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Assassination Nation: Chasse aux sorcières

Photo: Entract Films

Véritable décharge électrique, Assassination Nation de Sam Levinson plonge tête première dans les maux qui grugent l’Amérique.

Impossible de ressortir indemne de ce brûlot ravageur, prisme haut en couleur de l’ère ambiante.

«C’est un reflet de notre civilisation éclatée, où les notions de communication et de vérité sont fracturées», explique en entrevue Sam Levinson, qui a écrit le scénario dans la nervosité et l’anxiété de son futur rôle de père.

Le récit se déroule dans une petite communauté comme les autres, à une époque régie par les médias sociaux. C’est d’autant plus vrai à l’adolescence, où un seul courriel lancé par inadvertance, ennui ou franche rigolade peut détruire la réputation du maire ou du directeur d’école.

«Peu importe ce qui arrive, si on change pour le mieux, il y a toujours cette épée de Damoclès archivée quelque part, qui nous menace à chaque moment, précise celui qui avait réalisé Another Happy Day en 2010. Et ça, c’est une situation insoutenable.»

«Mon film est comme un test de Rorschach. Les gens y verront ce qu’ils veulent.» -Sam Levinson, réalisateur

Un groupe d’amies l’apprend à ses dépens alors qu’une lycéenne devient le souffre-douleur de son entourage. Ce qui pouvait rappeler le récent et excellent Eighth Grade de Bo Burnham en plus tragique se transforme en véritable cauchemar horrifique. Une sorte de Purge revue et corrigée par Quentin Tarantino, qui donne enfin à des femmes solidaires le pouvoir de s’affranchir.

Il ne faut toutefois pas croire que le fils du réputé réalisateur Barry Levinson (Rain Man, Wag the Dog) ait voulu engendrer une œuvre politique.

«Ce sont les êtres humains qui m’intéressent d’abord et avant tout, confie-t-il. Mais j’avoue que je ne suis pas indifférent aux discours, aux idéologies. Et si le véritable vilain du film était la supposée vertu? Ces gens qui croient avec une certitude absolue qu’ils ont raison et que leurs actions sont justes?»

Assassination Nation ne fourmille pas seulement d’idées et de thèmes forts. Sa mise en scène incendiaire ne manque pas de happer le cinéphile par sa violence et sa virtuosité, fondant à la même enseigne les prouesses techniques d’un Godard et d’un De Palma, notamment pour exprimer la solitude grâce à la force de ses images et de son montage.

«Je fais un cocktail Molotov avec toutes les attentes que le public peut avoir au sujet d’une histoire classique», admet le cinéaste en riant.

Cette satire bien noire a beau flirter avec la provocation à la Gaspar Noé ou à la Harmony Korine, la déflagration n’en crée pas moins un malaise.

«C’est vrai que c’est parfois difficile à regarder, concède Sam Levinson. Je voulais créer quelque chose d’émotionnellement cathartique pour le spectateur. Certains vont aimer, d’autres vont détester, et c’est normal. C’est un film fait pour susciter des réactions. Et les conversations qui en ressortiront seront certainement plus empathiques que celles qu’on a eues dernièrement en Amérique.»

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