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En expédition pour sa profession

Photo: collaboration spéciale

L’hiver prochain, quatre téméraires traverseront le Québec en ski pour promouvoir leur métier, celui de guide professionnel en tourisme d’aventure.

En 1980, cinq hommes accomplissant l’exploit de parcourir 2 000 km, de Montréal à Kuujjuaq, en 133 jours. Désireux de faire revivre cette histoire, Jacob Racine, Bruno-Pierre Couture, Sébastien Dugas et Marie-Andrée Fortin espèrent faire le même parcours en seulement 100 jours grâce à un équipement plus efficace qu’à l’époque. Leur entreprise se nomme Projet Karibu.

Ce qui les motive à entreprendre une telle expédition? Promouvoir le plein air, l’activité physique, le respect de l’environnement, mais aussi la toute nouvelle Association des guides professionnels en tourisme d’aventure (AGPTA), dont ils sont membres.

Une telle association était nécessaire pour structurer la profession et assurer la protection du public, selon Jacob Racine, vice-président de l’AGPTA. «Tous ceux qui aiment le plein air peuvent, en pratique, être engagés comme guide, avance-t-il. Mais c’est un métier complexe.» Les guides en tourisme d’aventure dirigent des groupes au cours d’expéditions en plein air, que ce soit en montagne, en forêt, sur une rivière ou dans le désert.

D’après M. Racine, des accidents peuvent arriver lorsque les guides ne sont pas bien formés et expérimentés. Il cite l’exemple de Raphaël Bernier, neveu de la plongeuse olympique Sylvie Bernier, mort noyé en 2002 sous son embarcation lors d’une expédition en canot. Le guide n’avait pas la formation requise pour secourir le garçon de cinq ans.

L’AGPTA vise donc à donner une garantie de compétence à ceux qui engageraient leurs membres. Une façon d’adhérer à l’association est de posséder un diplôme reconnu, comme l’attestation d’études collégiales (AEC) en tourisme d’aventure du Cégep Saint-Laurent, celle du Collège Mérici à Québec ou le baccalauréat en intervention en plein air de l’Université du Québec à Chicoutimi. «Les étudiants y reçoivent une formation complète sur la gestion d’un groupe, l’interprétation de la faune et de la flore, les mesures de sécurité lorsqu’il y a des blessés, les façons d’éviter l’hypothermie et la gastronomie en plein air, pour ne nommer que quelques sujets, énumère M. Racine. Ils acquièrent aussi de l’expérience en réalisant des stages sur le terrain, un peu partout dans le monde.»

L’association compte pour le moment une vingtaine de membres, indique Renée-Claude Bastien, présidente de l’association. Mais ce nombre devrait augmenter dès la fin de l’année scolaire. «Nous avons une entente avec le Collège Mérici, à Québec. L’adhésion à l’AGPTA est maintenant incluse dans les coûts de formation», dit Mme Bastien. Toute une cohorte sera donc accueillie automatiquement à titre de guides stagiaires. «Après 60 jours de travail de guide, ils pourront devenir membres à part entière», ajoute-t-elle.

Cette démarche est très positive pour les finissants, croit Geneviève Blondeau, professeure en tourisme d’aventure au Collège Mérici.

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Renée-Claude Bastien voudrait que le public et les industries touristiques exigent un jour des guides membres de l’AGPTA. Elle apprécie par ailleurs la vitrine que lui offre le Projet Karibu. En attendant, l’association entreprendra d’ici la fin de l’année scolaire une tournée des établissements d’enseignement.

Sylvie Marois, coordonnatrice du programme de tourisme d’aventure au Cégep Saint-Laurent, est membre de l’AGPTA et assure qu’elle en fait la promotion auprès de ses étudiants. Elle n’est cependant pas favorable à une adhésion automatique comme au Collège Mérici. «Mais c’est un métier difficile, et plusieurs finissants ne deviendront pas guides, explique-t-elle. Seuls ceux qui s’engagent vraiment dans le métier devraient devenir membres.»

Compétences nécessaires
L’Association des guides professionnels en tourisme d’aventure structurera désormais la profession en accueillant des diplômés en tourisme d’aventure. Les guides formés «sur le tas» pourront aussi devenir membres s’ils possèdent la certification du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme, dont l’obtention est conditionnelle à la réussite d’un examen pratique, ou une attestation professionnelle reconnue.

Entrevue : voyager pour travailler

Jacob Racine est guide en tourisme d’aventure depuis 10 ans. Il se spécialise en expéditions nordiques, ce qui l’a amené à guider notamment à la Baie James et sur l’île de Baffin.

Quelles sont les caractéristiques d’un bon guide en tourisme d’aventure?
Un bon guide, c’est d’abord quelqu’un qui aime énormément le plein air. Il est aussi tourné vers l’humain, car il va dans la nature avec des gens. Il doit donc aimer communiquer, partager son expérience et son expertise. Il doit aussi inspirer le respect et avoir l’autorité nécessaire pour dicter aux clients quoi faire, comme de ne pas jeter ses déchets dans la nature.

Quel est le meilleur aspect de la profession?
C’est de voyager. J’ai visité les plus beaux coins de pays en tant que guide : l’Alaska, la Corse, le Grand Canyon, la Toscane. Car une fois qu’on a l’expertise de base, on peut guider dans toutes sortes de situations.

Et ses inconvénients?
Il faut s’attendre à vivre de l’insécurité financière. Les salaires sont aléatoires, il n’y a pas de standard et on doit souvent les négocier à la journée. Les débutants peuvent faire autour de 80 à 100 $ par jour, et la moyenne pour ceux qui ont plus de responsabilités et plutôt de 130 à 140 $ par jour. C’est aussi un emploi saisonnier, avec des périodes creuses à l’automne et le printemps. Beaucoup de guides se trouvent un emploi secondaire, par exemple dans une boutique de plein air. Finalement, puisqu’on est souvent en voyage, c’est difficile pour la vie de couple. Il y a beaucoup de guides célibataires!

L’AGPTA tiendra sa première assemblée générale annuelle lundi prochain.

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