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Commission Charbonneau: un comité aura le gouvernement à l’oeil

Photo: Josie Desmarais

Inquiets de voir que le gouvernement tarde à donner suite aux recommandations contenues dans le rapport de la Commission Charbonneau, un comité d’experts, agissant à titre de citoyens, a formé le «comité public de suivi» qui se donne le mandat de surveiller la mise en oeuvre des recommandations contenus dans le rapport.

Contactée par d’anciens employés de la Commission Charbonneau qui craignaient de voir le rapport tabletté, la Ligue d’action civique a alors coordonné la création d’un comité d’experts. Ce comité déposera un rapport tous les six mois, et «aussi longtemps que requis», pour faire le point sur l’avancement du travail du gouvernement, des municipalités et des différentes organisations quant à l’application des 60 recommandations du rapport. Tout cela, sans aucun lien ou demande du gouvernement, précise-t-on. Le premier rapport sera rendu le 24 novembre, anniversaire du dépôt du rapport Charbonneau.

«Ce comité, c’est un geste d’appropriation du rapport par les citoyens», a indiqué Denis Saint-Martin, professeur en science politique à l’Université de Montréal, et membre du comité de suivi.

«On ne peut pas garantir qu’on sera écouté, mais c’est une pression qui est mise, a poursuivi Luc Bégin, professeur à l’Université Laval, directeur de l’Institut d’éthique appliqué et également membre du comité de suivi. On lance le message que ces questions sont prises au sérieux par la société civile et maintenir la pression c’est la seule chose qu’on puisse faire.»

Le comité public est composé à ce jour de:

  • Luc Bégin, professeur à l’Université Laval, directeur de l’Institut d’éthique appliqué
  • Peter Dent, partenaire chez Deloitte, président de Transparency International Canada
  • Gilles Ouimet, ancien bâtonnier du Québec et ancien député du PLQ
  • Denis Saint-Martin, professeur à l’Université de Montréal
  • Paul Saint-Pierre Plamondon, avocat, essayiste et chroniqueur
  • Peter Trent, maire de Westmount
  • Martine Valois, professeure à l’Université de Montréal en droit

«À plusieurs reprises on a vu des commissions d’enquête au Québec qui n’ont pas donné les changements nécessaires. On doit s’étonner du peu d’empressement des élus à donner suite à ces recommandations. À défaut, je pense que la société civile peut faire ce travail», estime Paul Saint-Pierre Plamondon, qui souligne le «flou artistique» qu’a créé le gouvernement quant au suivi des recommandations.

Selon la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, une dizaine de recommandations du rapport ont été mise à exécution, «mais elle n’est pas capable de nommer lesquelles, précise Martine Valois, et je crois qu’il s’agit essentiellement de mesures créées avant le dépôt du rapport».

«Le gouvernement dit qu’il étudie actuellement les recommandations, alors on peut se demander dans combien d’année cette étude va se terminer», souligne Mme Valois, qui insiste sur l’importance de la création d’une autorité des marchés publics, l’une des recommandations du rapport, pour dépolitiser le processus d’octroi des contrats publics.

Le gouvernement doit cesser de simplement dire que les problèmes de corruption, «c’était hier, on a tourné la page», insiste M. Saint-Martin. «Il faut que [la vérification d’absence de corruption], ça devienne comme l’évaluation environnementale des politiques publiques, il faut que ça devienne un réflexe», dit-il.

À Québec, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a vu une bonne nouvelle dans cette préoccupation citoyenne envers le suivi à donner au rapport de la Commission Charbonneau. «Voir des citoyens qui s’investissent dans une démarche comme celle-là, c’est sain”, a-t-elle opiné. La ministre a fait valoir que “80 pour cent des recommandations (du rapport) commandent des modifications législatives» — ce qui nécessite un certain temps.

Elle a nié que le gouvernement Couillard ait tardé à agir. «Vous allez voir au fil des prochaines semaines des projets de loi qui seront déposés», a dit la ministre de la Justice. Elle a rappelé que certaines modifications avaient déjà été apportées au fil des ans, notamment à la loi électorale, pour interdire plus clairement le recours aux prête-noms, et pour mieux encadrer l’octroi de contrats publics.

L’opposition officielle à la Ville de Montréal Projet Montréal a accueilli favorablement la création de ce comité public de suivi. «Grâce à ce comité de suivi, le rapport de la commission Charbonneau ne subira pas le sort de trop nombreux rapports et ne sera pas oublié sur une tablette. C’est, en soi, une excellente nouvelle», a déclaré Alex Norris, porte-parole en matière de gouvernance et de transparence, par voie de communiqué.

M.Norris mentionne notamment que l’administration du maire de Montréal dépose encore des documents relatifs à l’octroi de contrats publics «séance tenante» lors des conseils municipaux. «Résultat : des élus sont parfois contraints d’accorder des contrats sans avoir eu l’occasion d’en lire les détails», déplore un communiqué de Projet Montréal. La recommandation 53 de la commission Charbonneau suggère de mettre fin à ce type de pratique.

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