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Procès Ghomeshi : les victimes en uniforme pourraient moins dénoncer

Jian Ghomeshi leaves a Toronto court after day three of his trial on Thursday, February 4, 2016. THE CANADIAN PRESS/Chris Young Photo: THE CANADIAN PRESS
Rédaction - La Presse Canadienne

Un expert en droit militaire craint que le procès hautement médiatisé de l’animateur Jian Ghomeshi puisse freiner les efforts déployés par l’armée pour éradiquer l’inconduite sexuelle dans ses rangs.

Le colonel à la retraite Michel Drapeau croit que le traitement choc reçu par les présumées victimes de M. Ghomeshi en cour fera sûrement réfléchir certaines femmes qui voudraient porter plainte — surtout celles qui arborent l’uniforme.

Des femmes qui auraient décidé de dénoncer feront probablement marche arrière en voyant ce qui se passe au procès, selon M. Drapeau.

L’une des présumées victimes de M. Ghomeshi est l’ancienne actrice Lucy DeCoutere, qui est aussi officière et agente de développement à l’Aviation royale canadienne de Halifax.

Mme DeCoutere a subi un contre-interrogatoire serré sur sa relation avec l’ancien animateur de radio de la CBC au moment où l’armée peine à convaincre les victimes d’inconduite sexuelle de déposer des plaintes à son nouveau centre d’intervention.

Le plus haut dirigeant de l’armée, le général Jonathan Vance, a signifié clairement qu’il ne tolérerait pas les comportements abusifs de toute sorte. Il a récemment annoncé que huit enquêtes disciplinaires entourant des allégations d’inconduite sexuelle au sein de l’armée avaient été lancées depuis la mise sur pied du centre.

Le général Vance a refusé de se prononcer sur l’influence que pourrait avoir le procès Ghomeshi sur les démarches de l’armée, puisque l’affaire est encore en cour.

Selon les données des Forces armées canadiennes, le centre d’intervention a reçu 206 appels téléphoniques, courriels ou messages textes et parmi ceux-ci, 99 étaient des demandes d’informations — un signe, selon M. Drapeau, que les victimes sont encore hésitantes.

M. Drapeau a expliqué que les réticences à porter plainte pour des violences sexuelles ou des comportements inappropriés étaient plus aigües chez les militaires puisqu’il y a un plus grand impact potentiel sur leur carrière que pour la population en général.

Il y a un autre argument dissuasif, selon M. Drapeau. Les membres de l’armée ne sont pas couverts par la Charte canadienne des droits des victimes, qui a été présentée par l’ancien gouvernement conservateur.

Les tribunaux militaires telles que les cours martiales sont exclues des lois canadiennes. En vertu de la Charte canadienne des droits des victimes, les victimes peuvent s’attendre à être informées du progrès de leur dossier, elles peuvent témoigner en cour et lire une “déclaration de la victime”.

M. Drapeau juge qu’il est triste et ironique que les gens allant se battre à l’étranger pour défendre les libertés soient “privés de leurs droits à la maison”.

Une porte-parole de la Défense nationale, la major Holly-Anne Brown a affirmé que le système judiciaire militaire disposait de procédures intrinsèques pour protéger les droits des victimes.

Le mois dernier, les conservateurs avaient présenté un projet de loi sur les droits des victimes au sein du système de justice militaire, mais le texte est mort au feuilleton lorsque les élections ont été déclenchées.

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