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Chronologie du conflit étudiant au Québec

MONTRÉAL – Voici une chronologie du conflit entre les étudiants et le gouvernement du Québec au sujet des droits de scolarité:

Les principaux protagonistes

FECQ: Fédération étudiante collégiale du Québec (23 assos: 80 000 étudiants)

FEUQ: Fédération étudiante universitaire du Québec (15 assos: 125 000 étudiants)

CLASSE: Coalition large de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (env. 100 000 membres)

TACEQ: Table de concertation étudiante du Québec (4 assos: 65 000 étudiants universitaires)

1990: le gouvernement libéral de Robert Bourassa fait passer les droits de scolarité de 500 à 1600 $ en quatre ans, avec une hausse annuelle de 280 $. Des milliers d’étudiants descendent dans la rue, mais le premier ministre reste inflexible.

1996: quelque 100 000 étudiants déclenchent une grève en octobre lorsque Pauline Marois, ministre péquiste de l’Éducation, propose une hausse des droits d’environ 30 pour cent. Elle revient rapidement sur sa décision, et décrète même un gel jusqu’à au moins 2007.

2005: le gouvernement libéral de Jean Charest veut réduire le budget de l’aide financière de 103 millions $. À la mi-mars, plus de 200 000 étudiants sont en grève. Quelques semaines plus tard, Québec recule.

2007: les libéraux annoncent une hausse des droits de scolarité de 500 $ sur cinq ans.

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Mars 2011: le ministre des Finances, Raymond Bachand, annonce que Québec augmentera les droits de scolarité à compter de septembre 2012 à raison de 325 $ par année pendant cinq ans. La hausse totale (75 pour cent) est de 1625 $, faisant passer la facture des étudiants à 3793 $ en 2017. Les droits de scolarité au Québec seront encore parmi les plus bas au Canada.

Août 2011: les étudiants lancent officiellement leur campagne contre la hausse.

10 novembre 2011: une importante manifestation se déroule à Montréal et les associations étudiantes promettent de faire front commun afin d’augmenter la pression sur Québec.

13 février 2012: les premières associations étudiantes votent en faveur de la grève générale illimitée.

23 février: des étudiants bloquent l’accès au pont Jacques-Cartier, à Montréal.

7 mars: durant un affrontement avec la police, l’étudiant Francis Grenier est grièvement blessé à un oeil. Les étudiants soutiennent que c’est une grenade assourdissante lancée par la police qui est responsable de la blessure, ce qui n’a jamais été confirmé. Le jeune homme devient un symbole pour ses pairs.

21 mars: les étudiants commencent à adopter des tactiques visant à perturber l’économie québécoise. Un groupe occupe le pont Champlain durant l’heure de pointe du matin. Chaque manifestant reçoit une contravention de 494 $.

22 mars: plus de 100 000 personnes participent à une manifestation pacifique, attirant l’attention sur un mouvement étudiant qui ne cesse de prendre de l’ampleur.

27 mars: des manifestants bloquent les entrées du siège social de la SAQ à Montréal, alors que les étudiants prennent toujours pour cibles des symboles économiques.

2 avril: l’édifice du bureau montréalais de Line Beauchamp est peint en rouge. L’immeuble devient un point de ralliement populaire durant les manifestations.

5 avril: offre de Québec, qui bonifie son programme de prêts et instaure un régime de remboursement proportionnel au revenu des diplômés.

16 avril: le service du métro de Montréal est interrompu après que des sacs remplis de briques aient été jetés sur les rails. Les bureaux de quatre ministres sont vandalisés.

18 et 19 avril: plus de 300 personnes sont arrêtées à Gatineau durant des affrontements entre policiers et manifestants sur le campus de l’Université du Québec en Outaouais.

20 avril: la police et les manifestants s’affrontent devant le Palais des congrès de Montréal, où se tient un salon de l’emploi pour le Plan Nord de Jean Charest, qui en fait des blagues. Plus de 100 manifestants sont arrêtés durant deux jours marqués par des accrochages violents avec l’unité antiémeute.

22 avril: la CLASSE se prononce finalement contre la violence — les porte-parole disaient jusque-là qu’ils n’avaient pas ce mandat. La ministre Beauchamp faisait de cette dénonciation la condition à la participation de la CLASSE aux négociations.

23 avril: début des négociations entre le gouvernement et les regroupements étudiants afin de mettre fin au conflit qui dure maintenant depuis 11 semaines.

25 avril: le gouvernement rompt les négociations en soutenant que la CLASSE adopte une position trop ambiguë face à de nouvelles manifestations musclées à Montréal. D’autres manifestations violentes éclatent dans la métropole: des banques, voitures et commerces sont endommagés, et 85 personnes sont arrêtées.

26 avril: les étudiants souhaitent retourner à la table de négociations mais le gouvernement refuse, jugeant inacceptable le plan de la FEUQ d’inclure dans sa délégation deux membres de la CLASSE exclue.

27 avril: par le biais des médias, le gouvernement Charest propose, dans une «solution globale», d’étaler sur sept ans au lieu de cinq la hausse des droits de scolarité, mais de l’indexer au coût de la vie dès la 6e année, ce qui fait passer la hausse totale de 75 à 82 pour cent. Le gouvernement propose aussi d’ajouter 39 millions $ au régime des bourses. Ces propositions sont très mal reçues par les regroupements étudiants, et les manifestations relativement paisibles se poursuivent — notamment tous les soirs à Montréal.

