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Misère humaine et aveuglement volontaire

This image released by the International Committee for the Red Cross (ICRC) shows Syrians who were displaced with their families from eastern Aleppo gather at the collective shelter, in the village of Jibreen south of Aleppo, Syria, Monday, Dec. 12, 2016. Syria's military said Monday it has regained control of 98 percent of eastern Aleppo, as government forces close in the last remaining sliver of a rebel enclave packed with fighters as well as tens of thousands of civilians. (ICRC via AP) Photo: Croix-Rouge via The Associated Press

2016 s’achève, enfin. Pas trop tôt. Un nombre effarant d’artistes hors norme se sont éteints. Irremplaçables. Cohen, par exemple. Comme sa musique et ses mots, on le croyait immortel. Seuls les deux premiers le seront. Un autre trou, irréparable, celui-là, dans notre montréalitude. Cohen représentait la force du réconfort apolitique. Valeur inestimée et inestimable, en ces temps de chien.

Temps de chien, oui. Et je ne parle pas de la météo. Plutôt de l’état de santé de nos démocraties, de nos droits et libertés. De notre rapport à l’Autre.

Temps de chien aussi pour la recherche de la vérité, de la juste perspective. Délaissement des faits, substitués par la désinformation spectacle. Surabondance de l’opinion-minute, fondée ou non. Ère du post-truth. En plein débat présidentiel, un mensonge après l’autre. Trafficage russe des élections…américaines.

Bullshit institutionnalisée. Études pour déterminer ce qui fait craindre l’électorat. Utiliser ensuite ces mêmes «informations» à des fins partisanes. Des prétendus AK-47 en-dessous des burkinis. Informations ensuite démenties. Trop peu. Trop tard. Gargarisme de politiciens de peu de foi.

Discours anti-élite produit par les… élites. Les démagogues comme premiers bénéficiaires de ce même discours. Ceux qui, après avoir dénoncé les puissants de ce monde, bourrent le palais présidentiel de Goldman Sachs et Exxon. Un cabinet de 14 milliards…

Ceux qui, en France, en Autriche et au Royaume-Uni, inventent les invasions barbares, prônent le repli sur soi, le réétablissement de frontières déjà abolies. Paradoxe frappant : le discours sur l’identité nationale est, apparemment, partout pareil.

Et pendant ce temps? Rien. On se regarde le nombril. On s’autopromeut à coup de selfies. Photos de sushis, de martinis. La chasse aux Pokémons (frette, hein?). États généraux sur le pittbull, la patate en poudre. Sur un tchador aux allures de monstre du Loch Ness : tout le monde en parle, personne ne l’a vu.

Nos sociétés dérapent. À une vitesse vertigineuse. Et que fait la majeure partie des intellectuels? Se parler entre eux. Dans des tours d’ivoire. Moins dangereux. On refuse de participer aux émissions populaires et populistes. Déshonorant, apparemment. Vivement le doux confort de la discussion entre amis complaisants.
On a longtemps prétendu, en Allemagne nazie, qu’on ignorait le traitement réservé aux Juifs. Idem pour le Rwanda, où la population mondiale s’est dite surprise, après coup, de l’existence du génocide.

Se passent actuellement deux atrocités réelles ou anticipées: l’équipe du prochain président américain met sur pied un registre afin de ficher les musulmans. Formule similaire à 1934. Et à Alep, Russie, Iran, rebelles et un président sans vergogne s’arrachent la vie des derniers civils encore sur place.

Tout cela sous nos yeux, notre apathie. On ne pourra éventuellement plaider, en cette ère de médias sociaux, l’ignorance.

Le temps est venu, pour paraphraser Kérouac, de voir les choses sales avec des yeux clairs. De mettre fin à l’indignation de salon…

PS : Joyeuses Fêtes, très chers lecteurs et lectrices. Un véritable plaisir, voire honneur, pour moi. On se retrouve en janvier. De meilleure humeur.

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