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Le français en Alberta et en Saskatchewan scruté par la Cour suprême

Photo: Archives Métro

OTTAWA – La Cour suprême du Canada a mis en délibéré une cause dont l’issue pourrait révolutionner le statut unilingue anglophone de plusieurs provinces et territoires.

Le plus haut tribunal au pays a entendu vendredi l’appel dans la cause de Pierre Boutet et Gilles Caron, deux Albertains qui avaient contesté des contraventions puisque celles-ci avaient été rédigées seulement en anglais.

L’enjeu en apparence banal de ces infractions routières s’est élargi au fil des années, et ce sont maintenant les lois linguistiques des provinces de l’Ouest qui sont au coeur de l’affaire.

Une décision favorable de la Cour suprême «donnerait un statut constitutionnel au bilinguisme dans les autres provinces et territoires, donc ça affecterait le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut, le nord de l’Ontario et le nord du Québec», a expliqué l’avocat de Gilles Caron, Me Roger Lepage, après sa présentation devant les neuf magistrats.

«Même s’ils ont des lois bilingues, ce n’est pas nécessairement fondé sur un droit constitutionnel. Là, ça le serait», a-t-il poursuivi.

La Cour d’appel de l’Alberta avait déterminé, en février 2014, que le gouvernement albertain n’avait pas l’obligation constitutionnelle de publier ses lois dans les deux langues officielles du Canada.

Après avoir été déboutés, les deux francophones avaient décidé de se tourner vers la Cour suprême du Canada, estimant qu’il s’agissait d’une cause d’intérêt national.

Il aura fallu que leurs avocats retournent à leurs livres d’histoire pour étoffer leur cause.

Leurs arguments remontent à l’époque de la lutte des Métis, au XIXe siècle. Les Métis refusaient alors d’intégrer le Canada, craignant notamment pour la pérennité de la langue française au sein de l’union.

Leur rébellion aura pris fin en vertu de la Proclamation royale de 1869, dans laquelle la reine Victoria leur garantissait le respect des «droits et privilèges civils et religieux».

Selon les appelants, le maintien des droits linguistiques était au coeur des promesses et engagements faits par le Canada et la Couronne britannique lors du processus d’annexion et sont donc de nature constitutionnelle.

Me Lepage est persuadé que les juges de la Cour suprême concluront que les provinces nées grâce à cette entente ont l’obligation de publier leurs lois en français et en anglais — l’Alberta et la Saskatchewan avaient obtenu le droit de se déclarer unilingues anglophones en 1988.

«C’est une cour, je pense, qui n’a pas peur de créer des précédents, de corriger des injustices. Je pense qu’ils sont sensibles à ça, a-t-il suggéré vendredi. Donc moi, je suis confiant que Gilles Caron va avoir gain de cause.»

Une victoire permettrait aux francophones de l’Ouest canadien de travailler avec leur gouvernement provincial pour faire valoir leurs droits, estime le président de l’Association canadienne-française de l’Alberta, Jean Johnson.

«Nous, on a toujours dit qu’on est des francophones, qu’on est des Albertains de premier ordre, comme tous les autres citoyens, a-t-il exposé. On veut se faire reconnaître comme des citoyens à part entière», a résumé M. Johnson, qui avait fait le déplacement jusqu’à Ottawa pour assister aux audiences.

La Cour suprême du Canada rendra sa décision dans quelques mois.

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