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Chosen Family: la belle famille de Tranna et Thomas

Photo: Josie Desmarais / Métro

«La vie est trop courte pour la passer entouré de gens que l’on déteste.» Suivant cette philosophie, Tranna Wintour et Thomas Leblanc ont décidé de vivre la leur environnés de personnes allumées, sensibles, passionnées, informées. Comme elle et lui le sont aussi. Bienvenue dans leur famille choisie.

Le début de leur amitié ressemble à l’amorce d’une anecdote de stand-up. Ce soir-là, comme à presque chacun de ses spectacles, Tranna Wintour a sondé son public dans une salle de Montréal. Et comme à son habitude, elle lui a demandé : «Quelle est votre diva préférée?»

Assis dans la salle, Thomas Leblanc a répondu «Céline». Sans hésitation. Consternation totale et grimace à peine retenue de Tranna. Céline? Vraiment? T’es sûr? Oui. Vraiment. Je le suis.

Depuis cette soirée où le destin les a unis dans leur désaccord face à la diva de Charlemagne, les comparses ont découvert à quel point ils étaient «différents et complémentaires». Équation idéale pour générer des idées.

La dernière en date? Chosen Family. Une émission bilingue en baladodiffusion qui sera composée de 15 épisodes en tout – 10 avant Noël, 5 après –, produite par le Centre Phi et enregistrée dans un studio feutré sis en son antre. Thomas et Tranna sont d’emblée d’accord : leur philosophie va de pair avec celle de l’institution artistique novatrice du Vieux-Montréal.

«Faire rire, c’est magique. Mais ce n’est pas assez. Il faut aussi partager. Partager qui nous sommes. Notre vision du monde.» – Tranna Wintour

«C’est un bon match. C’est très naturel et organique, remarque de son beau français chantant Tranna avant de se tourner vers Thomas : «Is that a word in French, “organique”?» Oui, oui, la rassure son ami.

Entre Thomas et Tranna aussi le match est parfait. Lui est journaliste, et depuis peu, en parallèle, humoriste. Comme elle. Sauf qu’elle déteste le mot. Tranna préfère «comédienne». Son comparse la nomme «superstar». On la qualifie de «vraiment cool».

C’est d’ailleurs elle qui a encouragé Thomas, qui a longtemps été rédacteur en chef du magazine Nightlife, et qu’on entend au micro de Plus on est de fous, plus on lit!, à prendre un autre micro. Celui, ouvert, des comedy clubs.

Il n’a pas commencé en empruntant la voie facile. Sa première expérience? C’était en 2015. À Brooklyn. Un lundi soir. Durant ce qu’on appelle un bucket open mic. Soit lorsque les noms des intéressés sont pigés au hasard. Celui de Thomas est sorti en tout dernier. «J’ai fait mes blagues devant les quatre dudes qui restaient, se souvient-il. Les organisateurs.»

En revenant dans la métropole, il a lui-même décidé d’organiser un show hommage à sa diva préférée. Céline Dion, donc. Sainte Céline. Il a approché Tranna pour concocter un numéro. Finalement, l’artiste trans a collaboré avec lui pour tout le show. Le déclic a été tel qu’ils ont ensuite rendu hommage à Mariah Carey. Puis à la splendeur des années 1990.

Tout en gardant ce côté pop et, bien sûr, les références à Madonna (un élément clé de leur premier épisode – et de leur vie), le duo souhaite désormais, dans son podcast aux accents humoristiques, toucher à davantage de sujets politiques.

Surtout que le climat est, entre guillemets, «parfait» pour aborder de tels sujets. Tristement «parfait». Et parce que T&T (dynamite) ont toujours eu, de toute façon, une dimension engagée. «On ne crée pas en partant du vide. On est au courant de ce qui se passe dans le monde. Et en ces temps durs, la joie est une chose rebelle», remarque Tranna de façon poétique.

Ainsi, ajoute-t-elle, leur public, Thomas et elle partagent le même désir. Celui d’un monde meilleur. «Le temps d’un spectacle comme d’une émission, on a la sensation d’une utopie. Même si c’est éphémère.»

Les invités choisis pour participer au podcast représenteront-ils cette joie rebelle? «En fait, répond sans ambages Thomas, le critère principal, c’est : est-ce que j’ai vraiment envie de leur parler pendant une demi-heure et que ce soit vivant, étonnant et le fun?»

Et seront-ce des gens, certes, étonnants et le fun, mais avec qui ils seront aussi foncièrement d’accord? Pas forcément. Plutôt des gens «qui se battent pour que ça aille mieux. Qui sont ouverts même s’ils ont des idées fixes. Qui savent qu’une divergence d’opinions n’est pas une attaque», précise Tranna avant d’ajouter : «J’adore avoir tort. J’adore apprendre à voir les choses de manière différente.»

Certaines entrevues seront préenregistrées, comme celle, cette semaine, avec l’humoriste américaine Jen Kirkman. Mais idéalement, ils visent le direct. Un incontournable quand Christiane Charette (avec laquelle Thomas a travaillé lorsqu’il était recherchiste pour 125, Marie-Anne) viendra faire un tour dans leur studio.

Inspirée par des «stars old school plus grandes que nature» comme Barbra Streisand et Bette Midler, Tranna croit que c’est en partant, et en parlant de soi, qu’on arrive à toucher le plus, le mieux. Et, bien sûr, à faire rire. «Je ne suis vraiment pas intéressée à connaître la dernière expérience de vol avec American Airlines d’un humoriste. On le sait. Prendre l’avion et voyager en bus, c’est nul. Il n’y a vraiment rien de nouveau à dire.»

Ils préfèrent mettre de l’avant ce que disent les humoristes locaux de ce qu’ils nomment leur communauté. Comme DJ Mausner, Travis Cannon et Crystal Slippers, «une drag queen incroyable!».

Parce qu’ils souhaitent rire. Entre eux, d’eux, d’eux-mêmes. «Peut-être qu’on va se faire des surprises, lance Thomas à son amie. Même si je sais que tu n’aimes pas ça.» «C’est pas vrai!»

Ce qui est vrai, par contre : Tranna est une «queen des médias sociaux» qui adore la création. Et Thomas, lui, excelle dans la production, l’organisation. Ils sont unis, toutefois, par plein de choses. Notamment par leur fierté de participer à l’émergence d’une nouvelle communauté du stand-up. Soit «une scène alternative queer qui n’exclut personne».

«Parfois, les gens me disent : tu prêches pour ta paroisse, remarque Tranna. Et je réponds oui, et puis? Pourquoi devrais-je passer du temps à me préparer et à jouer dans un lieu où je ne suis pas appréciée, et où personne ne me comprend? C’est tellement épuisant.» Entourée de sa Chosen Family, les choses sont différentes, dit-elle. «Il n’y a rien de comparable au fait de partager mon art avec ceux que j’aime, ceux qui m’inspirent.» Dont vous?

Infos

Chosen Family

Soirée de lancement samedi au Centre Phi à 21 h avec Ghost Love

Pour écouter le premier épisode

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