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Mangeurs demandés pour restes de pizza

Photo: collaboration spéciale

En plus de publier des photos appétissantes de nourriture sur les réseaux sociaux, il sera maintenant possible de partager des clichés de ses restes, pour les redistribuer (pour vrai).

Alors que la moitié de la nourriture produite dans le monde se retrouve au fond de sacs à ordures, LeftOver Swap (Échange de restants), une application iPhone qui sera disponible au cours du mois d’août, permet, comme son nom l’indique, de partager ses restes de nourriture avec des gens de son quartier. Son utilisation risque toutefois de créer un casse-tête juridique.

Son utilisation est aussi simple que celle des sites de petites annonces en ligne, mais ici, aucun échange d’argent, seulement de nourriture. Deux pointes de pizza de trop, un litre de soupe qui ne rentre pas dans le congélateur? Prenez une photo, publiez-la sur l’application. Une personne intéressée vous proposera une rencontre dans votre quartier.

«C’est un peu comme le Couch Surfing (un site où les gens offrent leur divan ou un lit d’ami à des touristes) mais pour la nourriture», explique Dan Newman, l’homme d’affaires derrière l’application

L’idée «folle» est née lors d’une soirée de brainstorming où il cherchait, avec son ami programmeur, Bryan Summersett, des idées pour lancer une nouvelle compagnie. Trop de pizza avait été commandée.

«On s’est dit que ce serait fou qu’une personne qui a faim puisse venir la manger ou qu’on puisse l’échanger… Trois ans plus tard, ça se concrétise, maintenant que tous ont des téléphones intelligents munis de GPS dans leurs poches», raconte-t-il.

Pour l’instant, leur modèle d’affaires se base davantage sur «faire du bien» (le b-commerce), que sur la «maximisation des profits» tirés de la publicité. L’application américaine, qui sera aussi disponible au Canada, s’adresse à tous, notamment aux employés de certains supermarchés ou de boulangeries qui pourront aussi l’utiliser pour redonner ou échanger ce qui se retrouve normalement dans les poubelles de l’entreprise qui les emploie.

Flou juridique
Au Québec, aucun règlement n’encadre le don ou l’échange d’aliments entre des particuliers. La loi canadienne interdit à tout individu de «vendre un aliment» qui «contient une substance toxique ou délétère, ou en est recouvert, est impropre à la consommation humaine, est composé, en tout ou en partie, d’une substance malpropre, putride, dégoûtante, pourrie, décomposée ou provenant d’animaux malades ou de végétaux malsains, est falsifié, a été fabriqué, préparé, conservé, emballé ou emmagasiné dans des conditions non hygiéniques». La définition de «vendre» englobe aussi l’acte d’échanger de la nourriture.

«On se fie au jugement et le bon sens des gens pour que les échanges se fassent sans problèmes et que les normes sanitaires soient respectées, ajoute M. Newman.» Il précise en outre qu’ils feront de la veille pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’abus.

Il assure aussi qu’ils feront de la veille pour assurer qu’il n’y ait pas d’abus.

La nouveauté de l’application vient toutefois perturber la chaîne traditionnelle de distribution de la nourriture. Si donner de la nourriture à un ami ne pose pas de problèmes, la situation est différente lorsqu’on publicise l’offre, indique le professeur de droit à l’Université McGill Pierre Jobin.

«Théoriquement, il pourrait y avoir des cas de responsabilité civile, mais ce ne sont que des hypothèses pour l’instant», lance-t-il.

L’ancien juge à la Cour d’appel qui œuvre maintenant chez Fasken Martineau, Jean-Louis Baudouin, partage cette opinion et ajoute qu’il pourrait même y avoir des cas de responsabilité criminelle.

Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) recommande aux gens de consulter leur guide sur le site internet afin de se sensibiliser et rappelle qu’il dispense une formation obligatoire aux organismes de bienfaisance qui distribuent des denrées.

Santé Canada recommande pour sa part aux gens de prendre leurs précautions. La porte-parole de la Ville de Montréal, Valérie de Gagné, soutient quant à elle que leur autorité se limite aux institutions et non aux individus.

«On recommande d’être prudent avec ses choix, parce que la nourriture ne vient pas d’établissements inspectés par la Ville.»

L’Institution de la Santé publique du Québec et la Direction de la santé publique de Montréal n’ont pas voulu commenter le dossier, puisqu’ils n’ont pas de données sur le sujet.

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