climat, assure un professeur québécois. Ce qui n’est pas le cas pour le moment. Explications. 

Le PL 67 pourrait être amélioré, a indiqué le professeur de l’INRS Taha Ouarda, mercredi, lors de l’audition publique sur le projet de loi 67 à l’Assemblée nationale du Québec. 

Rappelons que le PL 67 veut instaurer un nouveau régime d’aménagement dans les zones inondables aux abords des lacs et des cours d’eau. 

L’une de ses conséquences serait d’octroyer temporairement aux municipalités des pouvoirs relatifs à la gestion des risques liés aux inondations. 

Le travail quotidien de M. Ouarda, lui, est d’estimer les risques d’inondation grâce à des modèles mathématiques. 

C’est un domaine que l’on appelle l’hydrométéorologie statistique.  

Tenir compte des changements climatiques

Selon le professeur Ouarda, il faudrait que le PL 67 favorise davantage l’intégration continue des nouvelles connaissances dans les activités reliées à la prévention et à la gestion des inondations. En premier lieu, en tenant compte des changements climatiques. 

Selon lui, il est non seulement important d’observer leur récurrence, leur amplitude et leur durée, mais aussi leur fréquence et leurs distributions spatiale et temporelle. 

Car tous ces éléments influencent les caractéristiques des inondations. 

«Prendre en compte les changements climatiques pourrait résulter en une réduction considérable des impacts des inondations.» -Le professeur Taha Ouarda

Outre les changements climatiques, aucune mention n’est faite dans le PL 67 de l’utilisation de l’information concernant les impacts des indices d’oscillation climatique de basse fréquence. Pourtant, c’est très important, comme l’explique M. Ouarda. 

«Même le public est conscient de l’impact du phénomène El Niño sur la fréquence et la sévérité des inondations», dit-il. 

Rappelons que l’oscillation El Nño concerne des températures de surface de la mer. Il s’agit d’une bande qui s’étend du centre est de l’océan Pacifique équatorial à la côte ouest de l’Amérique du Sud tropicale. Celle-ci a des conséquences sur tout le climat mondial.

Mieux mesurer le risque

Qui plus est, les changements climatiques ont également des conséquences sur les indicateurs du risque associés, estime M. Ouarda. Par exemple, sur la probabilité d’occurrence, la résilience ou la vulnérabilité. Ce qui inclut aussi les impacts sur la santé physique et mentale des citoyens. 

Voilà pourquoi il est important, selon lui, de mieux évaluer les niveaux de risque. Et ce, en intégrant de nouvelles mesures du risque qui se baseraient sur des variables comme la durée de la crue, son volume ou la vitesse de l’eau. 

Pour le moment, toutes les approches préconisées dans le PL 67 reposent seulement sur le niveau d’eau. 

«Le fait d’ignorer ces autres variables importantes résulte en un biais systématique d’estimation du risque et, souvent, en une sous-estimation de la vulnérabilité réelle», avance M. Ouarda. 

Il mentionne, au passage, qu’en plus des outils existants, des experts québécois de renommée mondiale travaillent dans ce domaine. «On devrait donc pouvoir faire du très bon travail là-dessus», dit-il.   

Un risque de relocalisation systématique?

Finalement, le professeur Ouarda estime que les ouvrages de protection devraient être conçus et gérés pour faire face aux événements futurs et non aux événements déjà observés. 

Sur ce point, la Commission de l’aménagement du territoire a dit craindre que dans les zones où le risque serait jugé élevé, on relocalise systématiquement la population. Et ce, même dans des cas où il soit possible de construire un village en appliquant des mesures plus sévères. 

«C’est une question de coûts et de bénéfices», répond le professeur Ouarda. Ce que cela coûterait de reloger ces gens-là versus le coût d’ouvrages de protection. 

Rénover des infrastructures existantes est parfois même plus coûteux que de déménager des gens, a-t-il indiqué. 

«Des événements du type de ce qu’on a eu au Saguenay en 1996, on sait que ça va se reproduire même si on ne sait pas quand. Tous les modèles nous le montrent.» – Le professeur Ouarda 

Pour autant, une protection absolue contre tous les aléas est impossible, a-t-il résumé.

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