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L’«Autoportrait» d’Hugues Aufray

Hugues Aufray
Hugues Aufray en 2010 Photo: Francois Durand/Getty Images

«Je n’ai pas encore fait tout ce que je voulais»: à 90 ans – 91 en août – Hugues Aufray revient avec un nouvel album, Autoportrait, de l’énergie et des projets à revendre.

Avec Hugues Aufray, l’interview devient tourbillon. L’homme à la crinière argentée ne tient pas en place dans le salon de sa maison des Yvelines. Il se lève et prend la posture de Bob Dylan quand on lui a remis la légion d’honneur – Aufray est une des rares personnes que Dylan a salué dans l’assistance ce jour-là racontent les témoins – ou montre comment l’interprète de Like A Rolling Stone fait pencher son pied de micro sur scène.

L’entretien – généreux – terminé, il ramène le journaliste à la gare dans une Jeep datant du débarquement en Normandie en 1944, sous le regard éberlué des passants.

Le rencontrer, c’est toucher un pan d’histoire de la musique française – Hugues Aufray a signé Le Pénitencier pour Johnny Hallyday d’après la version d’House Of The Rising Sun des Animals – et américaine. Il y a Dylan, donc, qu’il connaît bien et dont il a adapté en français les chansons.

«Certains disaient « Aufray fait n’importe quoi avec les textes de Dylan » (rires). Mais la poésie ça se transmet, ça ne se traduit pas, la poésie est insaisissable», insiste-t-il, malicieux, auprès de l’AFP.

Caisse de vin

Outre un Prix Nobel de Littérature (Dylan), il a aussi rencontré un Prix Nobel de la Paix, Martin Luther King, avec qui il avait participé à un concert-évènement, dont il montre l’affiche.

«Quand j’étais jeune, j’étais allé à Harlem, on m’avait mis en garde, « tu es blanc, tu vas te faire casser la gueule ». Mais ce n’est jamais arrivé (rires)», raconte-t-il. La dernière chanson d’Autoportrait – «Y’a un homme qui rôde et qui prend des noms» – dénonce d’ailleurs le racisme, sur fond d’Amérique profonde gangrénée par le Ku Klux Klan.

Disponible vendredi, Autoportrait (Universal), avec ses titres folk et blues made in USA réinterprétés, est à l’image d’Hugues Aufray, débordant de vie et de ressources.

Jean-Baptiste Mondino devait réaliser la pochette. Mais le confinement a rebattu les cartes. La couverture, c’est finalement un autoportrait peint par l’artiste en 1999.

«Je suis un intermittent de la peinture», s’amuse-t-il. L’œuvre est au dos d’un panneau de caisse de vin, fendillé au milieu, ce qui confère un petit côté surréaliste. «Ça s’est décidé comme ça, mais ce n’est évidemment pas pour faire comme Dylan (rires)». Le «Zim» avait sorti Self Portrait en 1970, avec son visage peint par lui même. Aufray est aussi fan de comics, en témoigne son grand tableau inspiré du «Fantôme», justicier masqué apparu dans les années 1930.

Abbey Road

À cause du confinement toujours, la chorale d’enfants prévue pour la chanson Sur Les Péniches De L’Erie Canal n’est pas là. Pas grave. La voix enfantine qu’on entend est celle de son arrière-petite fille de 8 ans, «enregistrée au téléphone».

Avant la pandémie, il a retravaillé Stewball, un de ses standards, dans le prestigieux studio d’Abbey Road, entré dans la légende avec les Beatles. Avec Michael Jones qui l’accompagne. «On a eu la visite de Jean-Jacques (Goldman, dont Jones est un des fidèles). Je l’avais connu à ses débuts. Jean-Jacques m’avait dit avoir appris le picking (technique de guitare) grâce à moi, pratique que j’avais ramenée des États-Unis. Je ne l’avais quasiment pas revu depuis. Jean-Jacques, j’aime beaucoup ce garçon, son comportement, sa vie, comment il mène sa carrière».

Puis l’interprète de Santiano se met au piano – jouant un futur morceau qu’il demande de ne pas dévoiler – avant de nous entraîner à l’étage pour écouter la maquette d’un autre titre, là encore confidentiel. Preuve qu’il a encore le temps pour d’autres aventures.

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