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Le roi est mort, vive les drag kings !

Rock Bière et RV Métal
Rock Bière et RV Métal Photo: Caroline Method/Collaboration spéciale

Il sent l’eau de Cologne et il aime les bagues, les bandanas, Éric Lapointe et le cuir. Il s’appelle Rock Bière…et il est incarné par une femme. Bienvenue dans l’univers méconnu des drag kings.

Rock Bière est en fait Mélodie Noël-Rousseau, comédienne qui s’est lancée dans l’aventure de la drag un peu par défi.

Maquilleuse hors pair, championne de synchro (lipsync) à l’adolescence, elle avait tout ce qu’il faut pour être une drag king, aux dires de sa copine, l’actrice et metteuse en scène Geneviève Labelle.

Celle-ci avait visiblement raison, puisque Mélodie est devenue l’hiver dernier la première drag king à gagner le concours Drag-moi, du Cabaret Mado.

«Comme comédienne, j’ai toujours eu le défi d’incarner des personnages qui sont loin de moi. J’ai eu davantage à me transformer plutôt qu’à jouer les jeunes premières. J’aime ça, jouer les bibittes!» avoue en riant Mélodie Noël-Rousseau.

«Bibitte» pourrait justement être un bon qualificatif pour Rock, archétype du mâle fait de cuir et de sueur qui semble prêt à soulever la Terre lorsqu’il monte sur scène.

«Je dis souvent que c’est un parfum cheap, explique son interprète. Il sent le char neuf; il est un peu maladroit, mais très viril. C’est un petit concentré de testostérone.»

Côté musique, Rock Bière a un gros faible pour les classiques du «rrrrock» québécois: Gerry Boulet, Paul Piché et, bien sûr, Éric Lapointe, à qui il a rendu hommage lors du désopilant spectacle Petit cuir, présenté au dernier Zoofest.

«En tant que kings, on est chanceuses, parce qu’on a tout un répertoire de musique masculine qui n’est pas exploitée, souligne Mélodie. C’est l’fun d’aller dans le rock quétaine; c’est un répertoire moins entendu sur la scène pop ou chez Mado.»

Si les drag queens sont reconnues pour leur flamboyance et leur extravagance, leurs confrères drag kings ne sont pas en reste.

«Chaque drag king a sa personnalité, souligne Geneviève Labelle, qui monte également sur scène sous le pseudonyme de RV Métal. Quelqu’un comme Charli Deville va plus dans les paillettes, alors que Rock Bière va plus dans le cuir, les bagues, les chaînes… Je pense qu’on peut trouver l’extravagance là-dedans. C’est sûr que c’est n’est pas Cher ou Lady Gaga, mais je pense qu’il y a moyen de pousser dans cette direction.»

Mélodie Noël Rousseau et Geneviève Labelle présentent le spectacle ROCK BIÈRE: Le documentaire, dans le cadre du festival ZH. / Josie Desmarais

Trouver sa place

En plus de faire tranquillement sa place dans le milieu de la drag et de l’humour, Rock Bière a maintenant droit à son propre spectacle, qui sera présenté à l’occasion du ZH Festival.

À mi-chemin entre le théâtre, la musicographie et le spectacle de drag queens, Rock Bière : le documentaire raconte avec beaucoup d’humour la naissance de Rock et son évolution, mais parle
aussi de la place des femmes dans le milieu de la drag.

Un milieu où, ironiquement, les femmes sont encore très rares.

En fait, ils ne sont qu’une poignée – on pourrait les compter sur les doigts d’une main – à partager la scène avec leurs consœurs drag queens, nettement plus nombreuses et plus connues du grand public.

«La place des drag kings dans la communauté drag est représentative de la place des femmes dans la société, estime Geneviève Labelle. C’est un microcosme de la vie.»

«Il y a encore des réticences [à l’arrivée des drag kings], soutient Mélodie Noël-Rousseau. Mais c’est plus caractéristique de l’ancienne école. La nouvelle école est très éclatée. Surtout la scène queer, plus anglo, qui ne catégorise même plus entre garçon ou fille.»

«La première fois que je me suis pointée au Mado, j’étais complètement intimidée. Je ne savais pas si j’étais la bienvenue. Je sentais que le Village était plus masculin. Je me suis demandé si moi, en tant que femme, j’avais le droit d’être sur scène. Finalement, j’ai eu un accueil plein d’amour. Maintenant, je suis vraiment bien dans ce milieu. Les performeuses qu’on est ont aussi été acceptées par le milieu.»

Fierté Montréal a d’ailleurs invité plusieurs rois de la drag à prendre part à son grand spectacle Illusion (où Rock Bière nous promet un grand numéro de ballon chasseur «très divertissant avec des grosses tounes de sport»), en plus d’inclure dans sa programmation ManSpread, un rendez-vous mensuel mettant en vedette uniquement des drag kings.

«Ici, à Montréal, on est prêts à avoir des kings. Je sens qu’il y a un bel accueil des drag kings, parce qu’on vient combler un vide, affirme Mélodie Noël-Rousseau. C’est à chacune d’entre nous de faire rayonner cet univers et montrer que ça existe.»

 

Illusion : le 10 août 2019 à 20h au parc des Faubourgs

Rock Brière, le documentaire : le 17 août 2019 à 21h30 à la maison de la culture Maisonneuve

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