1er mai: en conférence de presse, la FECQ et la FEUQ déposent une «contre-offre» en sept points, qui maintient le gel des droits de scolarité et reprend finalement leurs suggestions pour réduire les dépenses des universités. La ministre Beauchamp qualifie cette contre-proposition de simple «justification» des revendications traditionnelles.

3 mai: la CLASSE reprend la contre-proposition des deux fédérations étudiantes, et suggère d’autres avenues pour financer l’enseignement, dont le rapatriement de 142 millions $ de fonds consacrés à la recherche, et l’abolition de la publicité des universités (18 millions $). Les manifestations nocturnes continuent d’attirer des milliers de personnes au centre-ville de Montréal.

4 mai: une manifestation organisée à Victoriaville en marge du conseil général du Parti libéral du Québec vire à l’émeute, donnant lieu à de violents affrontements entre les manifestants et les policiers de la Sûreté du Québec. L’incident fait plusieurs blessés; un jeune manifestant perd un oeil alors qu’un agent se fait battre par des contestataires.

5 mai: après de longues heures de négociations, une entente de principe est conclue qui reporte de quelques mois la hausse des droits de scolarité, et table sur les économies que l’on pourrait trouver dans le fonctionnement des établissements. Les assemblées étudiantes la rejettent massivement, mais certaines décident de mettre fin à la grève.

10 mai: des bombes fumigènes lancées dans diverses stations du métro de Montréal provoquent une interruption de service en pleine heure de pointe matinale. La police publie des photos des suspects prises par d’autres passagers à l’aide de téléphone mobile. Quatre personnes se rendont à la police le lendemain.

14 mai: Line Beauchamp démissionne de son poste de ministre de l’Éducation et quitte la vie politique. Elle est remplacée par Michelle Courchesne, qui était responsable de ce ministère avant que Mme Beauchamp n’en hérite au mois d’août 2010.

16 mai: des manifestants, dont plusieurs portant des masques, arpentent les couloirs de l’UQAM à la recherche de cours à interrompre. Des altercations s’ensuivent entre eux et les étudiants qui veulent continuer à aller en classe. Le même jour, le premier ministre Charest annonce un projet de loi spéciale comprenant une suspension de l’année scolaire pour les établissements touchés par la grève.

17 mai: le gouvernement présente le projet de loi 78, qui prévoit des amendes salées pour les personnes qui bloqueront l’accès aux établissements scolaires, ainsi que des règles plus sévères pour encadrer le droit de manifester. Les manifestants doivent fournir leur itinéraire huit heures d’avance, et la police a le droit de changer le parcours.

18 mai: la loi 78 est adoptée; Montréal adopte aussi un nouveau règlement municipal qui interdit le port de masques durant certaines manifestations.

19 mai: la manifestation nocturne à Montréal dégénère, les protestataires allumant des feux et érigeant des barricades dans les rues du Quartier latin. La police est accusée d’user de force excessive, notamment en aspergeant de poivre de cayenne les clients de la terrasse d’un bar de la rue Saint-Denis. À New York, le groupe montréalais Arcade Fire prend d’assaut la scène de l’émission «Saturday Night Live» aux côtés de Mick Jagger en arborant le fameux carré rouge.

21 mai: la CLASSE annonce son intention de désobéir à la loi spéciale; d’importantes manifestations nocturnes continuent à se dérouler pendant le long week-end de la fête des Patriotes.

22 mai: à l’occasion du 100e jour de grève étudiante, plus de 100 000 personnes participent à une manifestation plurielle à Montréal; plusieurs défient la loi 78 en dérogeant à l’itinéraire soumis à la police. Des rassemblements solidaires ont également lieu à Paris, New York, Vancouver et Toronto. Les syndicats de l’extérieur de la province promettent de continuer à soutenir financièrement la cause.

23 mai: les processions de casseroles, pratique inspirée du Chili, se multiplient aux quatre coins de la province, attirant chaque soir des foules de plus en plus nombreuses et diversifiées, qui prennent d’assaut les rues en jouant allégrement du chaudron. Même si la loi 78 a été souvent violée, aucune amende n’a été imposée jusqu’ici en vertu de cette loi d’exception.

24 mai: arrestation de masse à Montréal et Québec: près de 700 personnes sont interpellées dans le cadre d’une opération policière controversée. La majorité d’entre elles reçoivent une contravention de 634 $ pour «rassemblement illégal». Jean Charest rappelle son ancien chef de cabinet, Daniel Gagnier.

25 mai: les associations étudiantes, les syndicats et des dizaines de groupes déposent deux requêtes en Cour supérieure du Québec pour obtenir la suspension de la loi 78, puis son éventuelle invalidation.

28 mai: les leaders étudiants et le gouvernement sont de retour à la table des négociations, à Québec. À l’extérieur, 84 personnes sont arrêtées en soirée par la police, dont un des négociateurs de la CLASSE et… un jeune homme déguisé en banane.

29 mai: le premier ministre Charest confirme qu’il a pris part brièvement aux pourparlers de la veille — c’est la première fois qu’il rencontre les leaders étudiants — Le porte-parole de la CLASSE Gabriel Nadeau-Dubois comparaît en Cour supérieure à Québec, où il plaide non coupable à une accusation d’outrage au tribunal, parce qu’il aurait incité les étudiants à bloquer l’accès aux établissements scolaires.

30 mai: alors que les négociations se poursuivent à Québec, des concerts de casseroles sont organisés dans plusieurs villes canadiennes — «Casserole Night in Canada» — mais aussi à New York, en appui aux étudiants québécois.

31 mai: à la quatrième journée de négociations, la ministre Courchesne déclare que les discussions «sont dans une impasse».

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