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La pandémie et la pénurie de profs nuisent aux élèves vulnérables

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Les élèves du secondaire seront de retour en classe le 18 janvier.  Photo: Oksana Kuzmina/123RF

En raison de la pandémie, les élèves montréalais qui vivent avec des troubles de santé mentale ou du comportement doivent composer avec des difficultés supplémentaires sans les ressources nécessaires pour les aider.

À Montréal, la ville qui compte le plus d’élèves vulnérables, le milieu scolaire vit une importante pénurie d’enseignants depuis des années.

Pour pallier le problème, le centre de services scolaire de Montréal (CSSDM) a réaffecté des enseignants-orthopédagogues dans les classes où il n’y a pas de titulaire.

Cela prive des centaines d’enfants vulnérables du soutien auquel ils ont droit, pourtant essentiel après des mois de confinement, déplore l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal.

Impacts pédagogiques

Karyne Beaudoin est orthopédagogue à l’école spécialisée Espace-Jeunesse, située dans l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal. Depuis la rentrée scolaire, elle a été réaffectée comme titulaire d’une classe.

«La pénurie d’enseignants était là avant la pandémie. On profite peut-être un peu de ça pour changer les règles et mettre des profs obligatoires», pense-t-elle.

Mme Beaudoin estime que la pandémie jumelée à la pénurie d’enseignants exacerbe les problèmes de ses élèves, déjà vulnérables.

«Ils commencent l’école après un confinement, en plus il y a la pandémie mondiale, puis ils arrivent et il n’y a pas de profs, dit-elle. Quelqu’un qui ne fait pas d’anxiété trouverait ça aussi stressant de savoir qu’il commence une année avec un employeur qui va surement changer.»

Après plusieurs mois de confinement, les élèves vulnérables ont accumulé un retard important, explique Karyne Beaudoin. «Les profs se ramassent avec plusieurs niveaux à enseigner sans orthopédagogue. On peut imaginer la difficulté pour les élèves de suivre. Je ne sais pas quelle génération de personnes éduquées ça va faire…», lâche-t-elle.

De son côté, la psychoéducatrice Anne Reigner note un important manque de motivation chez les élèves et les mesures sanitaires les lassent davantage. «On comprend l’importance des bulles, mais ça crée de l’isolement, dit-elle. Si tu n’as pas d’affinité avec les gens de ta classe, tant pis.»

À long terme, Anne Reigner prévoit une augmentation du taux de décrochage. «J’ai une élève qui m’a dit : « Si on est reconfinés, je lâche l’école », se rappelle-t-elle. On va voir une hausse du taux de décrochage, c’est certain, mais pas immédiatement. Ils vont décrocher dans quelques années parce qu’ils auront accumulé un retard trop important.»

On enlève les services d’orthopédagogie pour me mettre dans une classe. Au niveau pédagogique, c’est grave ce qui se passe. -Karyne Beaudoin, orthopédagogue réaffectée à l’enseignement

Impacts psychologiques

Les élèves qui avaient des suivis avec des psychologues, des travailleurs sociaux ou des psychoéducateurs n’en ont plus, indique Karyne Beaudoin. «Tout a été arrêté. C’est sûr qu’au niveau psychologique, ça a une atteinte», déclare-t-elle.

La psychologue et chercheuse de l’Université McGill, Tina Montreuil, indique que le contexte amplifie l’anxiété des jeunes plus vulnérables.

«La pandémie fait que l’environnement des élèves est encore plus stressant, mais le support et le soutien qu’ils avaient avant se voit déployé de façon différente. C’est sûr que c’est une mauvaise combinaison», ajoute-t-elle.

Tina Montreuil estime qu’il faut comprendre plus que jamais l’importance de veiller aux besoins socio-affectifs des enfants. Il y a un danger de se concentrer seulement sur la décontamination et la réussite scolaire des élèves, pense la docteure.

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