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La liberté au bout des pieds

Young Man Traveler feet standing alone with sunset mountains on background Lifestyle Travel concept outdoor Photo: Getty Images/iStockphoto

«Chaque jour, j’use mes souliers sur le dos de la liberté», chantait Éric Lapointe dans Terre promise. Certains courageux sont passés de la parole aux actes et ont choisi de parcourir le monde sur leurs deux pattes, sans l’aide de moyens de transport modernes.

Que ce soit pour être au plus près de la nature ou pour repousser leurs limites physiques, ils ont opté pour le moyen de locomotion le plus simple: enfiler leurs bottes de marche et mettre un pied devant l’autre.

«L’idée m’est venue d’un voyage à bicyclette. J’ai remarqué que la vitesse du vélo me permettait d’être beaucoup plus en contact avec l’environnement qu’en voiture. Je me suis dit que, si on enlevait la mécanique du vélo, le contact serait encore plus grand», raconte Vincent Bussières, qui s’est donné au début de l’été le défi de marcher 5000 km sur les routes du Québec.

Le jeune homme de 26 ans amasse du même coup des fonds pour Leucan, en mémoire de sa cousine décédée récemment du cancer.

«La simplicité de la marche contraste avec la difficulté de la distance, un peu comme la simplicité de la vie s’oppose à la difficulté de la maladie. Le défi rejoint la cause d’une certaine façon.»

Pour Simon Bourk, c’est avant tout l’attrait du défi physique qui lui a fait prendre le large.


Après avoir parcouru le sentier des Appalaches, Simon Bourk a poussé son périple jusqu’en Floride.

En 2009, il a décidé de tout laisser tomber pour répondre à «l’appel de la forêt» qu’il ressentait depuis sa jeunesse et de «prendre une marche de la Gaspésie à la Géorgie».

Son objectif: parcourir en solitaire le sentier international des Appalaches, chemin forestier de plus de 4000 km dans la région la plus accidentée du continent nord-américain. Sa «petite marche» s’est finalement terminée en Floride, presque 13 mois après son départ.

«Ce n’était pas un voyage à la Compostelle, à la recherche de l’âme humaine, explique celui qui travaille comme consultant.  C’était avant tout un défi physique et personnel que je m’étais lancé.»

Celui qui avait alors 29 ans était un adepte de triathlon, habitué de la longue randonnée et de la survie en forêt. Il sera malgré tout confronté à des défis immenses: blessures, météo exécrable, difficultés de s’alimenter correctement… Tout cela en marchant au moins 10 heures par jour, pour franchir une distance quotidienne moyenne de 25 à 30 km.

«L’euphorie de la montagne permet de surpasser tout et donne l’énergie pour continuer, observe-t-il avec le recul. Sur le sentier, les émotions sont amplifiées. Les bas sont très bas, mais les hauts sont très hauts, Se retrouver seul au sommet d’une montagne permet de vivre des moments de joie exceptionnelle et donne le courage pour continuer la journée.»

«Le défi est beaucoup plus mental que physique, soutient de son côté Vincent Bussières, qui a été forcé de réduire son périple à 2500 km en raison de blessures aux jambes. Ça demande énormément de persévérance; pour se rendre à la fin de la journée, pour se retenir de prendre des pauses (parce qu’on en prendrait tout le temps), pour ne pas se décourager… etc.»

Contacts privilégiés
Outre l’effort physique, affronter la solitude est sans doute le plus gros obstacle à surmonter pour les grands marcheurs.

«J’ai marché seul pendant quatre mois, se rappelle Simon Bourk. Quand je suis sorti [du bois], je voulais donner des câlins à tout le monde!»

«La solitude suscite des réflexions personnelles, poursuit-il. Pour moi, ç’a mis à jour ma personnalité. Mais ce n’était pas forcé ou demandé, c’était à force de traverser des épreuves. Ça permet d’être franc avec soi même, de s’inspecter et de s’adapter.»

Vincent Bussières, lui, a choisi d’évoluer le long du réseau routier, ce qui lui permet de rencontrer davantage de gens.


Vincent Bussières a été forcé de réduire son parcours en raison de blessures.  Il terminera tout de même son périple en marchant de Gaspé à Gatineau.

«Le fait d’être à pied, et non dans un véhicule, enlève les barrières avec les autres, explique-t-il.  Le contact est facile, les gens sont curieux de voir ce que je fais, même les gens en auto s’arrêtent pour me parler.»

La marche, plus que tout autre moyen de locomotion, permet aussi de mieux apprivoiser le territoire.

«La vitesse à laquelle je me déplace me permet d’apprécier les paysages plus longtemps: les paysages devant, mais aussi derrière moi, constate celui qui a traversé à pied des dizaines de villes et de villages québécois. C’est le genre de choses qu’on ne peut pas faire en voiture ou en vélo.»

Difficile retour à la réalité
Comment reprendre une vie normale après avoir passé un an en pleine nature avec pour seules possessions ses bottes de marche et le contenu de son sac à dos?

C’est la dure question qui attendait Simon Bourk  à son retour. «Ça m’a pris un bon moment pour simplement m’asseoir devant un ordinateur et me concentrer une heure, confie celui qui travaille en informatique. La réadaptation a pris presque un an.» Encore aujourd’hui, il pense à cette époque avec nostalgie. «Je m’ennuie de la routine sur le sentier, des levers et des couchers de soleil, des paysages… J’étais habitué de marcher de 10 à 15 heures par jour, de voir défiler des paysages en permanence. J’avais une hygiène de vie super saine.»

Maintenant père de trois enfants, il profite de ses moments libres pour initier sa jeune famille au plein air. 

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