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Les temps changent

Photo: Yves Provencher/Métro

Les personnes qui remettent en question l’ordre établi se heurtent plus souvent qu’autrement à de la résistance. À la fois saine et normale, cette résistance peut toutefois laisser un goût amer à ceux qui proposent une perspective à contre-courant et qui se butent à un solide attachement au statu quo.

Après les débats sur SLĀV et KANATA, plusieurs agitateurs ont témoigné de leur épuisement et de leur frustration face à ce qui avait toutes les allures d’un dialogue de sourds. Je ne peux qu’imaginer l’inconfort dans lequel certains d’entre eux se sont retrouvés cette année. Il y a quelque chose d’excessivement décourageant à voir sa position être caricaturée et incomprise, qui plus est quand on demande simplement à être entendu et respecté.

Mais s’il y a une chose que ma petite expérience de trouble-fête régulièrement frustrée m’a apprise, c’est que les changements finissent souvent par arriver. Rarement sur le coup. Le proverbe veut qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Je dirais plutôt que, si le changement est accepté trop facilement, c’est que ce n’était pas un vrai changement.

Des enjeux qui faisaient l’objet des résistances les plus tenaces ont fini par générer des consensus étonnants. Lors du débat sur le mariage entre conjoints de même sexe au Canada, on craignait les pires dérives – que «les gens veuillent marier leur char», pour ne citer que cet exemple. Dix ans après l’adoption de la loi autorisant deux personnes de même sexe à convoler en justes noces, 79% des Canadiens affirmaient que les gais et lesbiennes pouvaient faire d’aussi bons parents que les hétéros. On avait fait du chemin.

Au Québec, on a cette tradition qui nous permet d’en faire un véritable exercice de résilience collective et de conclure l’année en riant de nos désaccords.

Les débats entourant SLĀV et KANATA ont semblé nous diviser plus que jamais, les uns et les autres campant sur des positions en apparence inconciliables. Si le portrait qu’on pouvait dresser de la situation cet été avait été garant de l’avenir, chacun serait encore fâché dans son coin et refuserait d’écouter l’autre. Mais les idées font leur chemin.

Robert Lepage a terminé l’année en admettant ses torts et en ralliant plusieurs de ses supporters à l’idée qu’il avait peut-être fait fausse route. Un mea culpa imparfait qui donne tout de même espoir pour 2019.

Puis, les créateurs du Bye Bye auraient pu choisir de tourner en ridicule ceux qui ont soulevé des questionnements au sujet de SLĀV et de KANATA, participant à leur tour à la caricature qui domine dans l’espace médiatique. Ils ont plutôt choisi de tourner la page sur cet épisode en se moquant du manque d’écoute du metteur en scène face aux demandes légitimes des communautés noires d’êtres incluses, dans un sketch où le casting de Black Panther serait essentiellement constitué de Blancs. On voit bien que ça ne fonctionne pas.

C’est un cliché de dire que l’humour est un puissant lubrifiant social. En fait, c’est plus que ça. Au Québec, on a cette tradition qui nous permet d’en faire un véritable exercice de résilience collective et de conclure l’année en riant de nos désaccords. Ce n’est pas toujours parfait, mais quand il y a assez d’autodérision, ça donne espoir pour l’année à venir.

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