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L'impact positif des centres jeunesse

Ancien éducateur au Centre jeunesse de Montréal – Institut universitaire, Louis-Georges Cournoyer est aujourd’hui professeur à l’École de criminologie de l’Université de Montréal et chercheur régulier du Centre international de criminologie comparée. Au fil des ans, il s’est penché sur la problématique des jeunes contrevenants et leurs perspectives de réhabilitation. Métro s’est entretenu avec lui.

Pourquoi vous êtes-vous intéressé aux centres jeunesse?
J’ai travaillé à titre d’éducateur dans le passé au Centre jeunesse de Montréal et je crois au potentiel de réhabilitation de ces jeunes-là. Ce sont des jeunesqui souffrent beaucoup. Certains en sont conscients, d’autres moins.

Avec quel type de jeunes contrevenants les centres jeunesse doivent-ils composer?
Il existe une grande variété de jeunes qui sont suivis : des jeunes qui ont des problèmes de délinquance commune jusqu’aux jeunes qui présentent de hauts risques de récidive. Dans le cas de la délinquance commune, comme faire des mauvais coups, ça fait presque partie d’un processus normal de l’adolescence. Ces jeunes ont un profil moins sévère. Certains peuvent aussi vivre des problématiques très complexes quant à la toxicomanie, d’abus de substances psychoactives ou aux troubles de santé mentale.

À quelles interventions procèdent les centres jeunesse?
Pour les jeunes qui ont des profils moins sévères, on a souvent uniquement besoin de les accompagner. Pour les autres, il y a une gradation de la prise en charge. On ne stigmatisera pas un jeune qui a un faible potentiel de récidive. On ne lui mettra pas trop de pression, surtout s’il est réceptif à l’intervention. Mais plus un jeune est actif ou en lien avec le milieu criminel, plus il risque de récidiver, plus l’intervention et la surveillance seront intensives.

Sur quoi se fondent les interventions?
Ça passe en premier lieu par la relation qu’on peut établir avec le jeune. Souvent, le jeune qui est pris en charge par le centre n’a pas eu de relation positive avec les adultes. Le fait d’être respecté et écouté permet de réparer cette rupture sociale. Suit ensuite une série de programmes. La logique derrière tout ça, c’est d’arrêter les comportements déviants du jeune. On veut aussi lui donner les moyens de s’en sortir.

À quel point ces interventions sont-elles efficaces?
Selon une recherche que j’ai faite [auprès de 99 délinquants juvéniles pris en charge par le Centre jeunesse de Montréal – Institut universitaire], 82 % des jeunes à haut risque de récidive disaient croire que leur placement avait eu un impact positif dans leur vie et ce, lorsque questionnés un an après la fin de leur prise en charge. De plus, 76 % d’entre eux disaient que ce qu’ils retenaient de leur passage au Centre jeunesse les avait aidés.

Ces résultats vous ont-ils surpris?
C’était surprenant parce qu’on ne pose jamais la question aux jeunes après coup pour savoir si leur passage aux centres jeunesse les a aidé. Les intervenants ont rarement des contacts avec les jeunes après leur placement. C’est intéressant de voir que ce qui s’est fait au Centre jeunesse a un impact positif. Les jeunes nous ont dit que leur intervenant avait eu un rôle déterminant grâce à sa disponibilité, à son écoute, à son empathie, à ses conseils, à son aide concrète, la confiance qu’il leur a accordé, à l’encadrement qu’il a offert et à la motivation qu’il leur a transmis à s’intégrer socialement.

Les jeunes qui ont eu droit à un suivi plus intensif semblent avoir davantage perçu un impact positif des interventions des centres jeunesse. Les centres devraient-ils offrir à tous les jeunes des suivis intensifs?
La recherche démontre que les jeunes qui présentent de faibles risques de récidives ou des risques modérés, n’ont pas besoin d’un suivi aussi intensif. Pour les jeunes qui ont une bonne capacité d’intégration, avoir un intervenant trop présent peut vouloir dire qu’on ne leur fait pas confiance. Tout adolescent a besoin d’une forme de liberté. Par contre, ceux qui sont à haut risque de récidive ont besoin d’une plus grande intensité parce qu’il faut les arrêter et leur donner la chance de prendre conscience des comportements qu’ils ont. Il faut leur donner un cadre qui va leur permettre d’être réceptifs aux interventions et aux apprentissages. On parle cependant d’une minorité de jeunes, peut-être 10 % des jeunes contrevenants suivis.

Comment se positionne le Québec en terme de services aux délinquants juvéniles?
On est très avantagé. L’étude que j’ai faite sur les jeunes en probation intensive laisse voir un taux de succès de 63 % en terme de non-récidive criminelle pour les jeunes placés sous garde et de 75 % pour le groupe suivi en probation intensive. Ce sont des taux très élevés. Les jeunes semblent s’en sortir, mais on a besoin d’études à plus long terme pour voir où ils en sont, cinq ans plus tard.

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