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La fiction comme remède à l’angoisse

La fiction comme remède à l’angoisse
La série québécoise «C'est comme ça que je t'aime» Photo: Collaboration spéciale Radio-Canada

On dit souvent que la réalité dépasse la fiction. Jamais l’adage n’aura été aussi vrai qu’en ces temps de pandémie, où l’actualité surpasse en gravité tout ce qui aurait pu sortir du cerveau des plus grands scénaristes hollywoodiens. Pourtant, la fiction pourrait bien nous aider à affronter la réalité de la COVID-19.

Qu’elle soit littéraire, cinématographique, télévisuelle, ou toute personnelle, la fiction est plus utile que jamais pour conserver une bonne santé mentale lorsqu’on est confiné entre quatre murs.

Au-delà du simple divertissement qu’elle procure, l’imagination permet de détendre le corps et l’esprit de ceux et celles qui sont préoccupés par le coronavirus.

Métro en a discuté avec Dre Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec.

En temps normal, quel rôle jouent le divertissement et la fiction dans une bonne santé mentale?

Un être humain a besoin d’alterner entre les périodes de stimulation intellectuelle, d’activité physique et de détente, chacune ayant ses vertus. La période de détente, particulièrement si elle nous fait rire et nous divertit, permet de sécréter la sérotonine, un neurotransmetteur qu’on qualifie de molécule du bonheur.

Quand on se détend et qu’on s’amuse, nos hormones de stress diminuent et nos hormones de bonheur augmentent. C’est bon pour la santé mentale en général.

Et en temps de crise?

La fiction, que ce soit dans l’art ou les scénarios imaginaires qu’on se crée (la fantasmatique) nous permet de réaliser toutes sortes de choses qu’on ne peut pas réaliser dans la réalité. Ça nous donne une liberté qu’on n’a pas et ça nous permet et d’explorer des chemins qu’on ne peut pas explorer dans la vraie vie.

Si vous êtes confiné dans une cellule de prison, que vous n’avez rien autour de vous, mais que vous avez votre imaginaire et votre fantasmatique, vous avez des soupapes et des exutoires que d’autres n’auront pas.

«Je fais l’apologie de l’exutoire, autant pour l’esprit que pour le corps. Quand vous travaillez fort physiquement, vous avez besoin de récupérer. C’est la même chose pour le cerveau.» Dre Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec

Quand on est confiné, les exutoires, il y a en moins. On ne peut pas aller au gym, au théâtre ou au cinéma.

Les exutoires, on les trouve dans notre propre environnement: les séries télé, les documentaires, les bons livres. Dans chacun d’entre eux, il va y avoir une portion stimulante pour notre intellect, mais nous avons aussi besoin de ce moment de détente pour notre organisme.

Les œuvres qui évoquent un contexte semblable au nôtre comme La peste d’Albert Camus ou Contagion, de Steven Soderbergh,  ont aussi la cote. Pourquoi?

Je l’explique par notre tendance naturelle à vouloir rechercher des solutions. La pandémie qu’on traverse est une situation qu’on n’a jamais vécue et qui ne ressemble à rien de ce qu’on pensait vivre dans nos vies. On n’a pas de comparatif, pas de paramètres ou de précédents auxquels se référer sauf dans ce genre d’œuvres catastrophistes.

C’est une façon de s’accrocher à quelque chose pour envisager qu’elles sont les résolutions possibles.

Pourtant, vous le déconseillez grandement?

Vaut beaucoup mieux privilégier des œuvres qui nous permettent de nous détendre ou de nous évader, davantage que des œuvres qui vont augmenter notre niveau de stress. Il y a des études qui le prouvent: si vous regardez seulement des films ou des séries documentaires catastrophes, ça va finir par avoir un effet déprimant sur le cerveau. Parce que le cerveau n’encode que ça et sécrète des hormones de stress en réponse. 

De la même façon, il ne faut pas s’exposer aux informations sur la COVID 24h sur 24h. Une heure par jour, c’est assez. Le reste du temps, essayer de faire autre chose. Il est important d’être bien informé pour se protéger comme il faut, mais le reste du temps, il faut essayer de se détendre.

Et qu’en est-il de ceux, comme les travailleurs de la santé, qui sont constamment exposés aux mauvaises nouvelles?

C’est seulement en ayant une vie équilibrée et des exutoires qu’on s’en sort: des activités physiques, culturelles, de détente et une bonne vie de famille. On peut voir apparaître une fatigue ou des traumatismes chez ceux qui sont à 100% dans des métiers d’urgence ou de relation d’aide.

Malgré tout, il faut être capable de trouver des exutoires nécessaires à la santé psychologique. Ils permettent de prendre du recul et de rappeler au cerveau que la réalité n’est pas constituée que de la crise.

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