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Essayer de [mieux] faire passer la pilule

Photo: Marc-André Carignan

Pourquoi construire la plus longue terrasse publique de Montréal aux abords d’un chantier de construction aussi majeur que celui de la rue Saint-Denis?

J’avoue m’être posé la question, en juin dernier, lors du dévoilement du concept de terrasse linéaire et de banderoles suspendues qui ceintureront l’artère pendant sa chirurgie à cœur ouvert. Et à lire de nombreux commentaires sur les réseaux sociaux, je ne suis visiblement pas le seul à avoir affiché un certain scepticisme face à l’initiative, dont l’aménagement a débuté lundi. Après tout, pourquoi irait-on s’asseoir à côté des grues, de la poussière et du bruit?

Mais en discutant avec le concepteur de ce projet d’habillage de chantier, l’architecte Jean Beaudoin, j’ai rapidement réalisé que j’avais bien mal saisi ce qui allait se produire sur Saint-Denis ces deux prochaines années. Ce n’est pas seulement une terrasse qui verra le jour, mais bien une toute nouvelle école de pensée qui tente de réinventer la gestion et l’aménagement des chantiers afin de les rendre plus «sexys» aux yeux des résidants et des commerçants. La Ville ne peut tout simplement plus se permettre de paralyser des artères commerciales comme elle l’a fait dans le passé avec Saint-Laurent ou l’avenue du Parc. Les conséquences sont trop lourdes à supporter sur le plan politique et économique.

«Il faut dépasser l’idée que décorer une clôture de chantier va soudainement créer un milieu attractif [pour les passants], explique M. Beaudoin. Il faut plutôt accompagner le chantier, qui subit plusieurs métamorphoses en cours de route, pour s’assurer que son périmètre reste invitant et attractif en tout temps.»

Ainsi, sur Saint-Denis, la première étape «pré-chantier» consistera à rendre la rue plus vivante d’ici l’hiver, au moyen d’expositions, de foires, de spectacles et de la fameuse terrasse d’un kilomètre de long. L’objectif : générer un maximum d’achalandage afin de permettre aux commerçants de se constituer un fonds de subsistance.

Dès le printemps 2016, la terrasse rouge modulaire refera son apparition sur Saint-Denis. Par contre, cette dernière sera déconstruite en sections et réaménagée au fur et à mesure de l’évolution du chantier. Certaines sections conserveront leur fonction de «placotoir» à proximité des boutiques, alors que d’autres se transformeront, par exemple, en postes d’observation surélevés pour examiner les travaux. Un marquage artistique des trottoirs et du mobilier urbain viendra aussi ponctuer l’espace afin d’orienter plus aisément les passants vers les commerces du secteur.

«On a doté la Ville d’un mobilier flexible qui s’adapte à différents types de chantiers, poursuit le concepteur. […] 85% du mobilier qu’on retrouvera sur Saint-Denis sera récupéré et pourra être réutilisé à l’avenir sur d’autres chantiers. Il y a déjà des discussions avec d’autres rues.»

C’est la première fois que la Ville fait appel à un architecte pour embellir un chantier. On prend un risque, aussi calculé soit-il, en espérant que le public réponde bien à l’appel. L’administration Coderre fait l’audacieux pari que Montréal peut devenir un leader en matière de design de chantier.

Les travaux en chiffres

  • 14,4 M$ Coût des travaux sur la rue Saint-Denis
  • 2 M$ Coût pour l’habillage du chantier
  • 16 mois Durée des travaux, de septembre 2015 à décembre 2016

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