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Robots tueurs: le Canada pressé de s'engager

OTTAWA – Le Canada est pressé de prendre la direction des efforts internationaux visant à interdire les «robots tueurs», une nouvelle génération d’armes entièrement autonomes qui peuvent sélectionner et tirer sur des cibles sans intervention humaine.

La Campagne pour interdire les robots tueurs fait pression en faveur de l’adoption d’un traité international visant à interdire l’utilisation de telles armes dans les conflits de l’avenir.

Paul Hannon, qui dirige l’organisation Mines Action Canada, estime que le développement de ces armes autonomes constitue un changement profond de la nature même de la guerre.

L’organisation fait partie d’une coalition internationale qui appelle le Canada à assumer le leadership de la campagne pour l’interdiction des robots tueurs, comme il l’avait fait lors de la campagne contre les mines terrestres dans les années 1990.

Il n’y a pas si longtemps, le monde considérait encore les mines terrestres comme de «parfaits soldats», a affirmé M. Hannon mardi à Ottawa. Ces armes sont désormais bannies à cause des dommages qu’elles ont causés aux populations civiles, a-t-il souligné.

Le Canada a piloté la campagne internationale contre les mines terrestres, qui a mené à l’un des traités internationaux les plus efficaces de l’ère moderne, a rappelé M. Hannon.

L’idéal serait de freiner le développement des armes autonomes avant même qu’elles soient fabriquées et déployées, estime-t-il. Une fois que le «génie des armes» est sorti de la bouteille, il est très difficile de le maîtriser, a-t-il illustré.

M. Hannon précise que son organisation ne s’oppose pas à l’utilisation de la robotique dans l’armée à des fins non combattantes — pour les transports, par exemple.

La coalition internationale contre les robots tueurs ne dispose d’aucune preuve permettant de croire que des entreprises canadiennes travaillent à concevoir de telles armes, et le ministère de la Défense a assuré n’avoir sollicité aucune recherche dans ce domaine.

«Cela ne signifie pas qu’il n’y en a pas, parce qu’il n’y a pas beaucoup de transparence sur ce sujet», a affirmé M. Hannon.

On sait qu’au moins six pays travaillent sur cette technologie: les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël, la Chine, la Russie et la Corée du Sud.

Les armes entièrement autonomes n’existent pas encore, mais avec les percées rapides dans le secteur de la robotique, il y a lieu de s’inquiéter, estime Peter Asaro, cofondateur du Comité international pour le contrôle des armes robotisées, une organisation établie à New York.

Il a cité le «flash crash» de 2010 à la Bourse de New York, provoqué par une frénésie d’échanges informatisés automatiques qui ont fait plonger la valeur des actions de plusieurs grandes sociétés.

Au moins deux entreprises ont créé des prototypes d’aéronefs de combat sans pilote considérés comme autonomes. D’autres entreprises ont conçu des systèmes de surveillance et de mitraillage partiellement autonomes à la frontière entre les deux Corées.

Mary Wareham, une experte en armements auprès de l’organisation Human Rights Watch à Washington, indique que l’un des concepteurs des aéronefs, BAE Systems, a récemment commandité une conférence de deux jours sur les armes autonomes à Londres.

«Je pense qu’ils réalisent que s’ils ne démontrent pas d’intérêt et n’acceptent pas au moins d’être un peu plus transparents sur les systèmes en cours de conception, cela augmentera la suspicion, alors leur intérêt est d’être transparents», a affirmé Mme Wareham.

Ian Kerr, professeur de droit et d’éthique à l’Université d’Ottawa, estime quant à lui que le fait d’écarter les humains de la décision de tuer des gens soulève de sérieuses questions morales et philosophiques.

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