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Les envies de Socalled

Photo: Patrick Sicotte/Métro

L’inclassable Socalled est de retour avec ces deux derniers projets : un album de musique traditionnelle yiddish et… son premier film érotique gai. Rencontre avec un créateur qui ne connaît pas de limites.

«Je n’ai aucune idée comment tu vas faire pour présenter côte à côté ces deux projets!» Attablé dans un café du Mile End, Josh Doglin, alias Socalled, rigole ferme en se demandant comment le représentant de Métro va établir un lien entre ses deux œuvres diamétralement opposées.

L’éclectisme est pourtant la carte de visite du personnage. C’est en mélangeant rap, funk, pop et klezmer, la musique traditionnelle des Juifs d’Europe de l’Est, que le Montréalais s’est fait connaître un peu partout dans le monde.

Depuis ses débuts sur disque en 2003, Socalled a inventé presque à lui seul un nouveau style de musique, le klezmer hip-hop, a tourné aux côtés d’Yves Lambert (ex-Bottine Souriante) réalisé un disque du légendaire Enrico Macias, monté plusieurs comédies musicales, dont certaines avec des marionnettes en peluche qu’ils fabriquent lui-même. Tout ça et encore plus!

«Ma vie est pleine de contradictions et ma personnalité est faite de plusieurs éléments, reconnaît l’artiste de 41 ans. Je suis aussi un marionnettiste, un magicien, un écrivain, un cinéaste. Je fais du hip-hop, mais j’écris aussi des comédies musicales. Je rappe et j’écris de la poésie. Je fais plein de choses différentes.»

Commençons donc par le disque, Di Frosh (La grenouille), nouvel album qui revisite ses morceaux préférés du répertoire yiddish.

«On peut dire que c’est l’album du retour aux sources. Mais ce fut un long parcours pour revenir à la source.»

«Mon intérêt pour la culture yiddish est né en collectionnant les vinyles pour mes créations hip-hop. Au début, c’était pour échantillonner les mélodies et les rythmiques des vieux disques yiddish. Après une vingtaine d’années de recherche, je suis maintenant intéressé par la musique pure. Dans mes albums précédents, j’ai essayé de faire quelque chose de nouveau en utilisant des mélanges, la fusion des cultures, les ordinateurs et les nouvelles techniques de création. Pour cet album, j’ai laissé tomber les artifices pour explorer les vraies sources.»

Socalled opte donc pour une instrumentation plus classique en compagnie du Kaiser Quartett, quatuor à cordes d’Hambourg qui a notamment travaillé avec Chilly Gonzales, un autre iconoclaste.

«C’est la chose la plus folle que j’ai jamais faite. Écrire des arrangements yiddish pour un quatuor 
à cordes, c’est fou; mais ça, c’est encore pire.» – Le chanteur et musicien Socalled, à propos du tournage de son film érotique The 
Housesitter, qui sera présenté au cinéma L’Amour dans le cadre du festival Pop Montréal.

«C’est intéressant de faire jouer des chansons yiddish à un quatuor allemand! blague le compositeur d’origine juive. C’est nouveau, même si c’est de la vieille musique. J’ai transformé des arrangements pour piano des années 1920-1930 en partitions pour quatuor à cordes. Personne n’avait jamais entendu cette version avant. On a découvert ce nouveau son ensemble.»

Un moyen de faire revivre un univers qu’il chérit depuis longtemps.

«La source de la culture yiddish s’est tarie avec la Shoah, le meurtre de la population juive d’Europe de l’Est durant la Deuxième Guerre mondiale. Après ça, les Juifs d’Amérique du Nord ont dû laisser tomber leur histoire pour pouvoir avancer. Ils ont arrêté de parler yiddish, sauf les hassidim. Il y a une rupture d’une génération.»

«C’était pourtant une grande culture, avec une musique propre, du théâtre, des centaines de journaux, du cinéma, des émissions de radio et des grands compositeurs comme Leo Fuld, Abraham Ellstein, Shalom Secunda. Personne ne connaît plus ces noms. Cet album, c’est une super occasion d’en parler et de les faire connaître. C’est la même technique que lorsque j’utilisais des samples dans mes chansons hip-hop pour accrocher les gens et susciter leur intérêt.»

Et The Housesitter (le nom de son film XXX) dans tout ça? «C’est un autre projet basé sur mes intérêts et sur ma volonté d’étendre mes horizons en tant qu’artiste, explique candidement Socalled. Je voulais faire un film érotique avec une volonté artistique.»

Présenté par Pop Montréal comme un «Call Me by Your Name avec plus d’action», le film «queérotique» décrit la rencontre de deux hommes dans une maison de campagne (la maison des parents de Josh en fait).

«Sex is beautiful. L’érotisme est quelque chose de naturel et de fondamental, ça ne devrait pas être violent ou exploitable. La porno commerciale, c’est souvent laid. C’est fait uniquement pour l’argent. Ce n’est pas le cas de mon film. J’essaie de trouver la beauté dans le sexe.»

«C’était difficile, mais fascinant. Garder les gens à l’aise sur le plateau, capturer la chimie entre les acteurs, c’était un défi intéressant et différent de tout ce que j’avais fait avant», raconte Socalled, qui compte poursuivre l’aventure cinématographique.

«Pour moi, tout converge vers le cinéma. Je veux explorer toutes les façons possibles de raconter une histoire. Mais mon prochain film ne sera pas un porno!»

Di Frosh
Disponible le 21 septembre
Socalled Porn’s Pop: le 
27 septembre au Cinéma L’Amour (4015, boulevard Saint-Laurent)

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