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Une héroïne moderne

Photo: Laurent Guerin/Les films Séville

Après Maurice Richard et Louis Cyr, une autre figure emblématique de notre Histoire 
prend le chemin du cinéma. Très attendue, La Bolduc en fera danser plus d’un, 
tout en éclairant les spectateurs sur la société d’hier et d’aujourd’hui.

On ressort sa musique durant le temps des Fêtes depuis des générations, oubliant trop souvent qui était réellement la célèbre Mary Travers, alias la Bolduc.

«C’est une héroïne moderne, rappelle en entrevue l’actrice Debbie Lynch-White, qui a perdu 50 lb et s’est exercée pendant deux ans pour maîtriser l’art de l’archet, de l’harmonica et de la turlute et ainsi mieux se glisser dans la peau de ce personnage plus grand que nature. Elle a défoncé des portes sans connaître l’impact qu’elle aurait, elle a été féministe par la bande.»

C’est un portrait plein de contradictions qui est proposé dans ce divertissant long métrage de 5,7 M$, réalisé par François Bouvier (Paul à Québec) et scénarisé par Frédéric Ouellet (Grande Ourse).

Celle qui chantait sa réalité et commentait l’actualité comme une blogueuse avant son temps était une mère de famille issue d’un milieu populaire, rangée derrière son mari et l’Église, et qui, par des circonstances exceptionnelles, est devenue une vedette dans la période sombre et difficile économiquement des années 1930.

«Elle est coincée entre une pensée moderne et les valeurs de l’époque, auxquelles elle croit aussi, note la comédienne, dont la carrière risque d’être marquée à jamais par ce rôle. Elle voyait le plaisir qu’elle éprouvait en musique, en spectacle. Je pense qu’elle a été déchirée entre ce qu’elle voulait faire et ce que le clergé disait qu’elle devait faire, ce que les femmes autour d’elle faisaient toutes.»

«La Bolduc a pavé la voie au peuple. Elle a donné espoir et courage aux gens. Je pense que ce sont des valeurs qu’on doit toujours se rappeler dans la vie. Même si ce n’est pas facile, il faut toujours continuer, il faut être dans l’action. Au lieu de se poser 
400 000 questions, faisons les choses.» 
–Debbie Lynch-White, qui prête ses traits à cette mythique icône

«Tant que je ne serai pas dans ma tombe, 
ma femme ne travaillera pas»
Homme de son temps, Édouard Bolduc (Émile Proulx-Cloutier) n’accepte pas de se faire vivre par son épouse. Même s’il n’a pas le choix. Le personnage personnifie le patriarcat, une figure immuable qui finit par perdre ses repères.

«Il ne comprend pas ce qui lui arrive et il n’y a personne autour de lui à qui il puisse se référer, note celui qui l’incarne. Il vit ça 20 ou 30 ans avant le reste du Québec. Il doit trouver une nouvelle façon d’exister et il ne sait pas comment faire. Il y a ça de façon ponctuelle dans l’histoire de l’humanité. On l’a vu récemment, avec ce qui s’est passé cet automne (les retombées de l’affaire Weinstein). Il y a beaucoup d’hommes qui se disent : “Comment ça marche, maintenant, les rapports hommes-femmes dans la relation de séduction? Qu’est-ce que je peux faire et qu’est-ce que je ne peux plus faire?” Il faut que tu revoies ta façon d’être au monde.»

Demain, c’est maintenant
Une des filles Bolduc, Denise (Rose-Marie Perreault), est évidemment ici la métaphore de l’avenir : cette transmission et cette filiation qui doivent avoir lieu pour que des changements de mentalité surviennent.

«Mary Travers a fait une petite partie du chemin, sa fille aussi, puis Thérèse Casgrain et les autres… révèle son interprète, vue récemment au cinéma dans Les faux tatouages. C’est comme un passage de flambeau. Le féminisme se fait lentement. Il y a du travail qui a été fait, mais il en reste encore beaucoup à faire. Par exemple, on ne gagne pas les mêmes salaires que les hommes. Des films comme celui-là, ce n’est pas du tout la fin d’un combat. Il faut qu’on continue.»

Mouvement

La liberté à tout prix

En apparence, La Bolduc est un biopic sage et classique, plus près de Ma vie en cinémascope 
que de Nelly ou Dédé à travers les brumes. La 
caméra, souvent mobile, s’apparente toutefois aux rêves d’émancipation de certains de ces êtres qui cherchent à fuir la pauvreté et le climat conservateur de leur époque. «Il y avait, dans la mise en scène, un désir de rendre libres les personnages, assure le cinéaste François Bouvier. Personne ne peut empêcher l’héroïne de bouger. Le film suit la Bolduc, partout. Le mouvement faisait partie de notre langue de tournage.»

Un peu d’info

La Bolduc
À l’affiche vendredi prochain

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